|
Après le double tourbillon sans aiguilles de Romain Jerome, pas facile de se distinguer !
Le créateur belge Martin Margiela, star de nouvelle couture européenne à travers le monde, invente maintenant un bijou fou : le boîtier de montre qui n’est pas une montre.
C’est-à-dire le bracelet sans montre !
Une piste de diversification pour les manufactures de boîtes en difficulté ?
••• MARTIN MARGIELA
La notoriété de Martin Margiela, formé à la célèbre Académie des Beaux-Arts d’Anvers, n’a pas encore atteint celle d’un Jean-Paul Gaultier ou d’un Karl Lagerfeld, mais c’est une question de génération et de patience. Entré dans le groupe Diesel, il y a trouvé les moyens de son développement et sa griffe a ouvert des boutiques dans toutes les capitales qui comptent. Bref, cet ancien styliste d’Hermès est une star de la couture internationale, même si sa notoriété horlogère reste modeste.
Ce n’est sans doute que partie remise puisqu’il vient d’inventer, pour sa ligne de bijoux et de joaillerie, des bracelets composés d’un boîtier de montre... sans la montre.
On prend le boîtier brut de manufacture, tout juste poli. Carrure et cornes, mais on laisse la lunette et la couronne : on n'est pas dans la récup, mais dans le détournement : nuance ! Pas besoin de signer : c'est vulgaire, et, de toute façon, tout le monde saura que du Martin Margiela. Et ça marche pour les garçons comme pour les filles.
On passe un lien dans les barrettes et le tour est joué : le poignet est équipé et la montre allégorique. Le temps devient transparent, les heures se font impalpables, le porteur prouve son originalité décalée et la marque Maison Martin Margiela (qui a développé cette idée avec Surface to Air : on reste dans la branchitude parisienne) recueille les applaudissements de la foule des trend setters. Pour info, Surface to Air est aussi l’équipe qui travaillé sur la montre Emprise de Louis Vuitton/Marc Jacobs...
Marginal ? Sans doute en termes de ventes, mais plus profond qu’on ne le soupçonne en termes d’imaginaire collectif relié à la montre et à ses traditions. L’explosion des codes horlogers libère la créativité autour de chaque composant : le jeu sur les formes, les rites et les fonctions horlogères n’a plus de règle. Va donc pour un boîtier nu et brut d'usine au poignet : suréquipées d'objets nomades électroniques, la nouvelle génération n'a pas besoin de montres qui donnent l'heure, mais de jouets et de citations...
L’allusion est aussi parfaite que l’illusion. Dialectique fine du dehors et du dedans, du plein et du vide, de l'idée et de la matière : finalement, c’est un philosophe contemporain, ce Martin Margiela !
••• NOS AMIS FABRICANTS DE BOÎTIERS TROUVERONT-ILS dans cette nouvelle approche philosophico-joaillière matière à réflexion sur d’éventuels débouchés ? Sans doute ! Ont-ils jamais réfléchi aux multiples post-usages qu’on pourrait faire leur production aujourd’hui pléthorique ? Martin Margiela leur ouvre une porte sur des univers insoupçonnés...
|