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Quelles musiques horlogères risque-t-on de jouer après les mirobolantes fanfares de la Bulle Epoq...
 
Le 30-06-2009
de Business Montres & Joaillerie

FACE À LA CRISE (suite et fin) :
Suite et fin de la chronique exploratoire du Quotidien des Montres sur la prochaine et inévitable« révolution des mentalités »,son éthique, ses vertus et ses nouvelles exigences.

Quelles sont les dernières formules qui peuvent mettre en équation l’avenir immédiat du marché de la montre et de ses acteurs ?

Quelles seront les paroles et le tempo de ces musiques d'avenir ?

• « QUE CENT FLEURS S’ÉPANOUISSENT, QUE CENT ÉCOLES RIVALISENT » : repris de l’époque des Royaumes combattants, dont le chaos politique a favorisé une explosion culturelle étonnante, le mot d’ordre de Mao Zedong appelait, en 1957, à redonner la parole à la base pour critiquer les structures vermoulues. Nous y sommes !

Une montre, c’est de la culture façonnée en rouages. C’est de l’intelligence coulée dans un boîtier. C’est une tradition érigée en performance technique. Cette culture, cette intelligence, cette tradition sont multiples et elles ont connu comme elles connaîtront des expressions multiformes. Il faut veiller à ne pas enfermer cette polymorphie dans des canons trop contraignants, au nom du principe de précaution – « Ne prenons aucun risque créatif en temps de crise » – comme au nom d’un fantasmatique « retour au classique ».

Au contraire, l’industrie doit aujourd’hui miser sur ses jeunes pousses, en se félicitant que la démographie horlogère connaisse un telle explosion : + 30 % de marques référencées au cours de ces cinq dernières années, soit plus de naissances qu’au cours des cinquante années précédentes. Cette vitalité biologique est plus porteuse d’avenir que la survie à n’importe quel prix de références usées par plusieurs décennies d’erreurs et d’errements consécutifs.

Le temps des « grandes marques » généralistes à vocation universelle est sans doute : le mythe fonctionne encore sur les marchés émergents, mais il se délite de façon irréversible dans les marchés évolués, où les individualités – les personnes humaines – triomphent des masses et se rassemblent en « tribus » affinitaires aux contours toujours plus flous et schizoïdes.

Au lieu de concentrer leurs tirs sur ces jeunes marques indépendantes, en cherchant à tout prix à les éliminer du marché (c’est-à-dire des vitrines des détaillants, des pages des magazines, voire du bilan des fournisseurs), les « grands groupes » devraient au contraire les intégrer pour bénéficier de leur dynamique et songer à fragmenter leurs propres grandes marques, victimes de leur impuissance surplombante, en autant de hot shops ultra-créatives à forte valeur ajoutée entrepreneuriale. Un simple calcul arithmétique permet de comprendre que la plupart de ces marques indépendantes – jeunes ou moins jeunes, rupturistes ou classicistes – proposent un meilleur ration profit/employé et profit/montre que bien des « vaches sacrées » de l’industrie...


• « ON NE SE RESPECTE VRAIMENT QU’EN RESPECTANT LES AUTRES » : un des facteurs aggravants de cette crise aura été l’absence – volontaire ou, pire, involontaire – de respect entre partenaires de travail au sein d’une même communauté professionnelle. Sauf chez les « anciens », qui avaient déjà vécu plusieurs crises, et au sein d’une nouvelle génération spontanément plus participative, les réflexes d’égoïsme ont attisé le feu au lieu de le circonscrire : le « chacun mon tour », le « moi d’abord » et le « sauve mon cul » carriériste ont primé sur le plus naturel des respects de l’autre – qu’il soit détaillant, fournisseur ou employé. La crise a fait tomber des masques chez des partenaires qui se sont révélés tout sauf loyaux. Ce qui laissera des traces.

Là encore, il faudra réapprendre à se parler, à partager des objectifs communs, à préférer la négociation à la confrontation et le rapport de synthèse au rapport de force. Quand le dialogue est confiant, le futur s’écrit plus aisément, même et surtout dans les moments difficiles. L’annulation sans préavis de multiples commandes, les licenciements par SMS [avec ou sans lecture collective de la liste fatale], l’imposition de délais de paiement suicidaires pour des factures déjà passées entre les mains des Jivaros du cost killing, le silence téléphonique et l’autisme médiatique auront été une des pires parenthèses de l’histoire horlogère : même pendant les années cruelles du quartz, ces comportements étaient restés ultra-minoritaires. On savait alors couler pavillon haut et rester digne dans l’adversité...

Respect des autres et de soi, c’est-à-dire respect de son identité, de sa propre histoire et de sa légitimité : faut-il vraiment courir derrière la dernière tendance, faire absolument du noir/rose quand tout le monde s’y vautre et tartiner le moindre poussoir de fibres de carbone quand on possède de si beaux guillochages dans son musée ? Les somptueux poumons des belles ambassadrices ne sont-elles que le plat de lentilles qui paie ces trahisons ? S’il vous plaît, un peu de respect pour de vénérables maisons qui n’ont pas traversé les décennies pour en arriver à faire le tapin sur les tapis rouges !

Respect de soi et des autres, c’est-à-dire respect de ce qu’on leur raconte et des histoires qu’on leur sert : un léger pipeau d’accompagnement ne nuit en rien à l’harmonie de la composition, mais une sirène hurlant n’importe quoi assourdit et épouvante au lieu de séduire. Faut-il vraiment emboîter n’importe quoi sous l’appellation non contrôlée de « manufacture » ? Devrons-nous encore longtemps supporter ces containers « Made in China » qu’un trempage hâtif dans les eaux du Jourdain helvétique rebaptise miraculeusement « Swiss Made » ? Et ces articles de presse plus hagiographiques que moi, tu meurs : même les anciens rédacteurs de la Pravda n’auraient pas osé une telle impudence du temps de Staline ?

Respect du métier, de ses hommes, de ses marques et de cette passion pour les garde-temps mécaniques qui a miraculeusement germé entre Alpes, lacs et Jura, voici quelques siècles : c’est peut-être là cette huile absolue et parfaite qu’Abraham-Louis Breguet réclamait pour faire des montres parfaites...

••• EN AVANT POUR UNE RÉVOLUTION DES MENTALITÉS
Dans un récent discours au château de Versailles, le président français Nicolas Sarkozy appelait à cette « révolution culturelle », seule attitude à ses yeux capable de faire face à une des pires crises de notre civilisation. C’est à cette révolution des mentalités que l’horlogerie est désormais confrontée. Question pour elle de vie ou de mort : après, rien ne sera plus jamais comme avant. Ni les marques, ni les montres, ni les amateurs, ni les prix, ni les valeurs qui sous-tendent la passion des beaux objets du temps.

C’est aujourd’hui qu’on prépare cet après. C’est à présent qu’on doit débattre de ces lendemains qui chanteront pour ceux qui auront pris les bonnes options...

 



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