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TAG Heuer fêtera l’année prochaine les 100 ans d’une passion partagée avec l’automobile.
Préface à cette commémoration : le lancementà Genève du roadster TAG Heuer Tesla.
Un bon prétexte pour faire le point sur l’engagement mécanique de la marque, qui s’offre là un « écrin » horloger à la mesure de ses ambitions.
Immenses, bien sûr !
••• UN ÉCRIN ÉLECTRO-MÉCANIQUE SUR QUATRE ROUES
Jean-Christophe Babin a un peu de mal à caser ses grandes jambes dans l’habitable de « son » roadster (c’est bien le sien, il est griffé de partout, devant, derrière, sur les côtés). Une fois calé dans le siège baquet, c’est plus facile : le Meridiist (téléphone) dans son logement entre les deux sièges, le nouveau mouvement « pendulaire » TAG Heuer sur sa console à l’arrière. Aucune utilité fonctionnelle à cette console, sinon pour regarder – à l’envers ! – dans le rétroviseur la « pendule » en question (ne pas confondre avec le chrono classique dédié au roadster), mais elle est simplement là pour rappeler que cette TAG Heuer Tesla est, sur quatre roues et en 3,94 m de long, le plus grand écrin horloger jamais présenté.
Un écrin en alu et fibre de carbone, totalement électrique, capable de pousser le 0-100 km/h en 3,9 secondes (mieux que la quasi-totalité des Porsche du marché) avec 380 km d’autonomie pour une vitesse de pointe supérieure à 200 km/h (limiteur électronique). Ne cherchez pas la trappe à essence, ou plutôt soulevez-là et vous trouverez une simple prise électrique (220-240 volts) pour redonner de l’énergie aux 6 831 cellules de la batterie ion-lithium...
Présentation en avant-première de ce partenariat dans Business Montres le 1er mars et complément d'information le 5 mars (info n° 20)...
••• HAUT INDICE DE PERFORMANCE
TAG Heuer marchant à l’électricité ? A première vue, c’est contradictoire avec les options mécaniques de la marque, et ce pourrait n’être qu’un simple effet de mode, un bon coup de ce greenwashing qui sert de béquille aux marques en panne d’imagination marketing. Première vue, courte vue ? En effet, la Tesla n’est pas une voiture électrique de plus dans un salon de Genève qui jouait cette année à plus eco-friendly que moi, tu meurs ! Tesla, c’est plus qu’une voiturette, c’est même plus qu’une injection de souci environnemental dans une gamme : c’est une nouvelle génération de voiture et un nouveau concept – très radical – pour reformater l’avenir de l’industrie automobile.
Il suffit de décoder le concept Tesla pour comprendre ce qui a pu intéresser TAG Heuer dans ce partenariat :
• Une idée californienne, née du côté de la Silicon Valley et conçue pour les jeunes managers du nouveau high-tech. Donc, une proposition globale ultra-tendance et « générationnelle ». TAG Heuer a pu en vérifier l’efficacité par une série de road shows précurseurs, qui ont plébiscité l’association Tesla-TAG Heuer dans l’esprit des amateurs américains (marché-clé pour TAG Heuer)...
• Une idée d’excellence automotive : Tesla est au sommet de la pyramide non seulement des voitures électriques, mais aussi dans le peloton de têtes des grandes sportives du marché. Sous les 5 secondes au 0-100 km/h, on ne trouve pas beaucoup de monde, et surtout pas des modèles électriques. C’est une autre idée de la voiture sans essence qui se profile ici et cette « génération d’avance » avait tout pour séduire TAG Heuer...
• Une technologie innovante pour un concept global qui ne l’est pas moins : Tesla a réinventé son métier de constructeur automobile, en repensant la motorisation tout-électrique, en redonnant un autre goût au plaisir de la vitesse et en réinventant au passage un réseau de commercialisation (exclusivement pour Internet, avec quelques flagships dans les tuyaux) et même un positionnement prix – environ 100 00 dollars (autant en euros, ce qui est scandaleux comme discrimination géographique !), « à emporter » avec une poignée de dollars en cash et une financement autour de 1 700 dollars/mois.
Bref, une proposition on ne peut plus « générationnelle », qui prend une option sur les évolutions futures du marché automobile. Donc, un nouveau champ d’explorations à préempter pour TAG Heuer, qui cherche, précisément, à rester en phase avec la nouvelle génération des concepteurs/créateurs/amateurs de high tech de la nouvelle économie numérique...
••• EXTENSION DU TERRITOIRE DE LA MARQUE
Pour TAG Heuer, l’aventure Tesla n’est qu’une nouvelle facette d’une grande passion automobile commencée il y a un siècle avec les premiers compteurs de sport intégrés dans le tableau de bord des premiers bolides. Les héritiers Heuer adoraient la vitesse – de même que le fondateur, Edouard, en avait fait une raison d'être, mais avec les chevaux de course : c’est d’ailleurs pour que les éleveurs puissent disposer de bons chronographes de référence qu’il avait fondé son « comptoir » horloger...
Avec Tesla, TAG Heuer reste partenaire de McLaren pour la Formule 1 (Lewis Hamilton et Jenson Button, deux ex-champions du monde prêts à le redevenir), de Mercedes pour la SLR et, bientôt (révélation anticipée par Business Montres, info n° 20 du 5 mars) d’Audi pour la nouvelle R8. Soit un club très fermé, dont le point commun serait, précisément, de se tenir sous les 5 secondes au 0-100 km/h : une ultra-niche qui verrouille un peu plus le territoire automobile de TAG Heuer.
La marque cumule ainsi les références d’exception quand la plupart des maisons de montres concurrentes subissent plus qu’elles n’impulsent la ruée vers l’automobile, en se contentant au mieux de parrainer un modèle ou un pilote, plus rarement une marque ou une épreuve des différents championnats.
Moins de 5 secondes aux 0-100 km/h : on se situe là dans un univers de micro-chronographie qui annonce parfaitement le chronographe au 1/100e de seconde – calibre intégré, très différent du précédent calibre 360, qui ne l’était pas – prévu pour la fin de l’année (information non officielle, mais confirmée aux meilleures sources). Soit une performance mécanique qui fera date dans les annales de l’histoire horlogère.
••• GARDER UNE LONGUEUR D’AVANCE SUR LES POURSUIVANTS
Pour TAG Heuer, l’aventure Tesla n’est qu’une nouvelle facette d’une grande passion automobile commencée il y a un siècle avec les premiers compteurs de sport logés sur le tableau de bord des premiers bolides de course.
En marquant ainsi sa différence tout en préservant sa légitimité territoriale (n’oublions que c’est TAG Heuer qui a inventé l’association montre-voiture, avec Ferrari, puis avec différents champions), la marque aux centaines de victoires sur les circuits recadre en fait les règles de base du sponsoring automobile. Recette pour garder une longueur d’avance sur les concurrents : les trois T.
• TEMPS : pour garder tout son sens, il faut rester en permanence relié au temps, aux objets du temps, à la performance liée au temps, donc au chronométrage et à ses performances. La cohérence découle ici de l’évidence d’un ancrage horloger à préserver à tout prix.
• TECHNIQUE : côté voiture comme côté montres, on doit se situer dans un contexte récurrent d’innovation technique. TAG Heuer travaille ici ses propres fondamentaux, liés à ses axes de recherche de R&D horlogère pure et dure : la transmission (innovation des courroies de la Monaco V 4), la régulation de l’énergie (innovation à venir), l’énergie elle-même (innovation « pendulaire » présentée à Bâle) et la précision (ce sera le chronographe au centième de seconde, unique sur le marché).
• TERRITOIRE : l’espace vital doit être défendu en permanence, à la fois pour créer une pertinence dans la durée, mais aussi pour consolider les sédiments du passé et en faire un socle de légitimité absolue. Extension de ce territoire sur l’avenir alter-énergétique de l'industrie automobile et le concept « générationnel » de Tesla. Extension du côté des légendes contemporaines, avec les « chevaliers de la route » (les « ambassadeurs » recrutés chez les champions du volant). Travail subliminal sur le quart de siècle de partenariat avec McLaren (le plus ancien dans le sport mécanique).
Le travail de fond opéré sur la base de ces trois T se nourrit des synergies mises en mouvement : ça marche encore mieux quand le « coup » est joué sur ces trois pôles, qui tracent une ligne de conduite marketing assez rigoureuse. On cherche en vain ce type de garde-fou dans les décisions marketing opportunistes de trop de marques d’horlogerie qui se risquent sur le terrain du motor racing...
Que manquerait-il aujourd’hui à TAG Heuer dans ce domaine. Sans doute une touche plus féminine – ce qui n’est pas évident dans le motor racing, mais ce serait utile pour ancrer la marque sur un segment féminin où elle reste faible : la Fiat 500 étant déjà prise, peut-être la Mini...
••• AVEC LA RÈGLE DES TROIS T, TAG HEUER PEUT SE PASSER du chronométrage officiel de la F1, dont la marque a longtemps fait sa spécialité. Ce n’est plus indispensable comme vecteur de rêve : l’affaire du contrat horloger Ferrari en est un bon exemple, l’avidité financière des Italiens semblant inversement proportionnelle aux effets d’image qu’on peut espérer d’une telle association. Autant laisser les autres marques se précipiter...
• On surveillera en revanche, ces jours, cette affaire du chronométrage officiel de la F1, avec l’annonce par Bernie Ecclestone d’un nouveau partenaire horloger, dont le nom apparaîtra en permanence sur tous les panneaux de chronométrage et dans tous les circuits.
• De source officieuse [confirmation Business Montres dans les jours qui viennent], le partenaire officiel du championnat du monde devrait être une marque encore « vierge » dans le domaine de la F1, mais déjà très professionnelle dans de nombreux autres sports.
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