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Toujours opérationnel en dépit des tentations d'un été pas (encore) trop meurtrier, votre Quotidien des Montres a promené sa lunette de visée sur différents théâtres d’opérations, en Suisse et à travers le monde. Officiellement, il ne passe rien et les officiels s'auto-congratulent en attendant un mieux imminent.
En réalité, la banquise se fracture et les craquements sont sinistres pour annoncer la débâcle...

... Cette semaine, le sniper a...

••• PASSÉ
une matinée formidable dans une sorte de paradis terrestre : l’assemblée générale de Fédération horlogère suisse. On n’imagine pas à quel point tout n’y est que luxe, calme et volupté. Tempes grises bien coiffées, costumes bien propres, discours bien soignés et optimisme bien formaté : même la conseillère fédérale à l’Economie, Doris Leuthard est repartie avec son cadeau bien emballé, après un discours qui démontrait que, après tout, l’industrie horlogère en avait vu d’autres [on dit pas crise, on dit « turbulences » et « repli économique »], et que, de toute façon, elle allait s’en tirer un jour ou l’autre puisque les autorités de Berne s’occupaient de tout...
Pour le reste, tout va mieux que bien. Donc, on reconduit le président Pasche à main levée et on va se consacrer aux choses sérieuses, comme la veille législative, la contrefaçon, les expositions en Amérique du Sud et les accords commerciaux avec qui possède un bon stylo pour les signer. Peut-être même qu’on prépare déjà les accords bilatéraux avec les futurs colons de la planète Mars...
Et les sujets qui fâchent ? On allait quand même pas gâcher la belle matinée de gens aussi sérieux en parlant de la révision du Swiss Made, ni les deux à trois années de surstocks dans les tuyaux, ni des trésoreries à sec, ni surtout des milliers de postes supprimés dans l’industrie, par le marques et chez les fournisseurs, sans même évoquer les milliers d’autres qui le seront dès la rentrée.
Pas un mot sur les humains qui souffrent, mais les félicitations du jury pour les bons chiffres : « L’année 2008 a débouché sur un résultat particulièrement élevé, avec une croissance de 6,7 % en valeur qui a amené les exportations suisses à atteindre la barre des 17 millions de francs ». Conclusion pour le 530 entreprises membres de la FH : « L’horlogerie suisse reste saine et ne s’affaiblit pas face aux industries horlogères concurrentes ».
••• CETTE APOTHÉOSE SURRÉALISTE méritait le détour : manifestement, on prend toujours très au sérieux les statistiques horlogères, qui ont cependant prouvé leur inanité. Même Doris Leuthard s’est risquée à demander « des indicateurs nationaux et internationaux plus fiables ». C’est dire ! On persiste à regarder le compteur sur le tableau de bord sans voir à travers le pare-brise qu’on est déjà sortis de la route...

••• NOTÉ, pendant cette AG, une question perspicace de Jean-Christophe Babin (TAG Heuer) sur les aides fédérales qui permettraient aux fournisseurs de s’en sortir. Comme il aurait dû s’y attendre, il s’est fait renvoyer dans ses buts : on n’allait quand même pas raccourcir l’apéritif pour une vague histoire de canards boîteux industriels. Ce n’est quand même pas à l’Etat suisse – qui a pourtant sauvé UBS de la faillite – de se substituer aux banques pour ce genre d’opérations de basse finance...
••• C’EST À CET INSTANT QUE LE SNIPER A REÇU UN SMS D’EXPLICATIONS : un malicieux correspondant écrivait que Cortech, la filiale de TAG Heuer spécialisée dans les boîtiers, venait de licencier 40 de ses 127 collaborateurs (45 intérimaires avaient déjà été remerciés ces dernières semaines), les 87 toujours en place étant soumis à un régime de chômage partiel... La question du CEO de TAG Heuer n’était donc qu’un plaidoyer pro domo. Dommage ! Après tout, si Cortech a perdu la moitié de ses commandes, c’est bien parce que TAG Heuer a dû perdre la moitié de ses ventes et donc réduit de moitié sa production...

••• ENREGISTRÉ
au même moment une autre mauvaise nouvelle : le chômage partiel chez Vaucher Manufacture Fleurier. L’Himalaya de la pensée horlogère qui préside le groupe nous annonçait pourtant des records inviolés pour 2009. Comme disait Fernand Raynaud, « Y’a comme un défaut » (à télécharger d’urgence pour une bonne rigolade, en hommage au génie visionnaire de notre Himalaya préféré)...

••• ENTENDU,
une seconde question intelligente à cette assemblée de la FH, celle de Jean-Daniel Maye (Time Avenue : Nina Ricci et Marvin), qui demandait poliment si l’Etat confédéral ne pourrait pas rembourser plus rapidement la TVA (actuellement, cinq mois) pour faciliter la trésorerie des entreprises horlogères. Doris Leuthard l’a tout aussi sèchement renvoyé dans ses comptes, en lui annonçant qu’un effort serait peut-être fait... en janvier. Les murmures désapprobateurs de la salle ont noyé la réponse de Jean-Daniel Maye : « En janvier, nous ne serons peut-être plus là pour en profiter »...

••• TROUVÉ
une explication partielle à l’embellie des exportations horlogères au Maroc (Business Montres du 24 juin) : Sa Majesté Mohamed VI a repris les bonnes habitudes de collectionneur de son père. Le souverain chérifien vient de s’offrir un Greubel Forsey qui a dû peser sur les statistiques de la FH...

••• TRÉPIGNÉ
d’impatience en attendant le classement – ou non ! – de La Chaux-de-Fonds et du Locle au Patrimoine mondial de l’Unesco (prévu pour aujourd'hui) ! Avec une interrogation évidente, compte tenu de l’ambiance politique locale, aggravée par la crise : et si ce classement ne changeait rien à l’extrême indifférence avec laquelle les autorités de la vallée semblent traiter leurs marques et leur patrimoine horloger [voir la récente affaire des Metropolis Days, racontée le 25 juin par Business Montres] ?

••• SURFÉ
sur quelques forums suisses et français pour y relever une indignation unanime et sans appel contre la lecture collective de la liste des « condamnés à mort » (licenciés) telle qu'elle a été pratiquée chez Zenith. L'affaire a été évoquée à la radio suisse, mais – curieusement – les médias qui relaient habituellement la communication de la marque se sont abstenus...

••• AJOUTÉ
une marque (française) à la liste des maisons horlogères défaillantes : Vuillemin-Régnier, une référence de l’histoire horlogère tricolore, n’a pas réussi son pari de relance sous le nom de Régnier Paris. La marque est en redressement judiciaire et elle liquide ses jours-ci son stock dans ses entrepôts de Charquemont.
••• ICI : MESSAGE DE COMPASSION ET DE SOLIDARITÉ DU SNIPER à une équipe qui disparaît...

••• DÉNICHÉ
un concept intéressant de montre-bracelet (façon manchette) en fibre de carbone. La proposition émane du designer John Pszeniczny, qui adore les idées horlogères futuristes. Cette F1/Carbon GMT, qui reste à réaliser, est une sorte de « pneu » en fibre de carbone qu’on passe au poignet. Il pourrait exister aussi en cristal Swarovski, en métal ou en caoutchouc. On presse un bouton pour avoir l’heure, qui s’illumine en LED rouges. Idée amusante : le référent F1-GMT indique que cette montre peut donner l’heure des 18 circuits de F1 à travers le monde, en plus d’une fonction chronographe et compteur de tours...

••• REMARQUÉ
que la TAG Heuer V4 était une des très rares montres réellement « conceptuelles » de la prochaine vente Only Watch, qui n’en comptera guère que trois autres (sur 34 lots horlogers). Il s’agit de la première montre « entraînée par des courroies » de l’histoire horlogère : celle d’Only Watch (ci-dessus) portera le n° 1 d’une série limitée dont les pièces « courantes » seront facturées dans les 90 000 euros. C’est exactement le genre de montre qu’on attendait à Only Watch, qu Osvaldo Patrizzi définissait récemment pour nous comme un « championnat du monde des prototypes horlogers ». Sans entrer dans la guerre des courroies [beaucoup de persifleurs horlogers répètent encore que ce mouvement « ne marchera jamais » !], il faut admettre qu’on est ici face à une des pièces les plus étonnantes de la décennie zéro-zéro, tant par la conception de son mouvement que par l’esthétique de son cadran et de son boîtier : une montre nouvelle génération, par une marque qui fêtera l’année prochaine ses cinq ou six générations (150 ans) !
••• DOUBLE BÉNÉFICE D’IMAGE POUR TAG HEUER, qui présente également ces jours-ci, avec un excellent film promotionnel (Steve McQueen et Lewis Hamilton en compétition par la magie des images numériques : qui va gagner ?), sa nouvelle montre Monaco Calibre 12. En revanche, le la nouvelle campagne et le nouveau clip publicitaire, The Knights of Time sont beaucoup moins convaincant à force de mettre les poings sur les i...

••• VISIONNÉ
un clip vidéo qui démontre qu’il ne faut jamais « croire bêtement ce que tout le monde dit ». C’est la promotion du site Hoaxbuster, spécialisé sur la traque des canulars numériques et des nouvelles légendes urbaines. Images dédiées à tous ceux qui croient à la langue de bois officielle des uns et des autres...

••• MÉDITÉ
sur un exemple amusant et viral de détournement dans le détournement. L’affaire est racontée par Hoaxbuster (voir ci-dessus) : il s’agit d’une vidéo présentée comme une « chose vue », qui n’est en fait que le making of tronqué d’une publicité automobile. On a ainsi, mis en abyme, le film dans le film du film. Un excellente exemple de « viralité » contemporaine, dont les marques horlogères devraient s’inspirer pour doper leur communication...

••• APPRÉCIÉ
un reportage d’« amateur » – encore que pas si amateur que ça... – diffusé sur Internet après une visite à la manufacture H. Moser & Cie de Schaffhouse. Quels magazines spécialisés auraient fait aussi bien que ce Guy 67, dont le pseudonyme cache un passionné de montres alsacien ? C’est très complet, intelligent et totalement original, parce sans images « officielles » préfabriquées : le contenu y gagne en authenticité et en crédibilité. Si les forums Internet en sont là, la presse horlogère a du souci à se faire...
••• POUR AVOIR VISITÉ EN PARALLÈLE CETTE MANUFACTURE, le sniper peut personnellement témoigner de la qualité de ce reportage (article à paraître ces jours ci dans Business Montres, avec un angle plus orienté vers les spiraux que de plus en plus de marques vont chercher à Schaffhouse).

••• ASSISTÉ
à la ruée (modérée) des Français vers les soldes, y compris dans les boutiques de montres. C’est la crise, sans doute, mais les consommateurs démontrent trois choses. 1) Leur maturité : ils savent attendre et ils anticipent parfaitement les « bonnes affaires ». 2) Leur passion intacte pour le shopping à un prix « réaliste » : l’amour des montres est toujours très fort, mais pas aux prix exigés par les marques. 3) Leur bonne information : avec Internet et les réseaux sociaux, les amateurs de montres sont informés, en temps réel, boutique par boutique, des meilleures affaires du moment ! Conclusion : le vrai prix de marché, c’est le prix que les consommateurs acceptent de payer.
••• ON DEVRAIT SE POSER DES QUESTIONS sur les politiques actuelles de pricing : Baselworld 2010 sera low cost ou ne sera pas !

••• CONFIRMÉ,
grâce à un communiqué de presse daté d’hier, les informations parues dans Business Montres le 19 juin à propos de Jean-Claude Biver et de son nouveau jouet à deux roues. Comme annoncé par Business Montres, « Bibi King » enfourchera son nouveau All Black Bike en carbone – le « Bibi Bike » selon les initiés – pour un prologue au prologue du Tour de France, à l’occasion du World Stars Cycling Criterium de Monaco. A ses côtés, une « fusion » de champions come Eddy Merckx, Tony Rominger, Richard Virenque, Laurent Jalabert ou encore Pedro Delgado, tous engagés pour la course de bienfaisance organisée par Star Team for the Children, sous le haut patronage de S.A.S. le prince Albert II de Monaco.
••• FESTINA N'A PLUS QU'À BIEN SE TENIR ! Miguel Rodriguez devrait bien regarder dans le rétroviseur de sa caravane...