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Ce n’est pas tous les jours qu’on tient en main un trésor horloger : il y a 180 ans, Abraham Louis Breguet annotait de sa main ce manuscrit, mais la mort devait l'empêcher de le publier.

Osvaldo Patrizzi vient de retrouver quatre cahiers d'un texte décisif pour l'histoire des montres :dispersion historique en vue...

••• 368 PAGES INÉDITES QUI PEUVENT CHANGER L’HISTOIRE HORLOGÈRE

Cinq ans avant sa mort (1823), Abraham Louis Breguet entreprend de mettre en forme pour la postérité son expérience horlogère. D’un tempérament peu littéraire, il dicte ses « mémoires » à son ami et assistant Louis Moinet [l’horloger en l’honneur duquel Jean-marie Schaller a baptisé sa marque] : l’un raconte, le second rédige, puis Breguet corrige à la main et annote, sur la page blanche au recto de la page précédente, les lignes tracées par Moinet. Ces séances d’écriture vont se dérouler pendant cinq ans.

• Breguet se raconte librement et se livre sans fard, avec sa vision de l’horlogerie, sa philosophie créative et ses secrets d’horloger. On découvrira dans ce texte – s’il est un jour publié – la clé de quelques énigmes de l’horlogerie, qui ont jusqu’ici échappé à la sagacité des breguetologues (notamment les arcanes de l’huilage des rubis-pivots selon Breguet : le manuscrit est précisément ouvert à cette page sur l’image ci-dessus)...

• Pourquoi cette réserve « s’il est un jour publié » ? Tout simplement parce que Breguet est mort en 1823, alors que ces quatre cahiers de son manuscrit étaient quasiment terminés et relus (mais pas complètement), et qu’une querelle ultérieure entre ses héritiers et Louis Moinet a empêché l’édition du texte travaillé avec Breguet, dont on connaît au moins trois copies partielles, celle-ci étant la première et donc la plus précieuse. Apparemment, les vendeurs de ce document inestimable n'ont pas posé de conditions concernant sa publication ultérieure, mais une publication préalable n'était pas possible...



••• DES ANNOTATIONS DE BREGUET IN ET HORS-LIGNES MANUSCRITES

Ce manuscrit avait disparu depuis la mort d’Antoine Louis Breguet, le fils d'Abraham Louis : sa réapparition soudaine est un événement historique et horloger de premier plan. Emmanuel Breguet ne disposait pas de ce texte quand il a rédigé son livre sur Breguet (nouvelle édition en vue ?) et le musée Breguet de Nicolas Hayek ne détient que des notes préliminaires à ce travail de rédaction, plus quelques feuillets d'une version ultérieure...

• Il est d’ailleurs possible que ces quatre cahiers ne soient que les premiers d’une série plus importante. Très frais après un siècle et demi de « placard » et de mise au secret, ces cahiers se présentent en paquets de feuilles (vélin ou papier à la cuve ?) plus ou moins reliées (format 35 cm x 23 cm, un peu plus grand que du A 4 contemporain), annotées des deux côtés et semées de corrections de la main de Breguet, in et hors-texte, comme on peut le voir sur cette image.

• Exemples de têtes de chapitre conçues par Breguet : « Nouvelles observations théoriques et practiques sur l’horlogerie pour l’usage civil, l’astronomie et la marine », qui comprend « De la montre simple à une aiguille », de l’échappement à cylindre en rubis dans la montre simple à une aiguille », « de la répétition par le tact », etc.

• On trouvera la description minutieuse de ce manuscrit exceptionnel dans le catalogue de la vente Patrizzi & Co du 25 avril prochain, à Genève. En effet, cette vente avait, parmi ses lots phares, le passeport suisse de Breguet quand il est revenu à Neuchâtel, en octobre 1793, alors que la Terreur régnait à Paris.



••• QUATRE LOTS D'UN CAHIER CHACUN

La mise en vente de ce passeport a donné l’idée à ceux qui détenaient ce texte inédit, fondamental pour l’histoire de l’horlogerie, de le joindre à la vente organisée par Osvaldo Patrizzi, qui l’a aussitôt fait expertiser par les autorités breguetologiques compétentes (Emmanuel Breguet, notamment), alors que l’expert Philip Poniz en dressait le contenu, page par page, et documentait la notice à l’usage des collectionneurs. Le manuscrit – qu'Osvaldo Patrizzi n'est pas loin de considérer comme un des plus lots de sa vie d'auctioneer horloger sera dispersé en quatre numéros d'un cahier chacun.

• En France, un tel document aurait été préempté par la Bibliothèque nationale comme relevant du patrimoine national et donc « interdit de sortie ». Sa mise en vente en toute liberté à Genève ouvre le jeu, ce manuscrit pouvant tenter quelques musées (dont évidemment le musée Breguet de la place Vendôme) et quelques grands collectionneurs internationaux, mais il serait dommage que le ministère français de la Culture s'en désintéresse...

• Business Montres reviendra ultérieurement sur cette pièce historique, autour de laquelle on sent déjà se dessiner un élan de curiosité d’envergure mondiale, qui ne pourra que profiter au monde des enchères horlogères en général, et des enchères genevoises en particulier...