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STATISTIQUES 2008 : les chiffres de la FH sont enfin disponibles !
 
Le 04-02-2009
de Business Montres & Joaillerie

Dans les statistiques brutes, une très bonne année 2008.
En affinant l’analyse, beaucoup de facteurs d’inquiétude.
En rentrant dans les détails, une dégradation tendancielle sur des segments stratégiques.

••• L’AVANTAGE DES STATISTIQUES, C’EST QU’ON PEUT LEUR FAIRE DIRE CE QU’ON VEUT ! Objectivement, en s’en tenant aux grands chiffres-cadre, on peut affirmer, comme la FH, que « l'horlogerie suisse a connu une très bonne année 2008. Affichant de forts taux de croissance mensuels, elle a exporté l'équivalent de 17,0 milliards de francs. Ce niveau record s'inscrit en hausse annuelle de 6,7% par rapport au résultat réalisé en 2007, soit une progression de plus de 1 milliard de francs. 2008 et les quatre années de croissance ont placé la branche à un niveau particulièrement élevé ». Parfait…

Rappelons seulement que ces statistiques sont celles des exportations déclarées hors du territoire suisse, et non celles des ventes réelles sur le terrain, et regardons de plus près les évolutions cachées dans les colonnes de ces statistiques. La baisse tendancielle des exportations était inscrites dans les taux mensuels dès le début de l’année, avec des inflexions plus nettes selon les catégories : le recul des montres en acier – le cœur du marché – est très net pour 2008, avec la perte de plus d’un demi-million de pièces. Globalement, au dernier trimestre 2008, l’industrie a enregistré une baisse de plus d’un million de montres ! Ce qui est un peu inquiétant…

••• FAUT-IL RAPPELER QUE LES USINES, les manufactures et les ateliers tournent avec des volumes de commandes, et non avec des valeurs comptables ? Un pont est un pont, qu’on le loge dans une montre à 1 000 francs ou dans une montre à 100 000 francs. Même constat pour un spiral, un balancier, un ressort ou un verre saphir. Ce sont ces volumes qui permettent de maintenir un savoir-faire collectif et une capacité de concurrence industrielle : cet effritement structurel est donc un indice qui vient tempérer l’optimisme statistique.

En termes de gamme, on voit également plonger, tout au long de l’année, les statistiques des catégories qui assuraient jusque-là les volumes et la prospérité industrielle de la montre suisse, notamment la moyenne gamme. Ce sont désormais les pièces en or, les plus chères, qui tirent la croissance horlogère, les montres en acier ne progressant, en valeur, que de 1,9 %. S’il est comptablement satisfaisant de vendre moins de pièces, mais de les vendre plus cher, cela peut aussi s’interpréter comme un double danger : la fragilisation d’une pyramide qui ne repose plus que sur sa pointe et la dégradation des parts de marché suisses à travers le monde, où il se vend désormais moins de ces montres qui avaient permis un siècle de conquêtes horlogères.

••• LE RAISONNEMENT GLOBAL EN VALEUR EST PEUT-ÊTRE INTÉRESSANT POUR LES ACTIONNAIRES, mais il est trompeur pour les acteurs eux-mêmes : le bond des montres en platine en décembre (+ 40,4 % en volume, + 27,9 % en valeur) suffit à fausser la statistique, qui n’affiche, par exemple, que 7,8 % de baisse en valeur. Il ne s’agit pourtant que de 1 600 montres sur 1 900 000, mais elles permettent de masquer la vraie variation de décembre. Le schéma ci-dessus est assez éloquent pour qu’on n’y revienne pas (il s'agit des chiffres de décembre) : d’autres schémas, chiffres et commentaires à découvrir sur le site de la FH ( http://www.fhs.ch/fr/statistics.php ).

••• L’ÉVOLUTION DES MARCHÉS EUX-MÊMES RECÈLENT QUELQUES TROUBLANTES INDICATIONS : certains pays-clés, débouchés traditionnels des montres suisses, ont dévissé, comme les Etats-Unis ou le Japon. D’autres, qui avaient donné le tempo de la croissance au cours de ces dernières années, sont en panne : le Royaume-Uni, l’Espagne, la Russie. Les facteurs encourageants restent le maintien global des marchés européens classiques (France surtout, mais aussi Allemagne et Italie), avec la montée en puissance des marchés proche-orientaux (Emirats et Arabie séoudite). Pronostic réservé pour le marché grand-chinois, qui a trop sévèrement plongé en fin d’année pour que les + 43 % des statistiques officielles pour 2008 aient la moindre signification.

Ce sont justement les décrochages de décembre qui attirent l’attention : - 16 % en volume par rapport à 2007 (- 7,7 % en valeur), ça reste très brutal, avec des pointes à – 30 % pour les Etats-Unis (- 42,3 % pour 2008/2006). Le coup d’arrêt est tout aussi net en Chine (- 11,8 %), à Hong Kong (- 15,2 %) ou à Singapour (- 10 %). Le Proche-Orient lui-même est en recul. Freinage statistique qui fait peur si on prolonge sur 2009 l’évolution des courbes de la fin 2008 : ce n’est plus une glissade, mais une chute libre, avec une récession inscrite dans la géométrie des chiffres pour le premier trimestre 2009 !

••• TOUT CECI POSÉ ET UNE FOIS CES REMARQUES FORMULÉES, on ne va quand même pas bouder notre plaisir en niant l’extraordinaire performance que constitue le maintien d’une croissance horlogère positive en période de crise ! Même si l’avenir est plutôt sombre, même en tenant compte des illusions statistiques soulignées ci-dessus, la montre a fait la preuve de son statut à peu à part dans l’univers du luxe et, plus généralement, dans la culture contemporaine des objets.

Culture aujourd’hui diffusée dans le monde entier, avec un même respect pour la tradition manufacturière suisse et un même désir collectif d’accéder, grâce aux montres et à leur sémantique singulière, à une autre dimension du temps…

••• UN DES SIGNES LES PLUS ENCOURAGEANTS DE CE BILAN STATISTIQUE DE L’ANNÉE 2008 reste la solidité des marchés traditionnels de la montre suisse : l’Europe ! C’est-à-dire essentiellement la France, qui dépasse désormais le Japon, l’Allemagne, l’Italie ; à peu près l’ancienne Communauté européenne. Par rapport à 2006, on y a vendu à la fois plus de montres et des montres plus chères. Au même moment, tous les Eldorados horlogers de ces dernières années reculaient ou s’effondraient, souvent sans espoir de retour rapide à une meilleure fortune.

C’est dire à quel point les amateurs européens sont aujourd’hui la meilleure ressource des horlogers suisses : ils connaissent les marques, ils aiment les montres et ils font preuve d’une étonnante culture horlogère, comme a pu le prouver le dernier salon Belles Montres (Paris). Un peu délaissés ces dernières années au profit des nouvelles fortunes asiatiques ou des surendettés américains, ces amateurs ne demandent qu’à revivre une belle histoire d’amour avec les manufactures suisses.

Le tout est maintenant de proposer à ces marchés une offre produits plus réaliste en termes en prix, plus créative en termes de styles et surtout plus en phase avec les nouvelles sociologies de la demande.

••• DERNIER POINT, TRÈS PERSONNEL : on ne m'enlèvera tout de même pas de l'idée que l’influence lénifiante des statistiques d’exportation et l’illusion d’optique qu’elles génèrent (notamment le décalage par rapport au terrain) ont été un handicap dans la prise de conscience de cette crise. Quand Business Montres a tiré la sonnette d’alarme, en septembre, le décrochage était déjà patent, mais personne ne voulait l’admettre. D’où les retards à l’allumage des contre-mesures. D’où les réactions brusques vis-à-vis des fournisseurs pour cause d’« effet bullwhip ».

D’où la casse actuelle en termes d’emplois…
Il appartient maintenant à la FH de mettre en place un nouvel outil statistique, qui ne repose plus exclusivement sur des informations douanières, mais qui rende compte, de façon réaliste, de l’activité réelle de l’industrie et des réseaux : pourquoi et au nom de quel archaïsme l’horlogerie serait-il le seul secteur industriel à ne pas disposer d’une base de données intelligible ?

 



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