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Les affaires marchent plutôt bien pour ce Loclois d’origine installé dans la Vallée de Joux.
Raymond Jacot est installé au Sentier depuis six ans. Malgré le relatif isolement géographique de la Vallée de Joux, les affaires marchent plutôt bien pour ce Loclois d’origine. Son secret : un parcours professionnel et un carnet d’adresses de clients privés à faire pâlir un ambassadeur.
Raymond Jacot est un personnage hors du commun. Installé comme détaillant au Sentier depuis 2003, son parcours professionnel et son carnet d’adresses ressemblent plus à ceux d’un ambassadeur. Après quatre ans de formation d’horloger-rhabilleur au Technicum de St.-Imier, il rentre au département recherches et développement de Longines. Deux ans plus tard, une grande ambition en bandoulière, il quitte le continent européen pour la Zambie, dans le sud de l’Afrique.
Pendant cinq ans, il travaille d’abord pour Rolex, puis en indépendant dans toute la région. « J’avais racheté une bijouterie que j’ai beaucoup développée. Je ne voulais plus revenir, raconte-il aujourd’hui. Mais il y a eu des troubles et j’ai quitté le pays. » C’est à Zermatt qu’il rebondit, comme gérant d’une grande horlogerie-bijouterie d’abord, puis comme propriétaire de ce même commerce ensuite. Les affaires marchent tellement qu’il rachète une seconde enseigne, avant de lancer, en partenariat avec Nicolas Hayek, l’un des premiers Swatch Store de Suisse.
En 2000 toutefois, un investissement malheureux l’oblige à vendre en partie. Il quitte cependant la station valaisanne enrichit d’un carnet d’adresses de près de 3000 noms. Un véritable trésor qu’il s’applique aujourd’hui à entretenir consciencieusement, et qui fait pâlir d’envie bon nombre de marques.
Que portez-vous au poignet ?
C’est une montre qui porte mon nom. J’ai acheté un mouvement Valjoux blanc que j’ai terminé moi-même. C’est la 24e que je réalise. Quelques autres sont en cours de finition pour des clients très privés.
Vendre des montres et des bijoux ne vous suffisaient plus ?
J’emploie du personnel bien qualifié et j’ai beaucoup investi dans l’outillage et le service. Et puis avec les années, j’ai créé tout un réseau d’artisans horlogers et de réparateurs dans la Vallée. Quand une montre a fait le tour des SAV et qu’elle ne marche toujours pas, elle atterrit chez moi.
Et il y en a beaucoup ?
Le problème, c’est que les mouvements fonctionnent aujourd’hui sur ordinateur, mais c’est plus délicat dans la réalité. Les tolérances sont de plus en plus serrées, et cela se traduit par des services plus fréquents.
Quelles marques représentez-vous ?
Je vends treize marques actuellement, qui sont presque toutes produites à la Vallée de Joux : Audemars Piguet, Breguet, Blancpain, Jaeger-LeCoultre. Mais je représente aussi Swatch. J’ai une devise : de 50 francs à aucune limite, les aiguilles ne vont pas plus vite !
Comment les avez-vous choisies ?
La plupart étaient déjà là lorsque j’ai racheté en 2003. Mais elles sont restées parce que j’ai un carnet d’adresses de clients privés assez exceptionnel.
D’où vous viennent ces contacts ?
De mon séjour en Afrique, mais surtout de mon passage à Zermatt. Plus de 2 millions de personnes passaient devant mes vitrines chaque année. Avec le temps, je me suis constitué une liste de près de 3000 clients, collectionneurs pour la plupart. Beaucoup m’ont suivi au Sentier. Je leurs envoie chaque fin d’année une plaquette publicitaire sur laquelle je mets une photo de toute mon équipe. C’est important, pour qu’ils nous voient vieillir avec eux ! Et puis j’en invite un certain nombre à des événements, en partenariat avec des marques ; ou alors je vais les voir lorsqu’ils sont de passage en Suisse. Je bouge énormément.
Et ces clients, de quels coins du monde viennent-ils ?
D’Ukraine, du Kazakhstan, de Chine, d’Inde, du Brésil, d’Europe et de Russie. En juillet, j’ai interrompu mes vacances pour accueillir une vingtaine de Russes qui venaient visiter une manufacture ! Je n’ai par contre quasiment pas d’Américains.
Avez-vous subi un ralentissement de la marche des vos affaires avec un tel réservoir d’amateurs ?
Oui, bien sûr. Mon chiffre d’affaires a baissé de 30% sur les trois premiers mois de l’année. Mais je suis très optimiste : les ventes repartent à la hausse. Je pense que c’est parce que les Bourses vont mieux.
Un tel réseau doit faire envie à beaucoup de marques !
Oui, beaucoup de manufactures me courtisent. Mais je privilégie toujours la Vallée de Joux. De toute façon, je n’ai plus de place dans les 260 mètres carrés de ma boutique. Par contre, je suis également consultant pour un certain nombre de marques. Cela concerne aussi bien la technique que l’aspect commercial. C’est très global.
Quelle part de votre chiffre d’affaires réalisez-vous avec la vente de bijoux ?
Environ 20%. J’en achète, mais j’en crée également. L’an dernier, une de mes bijoutières, Zeudi Cabiddu, a remporté le deuxième prix du Tahitian Pearl Trophy Switzerland avec une bague de trois perles polynésiennes montées sur or blanc, « Le champ des étoiles ». Cette pièce est la première d’une collection que l’on va démarrer : des perles chocolat montées sur or rose.
Propos recueillis par Fabrice Eschmann
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