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Une nouvelle logique de « coopétition »
 
Le 05-11-2009
de Business Montres & Joaillerie

Coopération + compétition = coopétition.

C’est la nouvelle logique de travail communautaire et participative des marques indépendantes, là où les marques classiques ne pratiquent guère que la bonne vieille concurrence.

Changement d’époque et d’ambiance, pour lequel il fallait un néologisme,
Made in USA, évidemment...


••• UN ÉCOSYSTÈME D’AFFAIRES
Pour une définition plus précise de la coopétition, voir la notice Wikipedia sur ce concept stratégique d’ « écosystème d’affaires ». Pour faire simple, il s’agit de développer un partenariat dans un contexte de concurrence : l’idée était hier saugrenue, mais elle colle aujourd’hui particulièrement bien à la situation des marques horlogères indépendantes, confrontées à une même crise collective de leur environnement économique et soumise aux mêmes pressions exterminatrices [y aurait-il un autre mot ?] de la part des « grandes marques » – qui jouent elles aussi leur survie. Pression régulièrement pointée du doigt par Business Montres, mais qu’un magazine comme Europa Star a fini par remarquer, au point de lui consacrer le dossier de son prochain numéro.

L’esprit de coopétition est de toute évidence une résultante de la crise horlogère. Quand tout se vendait à l’avance, même le virtuel et le gestatif, chaque petite marque de créateur et chaque manufacture indépendante vivait sa vie sans trop se soucier des autres. Le besoin de se parler est né des premières tempêtes, des premières vitrines fermées pour cause de chantage des groupes sur les détaillants et des premiers rédactionnels caviardés pour cause de déficience publicitaire par rapport aux grands annonceurs.

Tout-à-coup, l’horlogerie d’auteur s’est retrouvée bien seule, face à des méga-marques qui abusaient de leur position dominante et face à des financiers qui perdaient parfois les pédales par peur de perdre leurs investissements dans les jeunes marques.


••• TRANSPARENCE ET INTELLIGENCE COLLECTIVE
Il n’était pas simple de se parler entre « partenaires » qui se pensaient encore comme « concurrents », selon le mode de pensée classique des marques d’horlogerie. Quelques initiatives, comme les Premiers ateliers de la refondation horlogère (Neuchâtel, mars 2009), The Watch Factory (Baselworld, avril 2009) ou la réunion informelle de dix-huit marques à l’hôtel du Peyrou (Neuchâtel, juin 2009) ont permis de nouer des premiers contacts qui ont révélé plus de points communs que de divergences autre que caractérielles. Rapprocher les points de vue et voir se parler des partenaires qui se croyaient adversaires est toujours un plaisir...

C’est le nouvel esprit de coopétition : initier de nouvelles démarches dans le cadre d’une compétition transparente et imaginer des solutions créatives capables de déboucher sur de nouvelles pratiques. L’idée même de The Watch Factory illustre cette logique coopétitive : partager un même territoire en « niches écologiques » assez diversifiées pour créer un biotope complexe mais assez équilibré pour créer une intelligence collective. Le tout supérieur à la somme des parties, qui lui donnent un sens et qui dessinent une perspective.

La coopétition, c’est de réfléchir ensemble à de nouvelles distributions alternatives, pour retrouver un contact enrichi avec le client final, au-delà des écrans dressés par les réseaux marchands et les médias classiques. C’est imaginer ensemble, chacun selon sa propre partition, une mélodie originale d’expression, hors des lieux de vente traditionnels. C’est partager une plate-forme de communication capable de traduire la fantastique diversité biologique d’un paysage éco-industriel.

Partager l’intelligence, c’est souvent partager les coûts. C’est mettre en place une approche communautaire des fournisseurs, qui peut aller jusqu’à l’open source en matière de mouvements, le partage d’études ou la mise en place de centrales d’achats. R&D, composants, financements, commercialisation ou promotion : aucun sujet n’est plus tabou pour une nouvelle génération qu’on voit de plus en plus pratiquer de façon endogamique la « collection capsule » (exemple récent : Max Busser et Alain Silberstein pour une HM2 Black Box)...


••• COOPATTITUDE
Impossible de comprendre ce qui se passe au sein de cette nouvelle génération – celle qui porte l’avenir de l’horlogerie créative – sans ce concept de coopétition, qui balaye les anciennes « frontières » entre les marques au profit de nouveaux clivages qui se traduisent en termes de comportements relationnels et d’attitudes face à la vie et aux autres. La coopattitude, c’est justement un réflexe transgénérationnel de refus des égoïsmes – il n’y aura d’autres solutions à la crise que communautaires – et de partage (relatif, soyons réalistes) des meilleures pratiques. Quoi de plus normal pour la génération des « babybulleurs » [ceux qui sont nés avec la bulle], qui « twittent » à qui mieux mieux et qui, pour beaucoup, ont partagé trop de galères dans leur apprentissage au sein des groupes pour ne pas en être définitivement vaccinés ?

Peuvent entrer dans cette chaîne de solidarité de nouveaux acteurs venus de la distribution (Laurent Picciotto en serait un bon exemple), des médias (Business Montres n’en est pas le plus mauvais exemple) ou tout simplement de plus grandes marques imprégnées d’esprit nouvelle génération (trop de managers à citer pour un seul exemple, et ce n’est pas une question d’âge, mais de regard porté sur l’horlogerie). Peuvent s’y associer quelques fournisseurs de composants ou de mouvements [les plus créatifs sont aussi les plus disruptifs et les plus proches de l’esprit coopétiteur dont nous parlons], ainsi que des designers, tous lassés par les pesanteurs de l’omerta et du cloisonnement qui pèse sur l’industrie des montres. Peuvent s’y intégrer, enfin, les milliers d’amateurs qui, à travers le monde, ne se contentent plus des merveilleux contes de fées racontés par les marques et qui se méfient de plus en plus des ravages convergents du marketing et de la rapacité actionnariale...


••• LE TEMPS EN PARTAGE
Un des concepts les plus forts de la nouvelle génération – celui qui consonne le mieux avec les attentes sociétales du public – est la réappropriation personnelle du temps : on le vérifie dans les nouvelles façons d’afficher l’heure, comme dans les montres qui cachent le temps, qui le réencodent ou qui se permettent d’en varier la vitesse. Les objets du temps les plus étonnants sont ceux qui en modifient la perception habituelle pour lui redonner saveur, densité et réalité palpable : on est souvent loin de la montre ronde à trois aiguilles, qui ne mesure qu’un temps fonctionnel, pour aborder des expressions esthétiques capables de réenchanter les heures.

C’est ce partage d’un nouveau temps qui fonde les règles de la nouvelle coopétition : à chacun selon son temps et selon ses moyens, mais à tous selon le même désir d’un autre temps et d’une autre dimension de l’existence.

On assiste donc à une convergence passionnelle, née d’un impératif stratégique (survivre face aux grands prédateurs) et d’une nécessité économique (tirer son épingle du jeu de la crise) : coopétitive par goût autant que par instinct, la nouvelle génération se renforce dans l’adversité et trouve en son sein des défenses immunitaires dont elle n’avait pas conscience. Ce n’est plus l’horlogerie héritière des paysans-éleveurs isolés dans leurs hameaux par l’hiver : c’est le réseau des créateurs et des auteurs de montres qui survivent à l’explosion de la bulle parce qu’ils ont compris qu’on était plus intelligent à plusieurs que tout seul.

Changement radical de paradigme et inversion des polarités : une sélection darwinienne se profile, impitoyable pour les moins adaptés – qui ne seront pas forcément les plus gros, mais les plus malins !

 



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