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Votre Quotidien des Montres vous propose une promenade de Genève à New York, en passant par Bienne et Hambourg, avec des escales à Paris, Londres, Milan et partout où il peut se passer quelque chose d'intéressantdans l’actualité des montres et de ceux qui les font...
••• ANTIQUORUM
Est-ce le début de la (vraie) fin ou un nouveau rebondissement ? Méfiance, mais restons vigilants ! Apparemment, la société Antiquorum Genève se trouve vidée de toute substance et on raconte que son COO, William Rohr, aurait définitivement quitté Genève ces jours-ci pour retourner travailler à New York...
La plainte pour escroquerie lancée contre Antiquorum par le fameux « marquis espagnol » et récemment révélée par Business Montres (22 mai dernier : information impossible à démentir compte tenu de notre source espagnole) pourrait avoir accéléré une opération en cours chez Antiquorum Genève. Directement visé, William Rohr échapperait ainsi provisoirement à la justice genevoise, qui aimerait bien pourtant l’entendre à propos de la poignée de millions escamotée lors de la vente de la collection du « marquis espagnol ».
On avait remarqué, depuis quelques mois, la dévolution progressive des actifs d’Antiquorum Genève à Antiquorum New York, société distincte de la tête de réseau genevoise. On découvre ainsi que la marque et le logo Antiquorum – le fameux A avec des « moustaches » – sont devenus propriété d’Antiquorum New York, alors que les sites Antiquorum.com et TimeZone sont désormais enregistrées au nom d’Antiquorum New York.
••• LA STRATÉGIE DE LA COQUILLE VIDE EST UN GRAND CLASSIQUE : on pourrait trouver d’autres exemples de cette translation d’actifs – certains intéressent déjà la justice genevoise dans un dossier parallèle – et de la préparation d’une esquive de dernière minute. Il est devenu évident que Genève n’est plus, pour Antiquorum USA, qu’une coquille vide, endettée et ruinée, le centre opérationnel de la maison d'enchères étant désormais situé à New York. Loin des juges et des huissiers genevois...
••• SWATCH GROUP-TOURNEAU
Apparemment, le torchon brûle entre les deux partenaires, qui avaient annoncé en 2006 une alliance stratégique pour les montres haut de gamme aux Etats-Unis : la brouille serait née du refus de Tourneau, dont les points de vente sont déjà surstockés au-delà du raisonnable, d’honorer de nouvelles livraisons effectuées par le Swatch Group. L’affaire est remontée jusqu’à Bienne, où une rupture des relations a été envisagée au plus haut niveau du groupe. Un coup de semonce a été tiré avec Omega, qui pourrait disparaître des vitrines Tourneau, non seulement à New York, mais aussi dans le reste du réseau.
••• LA POLÉMIQUE ENGENDRÉE PAR CE DOSSIER POURRAIT AVOIR COÛTÉ SON SIÈGE DE CEO à Howard Lewitt, récemment donné partant par Business Montres (28 mai).
••• ROLEX
En vue de l'édition d'un futur Guide Michelin des salles à manger horlogères , on peut faire confiance à Rolex pour nous proposer une expérience gastronomique totale et inoubliable : au siège social de Genève, la hiérarchie – y compris gustative – est physiquement élevée au rang de culture légèrement... sectaire.
Tout se passe au dixième étage, dont les salles à manger sont réservées aux seuls directeurs. Les cadres de rang subalterne en sont évidemment exclus, sauf invitation formelle par e-mail avec pré-réservation de contrôle.
L’aventure commence dès l’ascenseur, où il n’est pas question qu’un employé prenne l’ascenseur avec un des quatre directeurs du groupe : l’étiquette interne Rolex oblige l’inférieur à laisser son supérieur jouir en paix d’une montée vers les sommets de la gloire. Service en gants blancs et maîtres d’hôtel compassés, avec une vue sur les faubourgs industriels de Genève : on est loin de la foule des bureaucrates qui cantinent dans leur coin.
Question : à quoi reconnaît-on un directeur dans un ascenseur ? L’étiquette Rolex exige qu’on le connaisse. Point à la ligne. Ce directeur portera, de tout façon, le même costume gris-bleu que tout le monde – le bleu-gris est permis pour les cadres les plus audacieusement fantaisistes, mais de préférence à la belle saison ! – dans des couloirs où la cravate est de tout façon obligatoire, façon IBM dans les années soixante.
Le saint des saints, c’est au-dessus, au onzième, l'étage directorial où le fauteuil de Patrick Heiniger – appelé en décembre à développer ailleurs des projets personnels – n’est toujours pas occupé par Bruno Meier, qui doit se méfier des mauvaises ondes qu’on y ressent peut-être encore. A moins qu'il ne soit allergique aux... micros, persiflent les employés rebelles ! En tout cas, on ne lui a pas proposé d’occuper ce lieu symbolique, où il faut sans doute faire ses preuves (?) pour mériter un privilège inouï de monarque absolu.
••• CETTE ÉTIQUETTE PLUS SUBTILE QUE CELLE DE LA COUR IMPÉRIALE CHINOISE, plus byzantine que les préséances constantinopolitaines et plus maniaquement saint-simonienne que les querelles de tabourets entre les duchesses du Versailles de Louis XIV, prêterait à rire si elle n’était que folklorique. Le problème est que ces pratiques sont structurellement ravageuses, dans une entreprise qui a érigé le culte du secret et du cloisonnement en rituel de mort – surtout par temps de crise.
• Quand personne n’ose prendre la parole par peur de se faire remarquer, ou par crainte de passer pour un original agité et non consensuel, les responsabilités se diluent faute d’autorité pour affronter les difficultés : on peut ainsi perdre 40 % à 50 % de son volume d’affaires avant qu’un plus courageux que les autres tire la sonnette d’alarme ! C’est inquiétant pour l’avenir : pour avoir longtemps sacrifié à des rituels aussi engoncés et ankylosants, IBM et General Motors ont fini par succomber. Leurs ailes de géants les ont définitivement empêché de marcher. On aime trop Rolex pour imaginer qu’il puisse en être ainsi un jour...
••• MONTBLANC
Révélée par Business Montres ce matin, l’incroyable affaire du stylo-hommage au « Bédouin du IIIe Reich » a violemment secoué l’état-major Richemont de Bellevue : personne n’avait flairé le moindre danger, ni le moindre relent sulfureux, dans l’itinéraire de ce brave fils de banquier et archéologue amateur. Personne n’avait vu venir la demande de clarification et personne n’avait remarqué que seul le site anglais de Montblanc faisait référence à Max von Oppenheim, absent des autres versions du site...
••• LA LÉGÈRETÉ DE MONTBLANC DANS CETTE AFFAIRE EST STUPÉFIANTE : quand on tape « Max von Oppenheim » sur un moteur de recherche, en trois clics, on remonte assez de marchandises « suspectes » pour qu’un clignotant d’alerte s’allume. Surtout à propos d’une personnalité allemande des années fatidiques. Apparemment, les bureaucrates du groupe Richemont sont daltoniens en plus d’être myopes !
• Maintenant, que faire ? C’est là qu’on va juger de la maturité d’une marque face à une communication de crise. Retirer le stylo de la vente et s’excuser avant de passer à autre chose ? Ce serait la meilleure preuve d’intelligence à envoyer aux marchés, mais quelle déculottée virtuelle ! Non seulement pour Montblanc, mais surtout pour les centaines de médias, sites et autres qui ont remâché cette information sans broncher. Ce serait aussi un message ambigu à destination des marchés arabes, qui ont, en revanche, une approche plutôt positive de ce « Bédouin du IIIe Reich ». La pire solution serait de ne rien faire, de pratiquer la politique de l’autruche et d’ignorer que ce stylo commémoratif pose un réel problème d’éthique et de netteté idéologique. Surtout pour une marque basée à Hambourg...
• Précision : les informations de Business Montres ne remettent évidemment pas en cause l’honorabilité de la maison Oppenheim, « banquiers depuis 1789 », ni la qualité historique et archéologique des découvertes de Max von Oppenheim, dont la carrière est prudemment « épurée » dans la présentation qu’en donne la fondation Oppenheim...
••• ZAPPING •••
Quelques petits riens sur un peu de tout ce qui concerne les montres…
• AURUM : propriétaire de Mappin & Webb, Goldsmiths et Watches of Switzerland, Aurum – qui est aussi le plus grand distributeur anglais de Rolex, Patek Philippe, Cartier, Breitling, Omega et TAG Heuer – annonce des ventes... stables au premier trimestre 2009. Voire même 6 % d’augmentation dans ses boutiques. Avec quelles remises, demandent les mauvaises langues ?
• BELL & ROSS : la fameuse BR-01 « Airborne », dédiée aux parachutistes et remarquée pour sa tête de mort ultra-graphique et phosphorescente, arrive dans les vitrines horlogères de Colette, le concept store parisien. Lancement le jour du D-Day : normal pour une montre « Death from Above » héritière de la symbolique traditionnelle des troupes d’élite et travaillée comme un « talisman » thanatophobe. Qui aura le n° 1 de cette série de 500 exemplaires ?
• BELSTAFF : la marque de mode (anglaise à l’origine, italienne aujourd’hui et spécialisée dans les vêtements pour motards de luxe et l’art de vivre) se risque dans l’arène horlogère en confiant sa licence montres au groupe italien Lorenz (Milan)...
• CARTIER-HUBLOT : de quoi peuvent bien parler Bernard Fornas (Cartier) et Jean-Claude Biver (Hublot) quand ils déjeunent amicalement à La Réserve, à l’invitation de Gabriel Tortella (Tribune des Arts) ? De.. vaches – côté Biver – et de chevaux, l’autre passion de Bernard Fornas ! L’un fait son fromage et l’autre déguste ses œufs...
••• NORMAL : POURQUOI PARLER DE CRISE ? Surtout avec la prochaine annonce de vacances horlogères à rallonge chez Cartier à La Chaux-de-Fonds : selon les syndicats suisses, les ateliers devraient fermer à la mi-juin pour ne rouvrir que début septembre...
• GIRARD-PERREGAUX : la désormais légendaire Vintage 1945 Jackpot – un tourbillon à bandit manchot, soit un exercice de style jamais tenté dans l’horlogerie – s’habille désormais en or gris. Et c’est moins clinquant, sur cadran noir, que l’ancien or rose...
• MOBIADO : un nouveau venu – très très moche – dans la série des téléphones portables à vocation horlogère. Mobiado pousse la surenchère jusqu’à un double rotor de remontage (Swiss Made, évidemment, mais tout aussi moche), de l’or partout, un look général d’interphone bling-bling un style totalement suranné d’avant-crise...
• PAUL PICOT : Business Montres avait inscrit un peu vite le sympathique Eric Oppliger sur la « liste de Müller ». C’est vrai qu’il était partant pour la retraite, mais pas viré comme une lecture hâtive aurait pu le faire croire. Cette fois, c’est fait : Eric Oppliger part vraiment à la retraite, même s’il reste à la disposition du conseil d’administration pour des « missions spéciales ». Il est remplacé par Christophe Schaefer, déjà en place depuis quelques jours.
• RAYMOND WEIL : la marque genevoise réfléchit très sérieusement à une option sur la distribution en ligne de ses montres. Un concept à corréler aux récentes initiatives américaines de TAG Heuer sur ce terrain : on sait que les deux marques sont souvent en confrontation sur le nouveau continent. Le plus dur à gérer dans le projet est la réaction – épidermiquement ultra-sensible – des détaillants européens de la marque...
• RICHARD MILLE : une nouvelle série limitée boutique, cette fois pour la RM 011 rééquipée pour Richard Doux (cinq boutiques, dont Courchevel et Saint-Tropez). Boîtier DLC noir et rehaut vert, avec un chiffre 11 et une date verte, le tout édité – comme on pouvait s’en douter – à 11 exemplaires : l’été sera chaud (72 000 euros) !
• TAG HEUER : apparemment, le test américain de vente en ligne pratiqué par TAG Heuer avec Tourneau (« Tag Heuer shop on line » et Barmakian s’est révélé positif et tout est désormais prêt pour une migration partielle de la distribution sur Internet. L’annonce officielle en a été faite au récent JCK Show : TAG Heuer aura désormais son propre Online Customer Service, pour l’instant basé aux Etats-Unis. Les détaillants « brick and mortar » de la marque n’ont plus qu’à se préparer à cette nouvelle concurrence : TAG Heuer s’assure une place de pionnier dans ce domaine. Un pionnier est toujours suivi par d’autres aventuriers...
• TERMINATOR SALVATION : réponse à une interrogation existentielle de Business Montres sur la montre officielle du prochain Terminator Salvation – pour les fans : Terminator 4. Ce ne sera donc pas Audemars Piguet, qui s’en tient à sa Royal Oak T3, mais... Police, la licence de mode italienne , qui vient de lancer un coffret officiel (série Trooper Watch limitée à 1 000 pièces, quartz, acier/PVD or rose, 310 euros : image ci-dessus). Le site dédié et le clip promotionnel méritent le détour...
• TIMEX : la réorganisation du groupe américain se poursuit, avec l’absorption progressive des activités Callanen, reconcentrées sur l’état-major de Middlebury (Connecticut). Dernière opération en date : le passage de la licence Marc Ecko signée par Callanen, mais récupérée (développement, production, marketing et distribution dans 35 pays) et optimisée par Timex Group...
• ZENITH : à peine assis dans son nouveau fauteuil présidentiel, Jean-Frédéric Dufour – le remplaçant de Thierry Nataf – a dû régler deux dossiers urgents. D’abord, l’annulation de la « vente privée » – assez publique, en fait – qui devait avoir lieu aujourd’hui et dont la révélation par Business Montres (22 mai) avait provoqué un gros coup de colère chez les détaillants suisses : bonne décision, en termes d’image, c’était désastreux. Ensuite, la négociation d’un « plan social » d’une ampleur encore inégalée dans l’industrie suisse. De source syndicale, on évoque ces jours-ci une fourchette de 80 à 120 suppressions de postes : décision difficile, mais devenue inévitable...
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