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FRANCK MULLER - Omerta sur un accord fiscal
 
Le 18-06-2009

Ainsi donc, l’administration fiscale genevoise a réglé le litige qui l’a opposée à la firme horlogère Franck Muller, comme nous le révélions hier (lire notre rubrique économique du 16 juin). Selon nos informations, le taxateur a revu ses prétentions à la baisse, révisant les arriérés de l’entreprise à 240 millions de francs, soit moitié moins qu’initialement demandé. Cadeau choquant alors que les licenciements pleuvent, diront certains. Résolution d’une équation complexe, jugeront d’autres.

Le conflit est ancien, remontant jusqu’à l’exercice fiscal 1999. Le casse-tête tiendrait notamment à la difficulté de taxer un groupe déployé sur plusieurs pays et d’évaluer les flux de valeurs en son sein. Cet exercice ardu porte un nom: prix de transfert. Mais malgré cette complexité, certains se demandent, en sourdine, par quel miracle l’affaire a tant traîné.

Strict secret fiscal

Suite à des interpellations, le parlement s’est encore échauffé sur le dossier Franck Muller au printemps 2008, mais s’est heurté au black-out du Département des finances. Lequel n’a pas le choix: la loi genevoise de procédure fiscale force au silence les personnes qui collectent les impôts. Un serment spécial est même prévu pour elles: «Garder le secret le plus absolu sur toutes les déclarations, documents, opérations et communications dont j’aurais eu connaissance.»

Des exceptions existent, notamment en faveur des offices chargés de l’octroi d’aides ou du Palais de justice, en cas de poursuites pénales. Mais pour le parlement, rien. Quid du contrôle démocratique? Les avis divergent au sein de la Commission des finances du Grand Conseil.

«Je le vis mal, déplore le socialiste Alberto Velasco. La majorité du parlement a invoqué ce secret pour classer une pétition alarmante au sujet des problèmes fiscaux de Franck Muller. Quand il en va des intérêts de l’Etat et de l’équité devant l’impôt, les députés doivent être au courant! Un secret si strict est scandaleux dans une société développée. Tout citoyen devrait pouvoir consulter une déclaration d’impôts s’il a un intérêt légitime. Où est le problème si on n’a rien à cacher?»

A droite, on est moins curieux. «Si on défend le secret bancaire, on doit défendre le secret fiscal, qui va de pair, estime le PDC Guy Mettan. On ne peut pas faire une exception pour un gros contribuable.» «Je demanderai quel est l’espoir pour l’Etat de toucher son dû, concède le libéral Pierre Weiss, président de la Commission des finances du Grand Conseil. Mais le secret fiscal, y compris dans sa version stricte genevoise, est une protection nécessaire dans une démocratie. Je reste à ma place de député: un parlement de milice n’a pas la compétence de s’occuper de l’opérationnel. C’est le rôle de l’Exécutif, et je fais confiance à David Hiler.»

Une fois n’est pas coutume, le libéral tombe ainsi d’accord avec le Vert Christian Bavarel: «L’opérationnel doit être laissé au Conseil d’Etat. Les députés doivent se concentrer sur le cadre législatif. Si on entre dans les détails d’une entreprise, on s’égare.»

Tribune de Genève

 



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