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Black Belt : Yvan Arpa revient sur le tatami pour une montre en kimono
 
Le 02-11-2009
de Business Montres & Joaillerie

Les règles du bushido (la « voie du guerrier ») valorisent moins la victoire que le chemin pour y parvenir.

Il faut donc voir Black Belt, la nouvelle montre-marque d’Yvan Arpa (ex-RJ-Romain Jerome) comme une étape sur sa trajectoire, et non comme une fin en soi.


••• BLACK BELT : FOR BLACK BELTS ONLY
Surprendre Dominique Valera avec une Black Belt au poignet ne fera sans doute frissonner que les baby boomers, qui se souviendront de l’avoir considéré comme un des plus fantastiques « combattants » français des années 1965-1975. Sur le tatami, ce karateka a accumulé les victoires jusqu’à ce qu’il colle un « pain » à un arbitre qui l’avait disqualifié un peu cavalièrement dans un championnat du monde, en 1975. Ce qui est plutôt un signe de bonne santé pour tout rebelle qui se respecte. Autant dire que c’est un homme de caractère, que les cinéphiles auront apprécié dans le burlesque Twist again à Moscou autant que dans Ne réveillez pas un flic qui dort...

Yvan Arpa, (ex-Sector, ex-Hublot, dont Business Montres a révélé le fracassant départ de RJ-Romain Jerome, le 6 juillet dernier), fréquente les dojos de karaté depuis l’âge de 7 ans (quatorze finales en compétition à son actif !). En vrai « bête » de marketing, il était fatal qu’il détecte un créneau potentiel chez les ceintures noires de tous les arts martiaux qui existent à travers le monde : une « niche » exclusive et un club de quelques centaines de milliers d’happy few pour lesquels l’argent ne saurait être la valeur suprême, puisqu’une ceinture noire – black belt, donc... – ne peut s’acheter et qu’elle doit âprement se mériter.

Créer une montre de luxe que l’argent ne peut acheter : aucun gourou marketing n’aurait pu résister. Yvan Arpa (image ci-dessus) a donc conçu Black Belt pour cette élite internationale des « combattants ». Seuls les titulaires officiels d’une ceinture noire décernée par les fédérations autorisées pourront se procurer leur montre Black Belt. Le modèle de distribution retenu est ultra-exclusif : Internet (sur justificatif de la ceinture noire) et les événements d’arts martiaux. C’était hier soir, au salon des arts martiaux de Genève, la grande « première » de présentation de la montre, face à un parterre d’amateurs et de sommités de toutes les techniques de combat.

Grand moment d’émotion au passage : une part non négligeable du chiffre d’affaires de Black Belt est reversé à l’association Little Dreams (programme No Difference), qui travaille à l’initiation des handicapés de toutes sortes aux arts martiaux. Là encore, on ne peut qu’avoir la gorge nouée quand on voit ce que des maîtres patients peuvent apprendre à des handicapés moteurs ou même cérébraux. Quand Dominique Valera vient remettre sa ceinture noire à un élève aveugle (pardon, « non-voyant ») qui s’est entraîné 17 ans pour l’obtenir, impossible de ne pas laisser parler son cœur : après démonstration sur tatami, on a pu vérifier que cette ceinture noire n’était pas de complaisance...

Revenons à Black Belt (le vrai nom est Blackbeltwatch : « Imaginée, dessinée et manufacturée dans le respect des règles du bushido ») : la montre est évidemment « typée Arpa » : boîtier acier volumineux, mais sans exagération, concept monochrome (boîtier, cadran, aiguilles, bracelet traités au PVD noir), lunette gravée d’idéogrammes (kanji) en relief, bracelet en cuir et gomme « tissée » comme un kimono, cadran multi-niveaux décoré d’une ceinture nouée, aiguilles en forme de shinai (sabre de bambou pour s’entraîner au kendo), mouvement automatique Sellita (Swiss Made, 38 h de réserve de marche)...

Au poignet (ci-dessus), c'est plus une vraie sportive qu'une folle mondaine, avec un confort au porter qui vient d'un bon équilibre des masses et de la bande de cuir qui double la gomme au contact de la peau. Contrairement à beaucoup de montres monochromes noires, la largeur d"ouverture du cadran rend la lecture de l'heure très aisée dans toutes les conditions de lumière. D'autant que ce cadran est très sobre et les rares gravures ton sur ton (images plus officielles sur le site Black Belt)...

Autre marquage typiquement Arpa : la charge émotionnelle attachée au produit. Il nous avait fait le coup avec la Big Bang Hublot, dont il a été un des initiateurs, puis avec la Titanic-DNA et la Monn Dust-DNA chez RJ-Romain Jerome, ou encore le Tourbillon « Roswell » chez RJ (Business Montres du 8 mars) : s’il aime décidément à bousculer les codes, c’est aussi qu’il sait profiter de cette déstabilisation pour imposer un rapport de forces émotionnel qui remplace avantageusement (et économiquement) des années de pression publicitaire. L’affect est immédiat et l’indifférence impossible, non sans miser sur l’aura potentiellement « scandaleuse » qui s’attache à tout émotion forte (*) et donc sur les retombées médiatiques inévitables. Emotion = impulsion (d'achat) !

Il en va de même pour Black Belt : les pratiquants qui en suent des tonnes au cours de longues et fastidieuses séances d’entraînement (avant de décrocher leur ceinture noire) auront à cœur de casser leur tirelire pour ce signe extérieur d’appartenance à une élite combattante inernationale. Avec une peu de patience, les nouveaux samouraïs nous inventeront même un art du combat avec Black Belt, de même que leurs ancêtres du Japon médiéval avaient formalisé l'art de se battre avec une théière...

Au fait, et les valeurs du bushido, que cette montre est supposée illustrer ? On compte traditionnellement sept vertus, qui formeraient une assez bonne leçon de morale horlogère :
• Droiture (Gi).
• Courage (Yu).
• Bienveillance (Jin).
• Respect (Rei).
• Sincérité (Makoto).
• Honneur (Meiyo).
• Loyauté (Chugi).

••• SEPT VERTUS QUI PERMETTENT DE COMPRENDRE que l’enfer du bushido horloger est pavé de bonnes intentions rarement déployées au quotidien par les élites des marques et de l’industrie...


(*) Pour mémoire, Business Montres (26 mars 2007) avait été le premier – sinon le seul – média horloger à dire tout haut ce que la profession pensait tout bas de la récupération de l’épave du Titanic (il est vrai que nous ne misions pas sur les annonces publicitaires de Romain Jerome !).
•• C’était titré : « J’irais cracher sur vos tombes ». On y parlait des « charognards du marketing », avec cette conclusion : « La faim de notoriété ne justifie pas tous les moyens » (article intégral dans le n° 51, à télécharger ici).
Comme quoi, on peut se parler franchement, écrire en toute indépendance, s’engueuler sérieusement et avoir des explications « viriles » sans pour autant renoncer à toute amitié avec un « patron » horloger digne de ce nom !
Ça, en revanche, il faut avoir un minimum de sens du bushido (relire ci-dessus) et un soupçon de subtilité pour le comprendre...

 



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