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La marque Wyler Genève, propriété du groupe Binda (Italie), licencie tout son personnel et se met en état d’hibernation, sans toutefois cesser ses activités.
Suite (mais sans doute pas fin) de l’ « été meurtrier »...
••• WYLER GENÈVE
Relancée ces dernières années par le groupe Binda (Milan, Italie), la marque Wyler Genève jette provisoirement l’éponge pour mieux survivre à la crise : la totalité du personnel a été remerciée, à l’exception du nouveau CEO, Ryan St George (nommé une semaine avant Bâle : révélation Business Montres du 23 mars) et d’une personne pour l’assister.
Fin de partie un peu inattendue, pour une marque sincèrement Swiss Made, qui n’avait pas démérité, dans son pilotage stratégique, comme dans son marketing ou ses produits. Wyler avait ainsi été la première marque suisse à faire du carbon neutral non cosmétique, en produisant la première montre Swiss Made – et même la première montre au monde – entièrement carbon neutral. De même, la marque avait récemment inauguré le label « Poinçon du Jura » ou décroché le chronométrage officiel du rallye Dakar. Sans parler de la montre « officielle » – la vraie ! – de l’équipe nationale de football italienne, la fameuse Squadra Azzura quatre fois championne du monde...
Les produits étaient loin d’avoir manqué leur entrée sur le marché. Superbement dessinés, les nouveaux boîtiers Wyler avaient trouvé leur identité, tant dans le style que dans le recours aux nouveaux matériaux et à des mouvements exclusifs, avec des concepts comme la Code-R (lancée à Bâle : image ci-dessus) ou l’argument de la résistance anti-chocs (balancier Incaflex).
Ouverte dans une cinquantaine de pays, la distribution était loin d’être négligeable et les ambitions ne manquaient pas à Marcello Binda, qui avait engagé toutes les forces de son groupe familial dans ce combat pour la renaissance d’une marque de haute horlogerie créative. Les commandes passées à Bâle n’auront sans doute pas suffi à confirmer les espoirs du lancement : le marasme mondial du marché de la montre aura provisoirement eu raison de cette dynamique créative...
••• MODE SURVIE
Wyler Genève se place donc dans une sorte d’« hibernation » volontaire, histoire de survivre à l’« hiver horloger » qui s’annonce. Décision courageuse de son actionnaire, qui préserve ainsi les acquis et qui transforme le sympathique Ryan St George, fraîchement déraciné à Genève (il travaillait auparavant à la direction marketing du groupe Binda, à Milan), en super-VRP de luxe, chargé d’animer en roue libre un réseau international qui aura cependant du mal à se mobiliser pour écouler les stocks...
Que pourrait-on reprocher à Wyler ? D’avoir rêvé trop grand ? Sans doute, mais la Bulle Epoque s’y prêtait et c’était la moindre des choses pour une jeune marque. D’avoir fait confiance à son seul réseau de détaillants ? Sans doute, mais pourquoi se poser des questions quand le marché absorbe toujours plus de pièces et de marques chaque année ?
Plus sérieusement, Wyler Genève a souffert, dès le départ, d’un pricing exigeant sur un marché hyper-concurrencé : très attractives côté design et concept de marque, les montres l’étaient beaucoup moins du fait de leur prix – au moins 30 % à 40 % trop élevé en termes de mix coût/produit/image de marque. C’est le péché mignon de la nouvelle génération horlogère, mais c’est un piège terrible au moindre retournement de tendance : les détaillants font alors porter leurs efforts sur des marques plus « sûres » parce que plus faciles à vendre...
••• VOIR UNE NOUVELLE MARQUE PROMETTEUSE MORDRE LA POUSSIÈRE ne réjouira personne, et surtout pas ceux qui aiment les belles montres. Nos pensées vont à l’équipe, qui n’avait pas ménagé ses efforts et qui se voit dispersée en pleine crise. La tactique du « mode survie » est encore pionnière sur la scène horlogère : on espère qu’elle réussira à maintenir la marque à flots le temps qu’il faudra...
••• TOUR DU MONDE HORLOGER EN 80 JOURS : L’étape Wyler Genève n’était pas planifiée pour cette semaine, mais elle sera avancée à demain par solidarité avec la marque : rendez-vous donc mercredi pour les 10 textes d’actualité de Ryan St George, désormais seul aux commandes et seul maître à bord...
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