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Six braquages de bijouterie en un peu plus de six mois, le canton de Vaud paie un lourd tribut aux vols à main armée. Deux cas se sont produits très récemment. Mercredi, un magasin d’Yverdon a été la cible de malfrats. La veille, à Montreux, trois hommes armés et déterminés ont fait main basse sur des montres de luxe en projetant au sol le patron et ses employées. Alors loi des séries ou commerces trop faciles à dévaliser dans la région? «Les délinquants choisissent leur cible en fonction de son degré de sécurité, réagit Jean-Christophe Sauterel. Avant, les malfaiteurs s’en prenaient aux banques. Lorsque celles-ci ont augmenté leur degré de sécurité, les offices de poste ont été visés. Puis ils ont réagi de la même manière. Les bijouteries sont alors devenues des cibles privilégiées.» Le porte-parole de la police cantonale écarte d’un revers de la main l’hypothèse d’un facteur régional expliquant cette vague de délits. «Je me garderai bien de faire de grandes théories. Les délinquants ne connaissent pas de frontières. Ils sont très mobiles. La chose qui est sûre, c’est que les braqueurs prennent de très gros risques et qu’ils sont armés, déterminés et dangereux.»
Pas de braquage à Genève
Comment expliquer alors que, pendant que six braquages avaient lieu dans le canton de Vaud, aucun n’était perpétré à Genève? Personne n’avance de réponses définitives. Mais deux éléments peuvent entrer en ligne de compte. «Dans une majorité des bijouteries du centre-ville, il y a des agents de sécurité armés, explique Patrick Puhl, porte-parole de la police genevoise. Cela peut dissuader les braqueurs.» Les problèmes de circulation dans la Cité de Calvin ont peut-être aussi un, et un seul, avantage. «Avec les embouteillages, il est très difficile de s’enfuir facilement en voiture.» Si des vigiles avec un flingue sont si efficaces, pourquoi les bijoutiers vaudois ne s’y mettent pas aussi? «Cela représente un coût élevé pour les petites bijouteries, souligne Julien Meylan, bijoutier à Vevey. Nombreuses sont celles qui ne peuvent pas se le permettre.» Victime d’un braquage en décembre, le bijoutier n’est pas persuadé qu’un agent armé soit la panacée. «Une fois qu’il a un pistolet sur la tempe, que voulez-vous qu’il fasse?» demande le Vaudois. Depuis sa mésaventure, Julien Meylan est plus prudent et il verrouille la porte de son commerce. Inquiet face aux événements actuels, il craint que certains confrères ne ferment boutique ou ne soient plus assurés en raison des exigences et du coût des assurances.
Du côté de Securitas, on indique qu’il n’y a pas eu une hausse des demandes de services armés. «Cela avait été le cas après une vague de braquages sur la Riviera il y a une dizaine d’années, rappelle Bernard Mégevand, responsable du service de conseil en sécurité de l’entreprise pour la Suisse romande. Nous ne l’avons pas constaté cette fois.»
Bijouteries moins attractives
Pour le spécialiste, plusieurs solutions existent pour rendre les bijouteries moins attractives aux yeux des voleurs. «En sécurisant le personnel grâce à un guichet blindé comme dans les banques ou en ouvrant le commerce accompagné d’un agent de sécurité par exemple. Il y a aussi des nouveaux systèmes comme des rideaux de fer qui s’abattent devant les malfrats en cas d’agression ou des systèmes qui envoient une fumée tellement dense qu’on n’y voit plus rien.» Julien Meylan, lui, ne voit qu’une solution: renforcer la répression. «Les braqueurs savent qu’ils ne risquent pas grand-chose en Suisse. Les peines de prison sont trop légères et les conditions de détention confortables.»
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