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Nombre de sociétés horlogères procèdent à des augmentations de leur capital-actions. Ces recapitalisations vont se multiplier. Une question de survie parfois.
Rarement la gestion du bilan d’une entreprise, particulièrement horlogère, aura été un exercice de de si haute voltige qu’en cette période récessive. Outre la gestion des liquidités, souvent compliquée en raison de la défection des détaillants, ce sont désormais les recapitalisations et les emprunts obligataires qui s’imposent toujours plus et qui risquent d’être la clé de voûte de ces prochains mois. Lesquels seront décisifs pour la survie de certaines sociétés, déjà exsangues au niveau de la trésorerie après une année de fort reflux des commandes. «Après l’été meurtrier et l’automne mortel, le risque est donc d’avoir un hiver... funèbre», selon l’expression de Business Montres (BM).
Schématiquement et en théorie, une augmentation du capital-actions par apport en numéraire a souvent pour but de financer un nouvel investissement ou une nouvelle activité. En pratique, elle permet aussi, de manière moins prosaïque, de parer au plus pressé et d’obtenir les liquidités nécessaires à la poursuite des activités. Un peu à l’image des réductions de l’horaire de travail (RHT), ce processus suppose toutefois une inversion de tendance relativement rapide. Un pari a priori envisageable, au vu de certains signes de stabilisation pour le secteur.
«Il y a une année à peine, les sociétés horlogères qui cherchaient des fonds avaient l’embarras du choix. Outre les banques, les business angels, les sociétés de private equity voire même des privés cherchaient massivement à investir.
Depuis, dans la foulée notamment à l’effondrement de Lehman Brothers, c’est devenu nettement plus difficile», témoigne un avocat d’affaires genevois, qui traite actuellement plusieurs dossiers, notamment de reprise d’entreprises chancelantes. «Les investisseurs ont cru au miroir aux alouettes horloger. Le reflet est aujourd’hui nettement moins glamour », poursuit-il.
Même les grands groupes, à l’assise pourtant nettement plus solide que les petites structures indépendantes nées durant les dernières années de forte croissance, n’échappent pas au phénomène. Bulgari, en proie à de vives difficultés avec son pôle horloger, a lancé en juin une émission d’obligations convertibles de 130 millions d’euros. Objectif: renforcer la solidité du groupe de luxe italien en garantissant des liquidités suffisantes et un rééchelonnement de la dette. Discrétion horlogère oblige, on connaît officiellement très peu d’autres entreprises à avoir franchi le pas, hormis de Grisogono ce printemps.
On sait toutefois que la société horlogère neuchâteloise Hautlence a récemment procédé à une augmentation de son capital-actions. Elle servira certes à donner un peu plus d’air à la start-up mais aussi «à financer de nouveaux produits de l’entreprise», anagramme de la ville où elle est basée. D’après la FOSC du 5 août, le capital a été porté de 1,9 million de francs à 2,355 millions par l’émission de 450 000 actions. «Nous sommes toujours le même groupe d’actionnaires depuis 2004 et nous nous autofinançons et recapitalisons en interne, quand le besoin se fait sentir», détaille Guillaume Tetu, cofondateur de la société. Pour sa part, dans le cadre d’une réorganisation interne, Sowind SA (indirectement Girard- Perregaux et JeanRichard) a procédé à une hausse de capitalactions de 3,84 millions de francs (par suite de fusion) pour JeanRichard.
Cet été toujours, le capital de la société Volna est passé de 460 600 francs à 2,5 millions de francs. Cette augmentation a été rendue possible par l’arrivée de Vladimir Sherbakov, un financier d’origine russe établi à Genève et propriétaire d’une société d’investissement. Selon les déclarations officielles, cette hausse servira à poursuivre la mise au point de nouvelles complications et à développer de nouveaux marchés. Fondée en 2005, Volna a commercialisé ses premiers produits en 2007 et écoule environ 400 montres par an.
Voilà pour les mieux loties. Pour d’autres sociétés, qui ne le dévoilent pas, la quête de fonds pourrait s’avérer urgente.
Bastien Buss
AGEFI |