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Y a-t-il des pilotes pour toutes ces montres allemandes ?
 
Le 09-02-2009
de Business Montres & Joaillerie

On ne se lasse pas de découvrir toujours plus de nouvelles marques horlogères allemandes. On s’étonne seulement de voir qu’elles labourent éternellement le même sillon des « montres de pilote »
dans le plus pur style Luftwaffe.
Bégaiement historique ou exorcisme ?

••• SANS EXAGÉRER, ON COMPTE PLUS D’UNE TRENTAINE DE MARQUES ALLEMANDES qui proposent à peu près exactement les mêmes « montres de pilote », le plus souvent avec le même mouvement [un bon vieil Unitas 6497, au mieux suisse, au pire refait en Chine] et le même cadran : petite seconde à 9 h, marquages contrastés, index triangulaire à 12 h, parfois sans marque sur le cadran pour faire encore plus militaire. Ne pas oublier le bracelet riveté ou doublement riveté pour rappeler les fournitures réglementaires du cahier des charges de la Luftwaffe.

••• PARMI LES MARQUES LES PLUS CONNUES, ON PEUT CITER ds grands noms comme IWC, Sinn, Wempe, Stowa, ou même Glashütte Original [qui a eu du mal à s’y mettre, alors que c’était la marque la plus légitime de cette « niche »], mais aussi Archimede et Limes [voir ci-dessous], Laco, Aristo, Arctos, GPW [marque spécialisée dans les boîtiers céramique, avec des initiales qui signifient German Precision Watch], Ollech @ Wajs, Nautische Instrumente Mühle, D. Dornblüth, Debaufre, Blancier, MK II, pour ne citer que des marques s’inspirant très directement des B-Uhr de la Seconde Guerre mondiale.
On pourrait parler des marques plus directement liées au passé aéronautique allemand, comme Junkers, Zeppelin, Messerschmitt, Heinkel ou Askania, ce qui permet une prolifération des modèles baptisés Tempelhof – célèbre aéroport de Berlin – et autres citations historiques.

••• UNE DES DERNIÈRES MARQUES AINSI LANCÉES EST TOURBY (Hagen, Westphalie), dont le nom fait volontairement penser à un tourbillon et dont les montres hésitent entre Breguet, pour une part de la collection, et IWC pour l’inspiration Big Pilot, dont elle reprenne d’ailleurs le nom (modèle ci-dessus). Avec un mouvement suisse ETA plus ou moins retravaillé, la facture monte à 500 euros. Tourby propose aussi d’étonnants calibres Hamilton 917 American Made. Ces montres sont diffusées exclusivement sur Internet, avec une personnalisation poussée à l’extrême dans les finitions du mouvement et beaucoup de variantes dans l’exécution de la boîte ou du cadran (à découvrir sur http://tourbywatches.com).

••• AVEC UNE FABRICATION ALLEMANDE, MAIS UNE ORIGINE AMÉRICAINE, les Wilson Watch Works [des initiales qui permettent de détourner le marquage réglementaire WWW] recopient les codes des « montres de pilote », avec des cadrans et des boîtiers stériles, des mouvements Unitas et une diffusion Internet pour à peu près 450 dollars, mais on peut opter pour des mouvements chinois Sea-Gull pour 150 dollars de moins. Revue à découvrir sur http://blog.breitlingsource.com/2009/02/04/wilson-watch-works-navigator-review/.

••• LA PALME DE L’ORIGINALITÉ REVIENT SANS DOUTE À DEFAKTO, nom qui fait allusion à la locution latine de facto, « dans les faits », avec un K très germanique. La proposition de Raphael Ickler est amusante : dans le goût des « montres de pilote » et sur une base ETA 2824, une seule aiguille pour un heure volontairement approximative, facturée 420 euros, par une diffusion exclusive sur Internet. Pour mémoire, la famille Ickler est célèbre à Pforzheim pour ses activités dans l’habillage de montres et la production de boîtiers : elle possède également les marques Limes et Archimede, qui proposent exactement les mêmes « montres de pilotes » que tant d’autres marques allemandes ! Le site Defakto est à découvrir sur http://www.defakto-uhren.de, qui renvoie d’ailleurs sur les sites des autres marques du grouge Ickler GmbH..

••• À CROIRE QUE LA MOITIÉ DE L’ALLEMAGNE EST PEUPLÉE DE PILOTES MILITAIRES et l’autre moitié de nageurs de combat, tellement on pourrait faire les mêmes remarques pour les marques allemandes spécialisées dans les montres de plongée et acharnées à dupliquer à l’infini les cahiers des charges de la Kriegsmarine et de la Bundesmarine : citons encore Sinn, Archimede, Steinhart, Kazimon, Riedenschild, UTS et tant d’autres, accrochées aux mêmes repères stylistiques !

Les thèmes choisis pour ces « montres de pilote » à prix accessibles – généralement facturées à moins de 1 000 euros, ce qui prouve qu’on peut faire de belles montres mécaniques avec des mouvements Swiss Made sans ruiner ses clients – interpellent autant que l’uniformité de leurs cadrans, limitées à quelques codes graphiques, et de leurs mouvements, invariablement « Unitasisés », avec ou sans accent suisse.

Pourquoi cette passion pour des « instruments de bord » mécaniques, certes ultra-lisibles, mais terriblement dépourvus de toute émotion.
A moins que, précisément, l’émotion ne naisse du contexte socio-historique qui a vu éclore ces montres et qui a généré ces codes esthétiques : l’épopée de l’aviation militaire, les dog fights, la fureur mécanique de la guerre des machines. Emotion un peu malsaine, non ?

 



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