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Un petit tour d’horizon pour bien commencer une semaine qui permettra de vérifier, sur différents marchés, s’il faut ou non compter sur les fêtes de Noël pour renflouer les trésoreries horlogères à sec...
••• SAVE THE DATE : pour les premiers Ateliers de la refondation horlogère, réservez votre mercredi 4 mars. Thème de cette journée d’études intensives, d’échanges passionnés et de mises en perspective décapantes : « Y a-t-il une vie après la crise ? ». L’élite de la nouvelle génération horlogère est déjà mobilisée. Ce forum se tiendra au cœur des vallées horlogères. Invitations à venir (renseignements provisoires : Alaric/Business Montres).
••• TÊTE À CLAQUES : le nouveau concept de « montre de luxe pour enfant » lancé par le designer horloger John Isaac crée un certain malaise. Non pas que les gosses de riches soient voués à la brimade et privés du droit à une belle montre. Chacun sa Flik-Flak ! Dans les boutiques de luxe, il n’est pas rare de voir des nababs russes ou proche-orientaux offrir des tourbillons à des gamins de dix ans [j’ai vu le cas à Monaco, et il s’agissait en plus d’un tourbillon Jacob & Co]. Ce qui dérange, avec cette collection Little de John Isaac, c’est l’opportunisme purement marchand d’une démarche qui pose en « montre de luxe » une banalité à quartz facturée plus d’un millier d’euros. Et c'est la démarche marketing qui transforme les enfants en singes savants et qui en fait d'insupportables têtes à claques [image ci-contre]...
••• DÉSTOCKAGE : Gros arrivage sur eBay de montres DeWitt neuves, avec boîte et papiers, sacrifiées entre -40 % et -50 % de leur prix boutique. Des pièces authentiques, en provenance des Etats-Unis, avec des grandes complications en série limitée et des modèles féminins sertis, qu’on peut s’offrir sur-le-champ grâce au système du « Buy-it-now ». Cette année, le Père Noël est une ordure pour les détaillants de la marque !
••• ACHETEURS : Nicolas Hayek (Swatch Group) procède actuellement et discrètement au rachat de ses propres actions sur le marché. Des transactions opérées par lui ou des tiers, qui portent déjà sur plus d’une quinzaine de millions de francs suisses (annonces légales de SIX Swiss Exchange). Un vrai signal fort de sa confiance dans l’avenir du groupe – et un investissement logique pour celui qui a toujours avoué sa défiance envers les Bourses et son regret de ne pouvoir sortir son groupe de la cote. C’est bizarre : la même confiance ne semble pas habiter les grands actionnaires de référence des groupes de luxe concurrents...
••• COUP DE FREIN : pour Pierre-Olivier Chave, président de PX Group (La Chaux-de-Fonds) et spécialiste dans l'habillement horloger, cité par Bilan, « le ralentissement est très net depuis le mois d'octobre. Nous enregistrons près de 40% de commandes en moins pour notre usine en Malaisie. Certaines marques horlogères se tournent vers des prestataires meilleur marché. Il y a une réelle pression sur les prix. »
••• SACRILÈGE : des diamants à prix cassés sur Internet, où Brandalley les revend « dégriffés » ! Un lot de 1 000 pierres, certifiées par l’Institut de gemmologie d’Anvers, vient d’être épuisé en quelques heures, avec des rabais pouvant dépasser les 50 % par rapport à leur valeur moyenne sur le marché grand public [voire 70 % pour les plus petites pierres, qui commençaient à 400 euros]. Apparemment, les diamantaires anversois déstockent : il ne fallait que 9 000 euros pour acquérir une pierre de 1,51 carat d’une très belle composition. Comme quoi Internet peut tout casser, même les diamants...
••• DÉCODAGE : Jean-Claude Biver (Hublot) s’avoue lui aussi troublé par l'optimisme des statistiques officielles de l’horlogerie. « La seule lecture des chiffres actuels d'exportation est trompeuse. Ces statistiques ne disent rien de la quantité d'exemplaires réellement écoulés par les détaillants. Elles reflètent simplement le nombre de commandes passées il y a plusieurs mois. Dans les faits, la demande réelle des consommateurs a baissé. » Dans quelle proportion ?
••• NOSTALGIE : Pour les quarante ans de sa Monaco, qui seront fêtés à Baselworld 2009, TAG Heuer prépare une collection complète, qui comprendra notamment une version vintage de son légendaire chrono (réédition assez proche des codes de l'original, notamment la couronne à gauche), ainsi qu'une Monaco équipée du calibre El Primero, visible sous le fond saphir. Toujours pas de Monaco V4 en vue, malgré les millions d'euros déjà engloutis en R&D [l'approche « aéronautique » d'une horlogerie à base de super-calculateurs n'était peut-être pas la bonne approche]...
••• DOUTE : Nathalie Longuet, analyste pour LODH, explique dans Bilan que certaines entreprises horlogères, « qui n'ont pas suffisamment travaillé leur entrée de gamme avant la crise pourraient se trouver davantage affectées. Omega, par exemple, a choisi ses dernières années de repositionner ses prix vers le haut, et pourrait se retrouver en risque vis-à-vis d'une partie de sa clientèle. »
••• DÉPRIME : sur Madison Avenue (adresse new-yorkaise des grandes agences de publicité américaines), le moral est plutôt dans les chaussettes. L’année 2009 s’annonce au minimum comparable à 2001, mais certains indicateurs laissent penser qu’on pourrait se rapprocher de la grande crise publicitaire de 1970. Explication : les annonceurs ont sabré sans ménagements dans les budgets 2009. Conséquence directe : une hécatombe dans les titres magazines « non indispensables » et une grande fragilité pour les groupes de presse qui sont loin d’avoir achevé une transition profitable vers le numérique et qui se trouvent pris à contrepied. Selon l’agence de notation financière Fitch, qui relève que les médias américains ont déjà perdu 15 000 emplois, plusieurs grands journaux et groupes de presse américains pourraient faire faillite en 2009, privant des régions entières d’information...
••• TASSEMENT : même Internet va souffrir de la crise économique et de la réduction des budgets publicitaires. Selon une étude publiée par l’Electronic Business Group, il faut s’attendre à une chute marquée du display – les bannières classiques – au profit des opérations à rendement. Même baisse annoncée des opérations rich media – toutes les déclinaisons multi-supports. Dans un contexte de négociations toujours plus tendues, les « opérations spéciales » sont privilégiées par les annonceurs, qui savent que l’audience Internet sera de toute façon dopée par la crise...
••• CONSANGUINITÉ : de l’avis unanime des marques, les prix horlogers de fin d’année sont trop... « consanguins » ! Concept poli pour désigner ce que Business Montres nomme tout simplement des pollutions marchandes. Un bon exemple récent de cette consanguinité, dont on sait qu’elle aboutit généralement à de fatales aberrations génétiques. Le Prix de la communication corporate horlogère était récemment décerné à Paris par Montres Passion (groupe Ringier), en association avec Point de vue (groupe Roularta). Il a été attribué à Hermès. Qui a décerné ce prix ? Christophe Barbier, directeur de la rédaction de L’Express (groupe Roularta), marié à la ville avec Yamini Kumar-Cohen, directrice de la communication d’Hermès. N'en jetez plus ! Même si Hermès méritait ce prix [ce n’est pas le débat], ces coïncidences endogamiques troublent. Surtout quand on sait que le groupe Ringier s’est associé au groupe Roularta pour la diffusion de Montres Passion en France...
••• TIR AU BUT : Gisele Bündchen, mais aussi Ebel et sa stratégie dans le foot-marketing pendant sept minutes sur Power Lunch, les concurrents vont être jaloux ! Présenté par Ross Westgate tous les matins, Power Lunch est le programme économique de CNBC qui cartonne le plus en Europe, avec 110 millions de foyers touchés dans le monde et 10 millions en Europe. Le Real + Gisele, c’est la dream team du luxe horloger !
••• BIO-PLASTIQUE : le « bois liquide » est un des nouveaux matériaux les plus étranges de l’année. Ce n’est pas la première fois que les chercheurs parviennent à rendre « liquide » – c’est-à-dire plastique – des composants de la cellulose du bois, mais c’est la première fois qu’ils parviennent à les stabiliser sans produits chimiques dangereux. Les équipes allemandes du Fraunhofer Institute for Chemical Technology ICT et du spin-off Tecnaro (Fraunhofer) ont mis au point un « bio-plastique » à base de lignine : il s’avère capable de résister à l’eau, il est recyclable et non dangereux pour les enfants. De quoi créer des boîtiers de montres à la fois innovants – notamment pour les enfants – et plus respectueux pour l’environnement que l’actuel plastique dérivé des hydrocarbures...
••• L’AUTRE MARQUE : tout le monde s’est focalisé sur la Seamaster de David Craig dans le dernier James Bond, mais quelle est l’autre montre du film, celle que porte Mathieu Amalric ? Un chrono Hamilton Aviation (quartz). On reste entre marques du Swatch Group...
••• LIQUIDATION : vente spéciale de montres Yema, aujourd'hui, à Besançon. Emportée par la tourmente qui a failli couler le géant chinois Peace Mark, la marque française Yema n'a pas résisté et se trouve en redressement judiciaire, une équipe de sept personnes demeurant symboliquement en place, dans des locaux neufs inaugurés cet été. C'est d'autant plus triste que la marque n'avait pas démérité et qu'elle avait tenté de se repositionner – non sans succès commercial – sur le marché du sport chic accessible. L'image de la marque restant excellente et la cote d'amour demeurant très forte auprès des amateurs, il serait navrant que disparaisse en catimini une des plus anciennes références de l'horlogerie bisontine [maison fondée en 1948]...
••• SONDAGE : merci à tous ceux qui veulent commencer la semaine en beauté de répondre au sondage international de la Haute Ecole de Gestion de Genève (HEG). C’est anonyme [lien ci-dessous] et ça peut faire avancer la recherche sur les besoins et les attentes des consommateurs pour l'e-commerce des montres de luxe. Il n’est pas interdit de le faire suivre aux copains. Plus les résultats seront riches, plus nous y verrons clair dans ce dossier pour le moins embrouillé et enfumé de l’horlogerie de luxe sur Internet.
Le sondage international de HEG Genève : http://campus.hesge.ch/luxe/sondages/ |