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Corum - Antonio Calce, un visionnaire intransigeant
 
Le 02-11-2009
de Tribune des arts

Après avoir fait table rase du passé récent de Corum, épuré drastiquement son réseau de distribution et recentré la marque sur sa véritable identité, il fera tout pour en préserver l’indépendance.

Ni détours, ni faux-semblants. Lorsqu’Antonio Calce, patron des montres Corum, vous reçoit dans son bureau de La Chaux-de-Fonds - que décorent juste les dessins de ses trois filles -, il se livre avec une franchise rare, donne même quelques chiffres sur sa production, sur la répartition de son chiffre d’affaires, sur les investissements consentis au cours des dernières années. C’en est presque sidérant, dans ce monde d’ordinaire si discret de la haute horlogerie. Formé à l’école du groupe Richemont, chez Piaget d’abord, puis chez Panerai, l’homme ne rejoint Corum qu’en 2005. Quatre ans plus tard, le succès est là; à 42 ans à peine, Antonio Calce a su redonner à la marque qu’il dirige toute sa légitimité.

Il y avait certes de beaux acquis. «Dans les années quatre-vingt, Corum était l’une des marques les plus prestigieuses du monde», se souvient notre interlocuteur. Elle était riche de contenu, d’une créativité débridée. «On a vu des choses qui sortaient complètement des sentiers battus, comme le cadran en plumes, ou le mouvement Golden Bridge.» Elle ratera pourtant le virage des années nonante, la décennie qui vit l’émergence des grands groupes, la professionnalisation de la gestion. «On a découvert l’importance des stratégies produit, celle des ambassadeurs; on a massivement investi dans l’outil industriel et dans les techniques de commercialisation. Jusque-là, on vendait ce qu’on produisait, désormais, il allait falloir produire ce qui se vendait», résume Antonio Calce.

Le ciel s’obscurcit alors, les difficultés s’amoncellent pour Corum finalement acculée au dépôt de bilan. Reprise en 2000 par Séverin Wunderman, l’homme qui a fait le succès des montres Gucci, la marque se transforme en Fashion Brand, multiplie les références, bouleverse son réseau de détaillants. Certes, le lancement de la Bubble la même année marque les esprits, mais le succès économique n’est pas au rendez-vous.

L’heure de la révolution

Passionné mais pragmatique, curieux mélange qui fonctionne à merveille chez lui, Antonio Calce lâche un verdict sans appel: la capacité à dégager une marge est une composante fondamentale du succès. Sans elle, impossible de prétendre que telle ou telle montre est une réussite, quelles que soient les prouesses - techniques ou artistiques - qu’il a fallu accomplir pour la réaliser. Il gagne la confiance de Séverin Wunderman, dont il remet pourtant en cause la stratégie. Il gagne même sa complicité. Et prend le risque majeur d’où naît aujourd’hui le succès de la marque: faire table rase du passé récent, oublier le quartz et la mode, retrouver l’identité véritable de Corum.

Le grand nettoyage commence: le réseau de distribution comptait plus de 1000 points de vente, il n’en affiche plus aujourd’hui que 550, «et c’est encore trop». La marque a ainsi investi près de 20 millions de francs dans le nettoyage de son réseau, et poursuit sa restructuration avec l’ouverture prochaine d’une boutique à Hong Kong. Parallèlement, le catalogue fond aussi, de 3000 références en 2005, presque exclusivement des montres à quartz, jusqu’aux 150 références actuelles, toutes mécaniques et sagement ordonnées autour des quatre piliers de la marque: L’Admiral’s Cup, la Romvlvs, la Golden Bridge (rebaptisée Corum Bridge pour accueillir le calibre linéaire de la Ti-Bridge) et la ligne Artisans.

«Ce n’est pas un changement, c’est une révolution!» Le CEO de Corum travaille désormais sur ses icônes, recherche des cycles de vie plus long: «Notre chronographe, né en 2007, sera toujours là en 2010, je ne souhaite pas changer un produit après seulement trois ou quatre ans. Témoins de cette stratégie basée sur la durée, la Golden Bridge fêtera l’an prochain son trentième anniversaire alors que son aînée l’Admiral’s Cup célébrera son demi-siècle d’existence! Un succès mérité pour une montre qui génère près de la moitié des ventes de Corum.

Investissements à long terme

La crise? Antonio Calce la vit, bien sûr, mais ne la craint pas trop: «Nous avons réduit notre niveau de production dès l’automne 2008 en sentant le vent tourner. Aujourd’hui, 2009 ne m’inquiète pas, nous n’avons pas perdu d’argent et le marché asiatique redémarre. Ce sont plutôt les années 2012 à 2014 qui me préoccupent, si nous ne consentons pas les investissements nécessaires pour l’outil de production et le réseau de distribution.» L’Italien de La Chaux-de-Fonds regarde-t-il trop loin? «Non, je travaille dans la durée, pour maintenir l’indépendance de Corum, je ne suis pas un manager opportuniste.»
Marco Cattaneo

La Tribune des Arts

 



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