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Pour cette première semaine de l’été, votre Quotidien des Montres vous propose une promenade sur différentes routes de la planète horlogère. Sentiers de la gloire ou chemins de traverse : les voies du Seigneur sont impénétrables dès qu'on parle de montres...
••• HANDCRAFTED TIME
Petite visite amicale à la Time Gallery de Berne, où quelques « artistes horlogers » exposaient ce week-end leurs dernières créations. Comme les allées et venues des exposants n’avaient pas manqué ces dernières semaines (Business Montres du 17 juin), on ne savait pas trop qui allait être sur place. Finalement, ils étaient douze, avec des « néo-classiques » comme Louis Moinet, Hautlence, Cabestan ou Romain Gauthier, des piliers de l’horlogerie indépendante comme Svend Andersen (vitrine seule) et des créateurs plus rares, comme Thomas Prescher, Bernard Lederer (BLU), Pita Barcelona, Miki Eleta et ses fantastiques horlogers ou encore Wolfgand Matthes, avec ses pendules à tourbillon. Sans oublier, bien sûr, la puissance invitante : Martin Pauli (Angular Momentum). Même le « pape » s’était déplacé pour la soirée inaugurale, puisqu’on a vu, jeudi soir, Philippe Dufour accorder son onction pontificale à cet événement.
••• UNE BONNE INITIATIVE DONC, à encourager et à multiplier, même si on touche ici aux limites du modèle : quand la « masse critique » des marques représentées est trop faible, l’impact de la communication est dilué, et c’est dommage pour les amateurs locaux ou plus éloignés...
• Un passage – en allemand – à la télé sur Telebielingue.ch (télé locale de Berne, Suisse). Le passage sur les montres commence à peu près à la moitié du journal télévisé : apparition de Thomas Prescher, Romain Gauthier, Bernard Lederer et visite de la Time Gallery (merci à Ian Skellern pour l’information, parue sur Horomundi).
••• ON AIR
Les maniaques du minimalisme horloger auront du mal à trouver plus sobre : non seulement la montre On Air, conçue par le designer Iskender Asanaliev n’a pas d’aiguilles, mais elle n’a pas non plus de mouvement apparent, ni même de fond, la boîte étant on ne peut plus fluide et sans heurt pour le regard. Sur l’image ci-dessus, la « tête » de la montre est constituée d’un verre saphir transparent. On aperçoit derrière la boucle. L’heure est indiquée, selon le code classique, par la position des LED rouges, qui dessinent un chiffre indiquant les minutes : il est ici 02:35 ou 14:35. L’indication de l’heure est déclenchée à la demande par un poussoir, la montre étant muette.
••• UN EXCELLENT TRAVAIL DE DESIGN ET D’ANALYSE FONCTIONNELLE, qui prouve qu’on est très loin d’être au bout du chemin pour ce qui concerne la forme et le fond de l’expression horlogère...
••• ZENITH
L’ère post-Nataf a vraiment commencé : le site de la marque a été spectaculairement épuré des innombrables photos de Thierry Nataf qui n’étaient pas absolument indispensables à la compréhension de l’événement relaté, même quatre ans en arrière ! « Du passé, faisons table rase », comme dans L’Internationale ! Signe des temps : pas une image officielle de Jean-Frédéric Dufour, histoire de souligner la rupture avec le précédent « culte de la personnalité » que le nouveau CEO dénonce à demi-mots à travers ses multiples « interviews exclusives ». Les contenus du press-clipping habituel [revue en images des articles de presse consacré à la marque] ne sont plus accessibles. Parce qu’on y trouvait trop de références au passé immédiat ?
Autre impressionnante épuration : celle des mannequins – hommes et femmes – qui étaient attachés aux différentes montres de la collection et à leur univers. Fini le temps des « ambiances urbaines » qui symbolisaient les différentes lignes, les yachts filant sur des eaux turquoise et les jeunes premiers en tenue de pilote fashionable entourés de naïades énamourées. A peine, ici et là, une fugitive allusion à Venise ou à New York. Même le catalogue interactif – qui reste le dernier refuge du natafisme zénithien – semble avoir été épuré de son glam-chic...
••• TOUTE SUCCESSION INDUIT UNE MUTATION : quoi de plus légitime que de vouloir tourner une page pour écrire un nouveau chapitre ? Dans le cas de Zenith, on semble cependant évoluer vers une révolution copernicienne, avec le passage d’une représentation géocentrique du monde [disons une représentation... CEOcentrée] à une représentation héliocentrique, dont il reste maintenant à définir le « soleil »...
••• BOLLYWOOD
Loin des yeux, près des Indes, ça commence à bagarrer très fort dans la lutte pour les « pipoles » indiens ! Cadre stratégique : la confrontation de plus en plus claire entre TAG Heuer et Longines sur les marchés émergents. Objet récent du conflit : le passage de Shah Rukh Khan – célébrité locale, qui pourrait être le Alain Delon indien – du camp Omega, dont il était l’ambassadeur, au camp TAG Heuer. Récemment, à Dehli, Jean-Christophe Babin présentait sa nouvelle icône et Priyanka Chopra, ex-Miss Monde India, sa nouvelle « égérie » locale. Longines n’a pas tardé à répliquer avec Aishwarya Rai Bachchan, son élégante ambassadrice, venue cette année « illuminer de sa radieuse présence » [c’est comme ça qu’on parle dans les communiqués de presse] les courses du Royal Ascot. Tissot a par sa part dégainé Deepika Padukone, alors qu’Omega remettait le couvert avec Abhishek Bachchan. On pourrait encore allonger la liste...
••• LA CONFUSION EST À SON COMBLE QUAND ON DÉCOUVRE, dans une même superproduction bollywoodienne, plusieurs comédiens associés à différentes marques de montres. Pas facile pour la promo et la gestion des projections privées...
• Une certitude : ces temps-ci, il faut suivre de près le dossier Bollywood, parce qu’il risque de s’y passer beaucoup de choses intéressantes...
••• ARGUS DES MONTRES
Tous les amateurs rêvent depuis des années d’un « argus de la montre » qui serait capable de leur donner des cotations réalistes pour les modèles qu’ils possèdent ou qu’ils convoitent. C’est dire à quel point la proposition de Argusdesmontres.com tombe bien sur un marché où les estimations des marchands et des commissaires priseurs restent très fantaisistes. Grâce au moteur de recherches multi-critères (forme, prix, matériaux, etc.), on obtient rapidement des cotations réalistes.
••• DOMMAGE QUE CE SITE SOIT AUJOURD’HUI PLUS CONÇU comme un portail horloger classique – il en existe des dizaines – que comme un outil professionnel d’expertises horlogères pour les amateurs, les collectionneurs et les passionnés, qui s'étonneront tout de même de la grande proximité affichée avec des professionnels de ce marché, directement intéressés à l'évolution des cotations (Artcurial et Tajan).
••• TÉLÉSCOPAGE
Question inédite dans l’univers horloger : qu’est-ce qu’on fait quand le manufacturier de service se « plante » ? Qu’est-ce qu’on raconte quand le fabricant de boîtiers – ceux qu’on achète sur étagère – donne à peu près le même produit à deux marques ? On peut imaginer un designer distrait, qui mélange les projets, ou un intermédiaire un peu distrait dans ses relations avec les usines chinoises, ou encore une fantastique coïncidence convergente... En attendant, la dernière limited edition de Christian Audigier (Californie, Swiss Made comme il se doit) et la nouvelle Planet Beatrix de Jovial (Bienne, tout aussi rigoureusement Swiss Made) débarquent dans les vitrines avec sensiblement la même boîte, à quelques détails en diamants près...
••• ENCORE UN COUP DU POMPEUR INCONNU !
••• ZAPPING •••
Quelques petits riens sur un peu de tout ce qui concerne les montres…
• TAG HEUER : c’est au cours de son passage à New Dehli – voir ci-dessus – que Jean-Christophe Babin a risqué un pronostic qui restera dans les annales. Le site local Kyunki Saas Bhi Kabhi Bahu Thi rapporte cette nouvelle passion pour la Bollywood connection : « Dans les trois ans à venir, vient d'expliquer le CEO de la marque, TAG Heuer sera la marque de luxe la plus connue ». En Inde ou dans le monde ? Dans les deux cas, ça rappelle une prédiction antérieure de Christian Viros, du temps où il était CEO de TAG Heuer (avant le rachat par LVMH) : « Au XXIe siècle, TAG Heuer aura détrôné Rolex pour la place de n° 1 sur le marché des montres de luxe ». A quoi Rolex avait poliment demandé : « Au début ou à la fin du XXIe siècle ? »...
• PIERRE DEROCHE : première réapparition sur scène de la montre Pierre DeRoche Grand Cliff TNT Royal Retro, montre à six secondes rétrogrades déjà remarquée à Baselworld par Business Montres (29 mars). Le modèle est beaucoup plus abouti et nettement plus lisible. Pour savoir comment fonctionne une montre dotée de six aiguilles rétrogrades des secondes : une excellente vidéo explicative. Une superbe idée d’animation de cadran, dans la catégorie des mini-complication/maxi-démonstration...
• RICHARD MILLE : c’est peut-être la crise, mais la marque accélère, avec une ouverture de point de vente (Boutique dos Relogios Plus) au Portugal et d’un nouveau partenariat en Suède (Nymans Ur).
• EP MARTIN : cette jeune marque américaine (Portland, Oregon) est dédiée aux aventuriers. Une collection a été développée pour les marcheurs d’une expédition de traversée du Sahara d’Ouest en Est : baptisées Torch (en hommage à l’opération Torch pendant la Seconde Guerre mondiale), ces montres Sahara proposent des mouvements suisses et des détails esthétiques bien pensés pour les baroudeurs (double couronne, larges poussoirs, boîtier robuste en 44 mm, étanchéité à 200 m). Une bonne affaire à 900 dollars...
• POIRAY : une boutique en ligne, officielle, mais capable de proposer des discomptes de 50 à 70 % sur des montres Ma Baguette neuves de la marque (modèle sorti des collections, mais tout de même bien mignon). Courageux. Mais réaliste...
• ROLEX : les éditions italiennes Pucci Papaleo annoncent un « livre définitif » sur les Rolex Daytona, Ultimate Rolex Daytona : 130 variantes de Daytona présentées dans un grand volume à l’italienne (45 x 35 cm), qui ne pesera pas moins de 12 kg et qui sera proposé en italien et en anglais, mais pas en français. Le prix devrait dépasser les 1 200-1 400 euros. Textes de notre copain Paolo Gobbi (le directeur de Revolution Italia), qui avait déjà publié, chez le même éditeur, I Cronografi Rolex–La Leggenda...
• DE WITT : intéressant entretien de Brice Lechevalier avec Nathalie Veysset, dans GMT Lady (été 2009). La directrice de la manufacture DeWitt dresse un parallèle original entre le milieu bancaire, dont elle vient, et le milieu horloger, deux mondes qui partagent – théoriquement – le même souci du client final et – probablement – des fascinations réciproques. Les questions qu’elle se pose sur les défis de la crise ne manquent pas de pertinence : « Est-on ainsi sûr qu’un mouvement manufacture [elel confirme la verticalisation en cours] constitue une plus-value aux yeux du client, lorsqu’il existe déjà un mouvement sur le marché qui a fait ses preuves? Quel sens donner à notre démarche, et à la demande du client en matière de perfectionnement mécanique ? La création de nos propres cadrans a permis de répondre en partie à ces questions car les innovations et les finitions incroyables apportées par DeWitt ont conquis les clients. Il faudra réaliser les mêmes prouesses pour les boîtiers, et leurs contenus, en leur donnant du nouveau ». Manifestement, Nathalie Veysset apprend vite !
• HORLOGE MODULABLE : dans la série des nouveaux objets du temps, une horloge murale dont on choisit la taille. La Wanduhr de Radius Design (Brühl, Allemagne) n’a qu’un élément fixe : la taille des aiguilles (40 et 46 cm). Le reste est au choix : on peut choisir de poser tout ou partie des douze index n’importe où sur le mur et déterminer ainsi la place que prendre l’horloge dans son intérieur.
• BONS PLANS (1) : les petites marques se battent bien et tirent leur épingle de la crise. Alpina annonce ainsi un nouvel ambassadeur : Ben Southall, qui vient de décrocher le contrat du « meilleur job du monde », puisqu’il travaillera pendant six mois comme « gardien » d’une île paradisiaque de la grande barrière de corail. Pour ce « job », il lui fallait au moins une montre : ce sera une Extreme Diver 1000 m d’Alpina...
• BONS PLANS (2) : de son côté, Graham vient de signer un contrat de partenariat avec l’écurie Brawn GP, actuellement en tête du championnat du monde de F1. Il y avait du monde en compétition, mais c’est le côté british – au moins apparent – de Graham qui l’a emporté. Le plus difficile sera sans doute de convaincre Jenson Button, le pilote champion de l’écurie, de porter autre chose que ses habituelles Hublot, Jaeger-LeCoultre, Audemars Piguet, etc...
• MOUVEMENTS : Arnaud Vidal, directeur commercial de Bell & Ross, prend la direction d’Audemars Piguet France. Sacré défi, mais mission passionnante...
• MAUBOUSSIN (PATRICK) : ceux qui se souviennent de lui aimeront savoir que l’ex-joaillier se lance dans le design des avions d’affaires. Il vient de créer le PMAD : Patrick Mauboussin Aircraft Design, en partenariat avec Sparfell Aviation Technologies, holding de la compagnie aérienne Masterjet. Concept : « Flying is an art », ce qui s’entend pour les aménagements intérieurs en équipements de dernière génération (de la douche aux techniques de bien-être) aussi bien qu’au design extérieur. On se souviendra que les amours de la famille Mauboussin et de l’aviation sont anciennes, puisqu’on leur doit des avions comme le légendaire M120-Corsaire ou le Fouga Magister...
• AIGUILLE DES SECONDES : un série intéressante à suivre sur ThePurists à propos des différentes formes que peuvent prendre l’aiguille des secondes. C’est la plus animée sur les cadrans, mais fait-elle vraiment l’objet de la plus grande attention ?
• ROLEX (bis) : le président français Nicolas Sarkozy ne porte décidément pas chance à la marque à la couronne. Après avoir symbolisé au-delà du raisonnable les dérives bling-bling du premier tiers de son mandat, voici que la Rolex symbolise à présent un passé à oublier d’urgence. L’Express (France) raconte la « métamorphose du président » et sa « révolution culturelle », dont sa collection de Rolex semble exclue, tandis que le Guardian britannique répète que le président français n’ose plus ni les Rolex, ni les Ray-Ban, ni les hamburgers...
• CLONED IN CHINA : pas encore de montres sur le site Cloned in China, qui recense – comme son nom l’indique – tous les produits asiatiques sur lesquels se fondent les nouveaux rapports Est-Ouest. L’absence de montres est inquiétante : trop de clones ou pas assez d’originaux ?
• MONTBLANC : c’est fait, les différents sites Montblanc ont intégré la référence au stylo-hommage à Max von Oppenheim, cet « Indiana Jones du IIIe Reich » révélé par Business Montres ! Référence qui était mystérieusement absente des sites français, allemand, espagnol, italien, chinois et russe de la marque (Business Montres du 8 juin). C’est plus franc quand on assume...
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