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Alors que l’horlogerie se remet doucement de ses émotions volcaniques (qui ont bloqué les livraisons de bracelets, d’écrins et de composants venus d’Asie), le Quotidien des Montres vous livre une brassée de douze informations sur les montres, les marques et ceux qui les font...
1)
••• LE RÉVEIL CHRONOMÉTRIQUE DES SUISSES
Un an après le premier concours de chronométrie organisé en Suisse depuis la révolution du quartz, le dossier commence à mobiliser quelques énergies. Une table ronde est prévu le jeudi 6 mai, au Club 44 de La Chaux-de-Fonds (20 h), avec Claude-Henri Chabloz (qui a organisé les séquences finales du dernier concours de chronométrie), Gilbert Jornod (ancien responsable des concours de chronométrie de l’Observatoire de Neuchâtel), Jean-Claude Meylan (directeur technique de Jaeger-LeCoultre, marque lauréate du dernier concours) et René Addor (créateur indépendant, lui aussi récompensé au dernier concours). Modérateur : Mario Sessa (journaliste suisse). Soit un « plateau » suississime, dont on attend malgré tout un minimum d’ouverture sur l’extérieur, notamment la possibilité pour les marques horlogères non-suisses de concourir. Autre thème brûlant : le règlement intérieur, qui interdisait absurdement la publication de tous les résultats obtenus par les différentes marques. Dans une saine logique de concurrence créatrice, on ne voit d’ailleurs pas pourquoi il n’y aurait pas, en Suisse (mais aussi ailleurs dans le monde), une nouvelle vague de multiples concours locaux de chronométrie (Genève, Besançon, Neuchâtel, Le Locle, Paris, etc.), chacun tentant de s’imposer sur tel ou tel créneau en faisant renaître ces Observatoires qui faisaient le sel de l’horlogerie traditionnelle... Renseignements : Club 44.
2)
••• LA PREMIÈRE GRIMPEUSE DU MONDE N’A PAS DE MONTRE
On devrait savoir aujourd’hui, demain ou ces jours-ci, sauf incident, s’il s’agit de l’alpiniste sud-coréenne Oh Eun-Sun, 44 ans, de l’Espagnole Edurne Pasaban, 36 ans, ou de l’Autrichienne Gerlinde Kaltenbrunner, 39 ans (elle grimpe sans oxygène). Elles sont toutes les trois à quelques centaines de mètres de l’exploit, dans leur quatorzième sommet, surtout l’Espagnole et la Sud-Coréenne. Avant elles, le premier homme à avoir conquis les quatorze sommets de cette planète répertoriés à plus de 8 000 m avait été l’Italien Reinhold Messner, en 1986. Pas un seul horloger suisse pour accompagner ces dames au sommet : cherchez l’erreur ! Trop machos pour être honnêtes ?
3)
••• UNE MODE DÉCONCERTANTE CHEZ LES JEUNES DESIGNERS HORLOGERS
Les plus ambitieux n’hésitent plus à créer des montres virtuelles pour les marques qui les intéressent ! Exemple récent : le Français Fabien Cacheux, 34 ans, qui a fait partie de l’équipe qui avait créé les montures TAG Heuer Sport Vision, et qui s’est décidé à dessiner deux « montres-hommage » aussi virtuelles qu’intéressantes. La première est un tourbillon central en titane imaginé pour la prochaine sortie de la Mercedes-Benz SLS AMG : plutôt bien vu pour un néophyte. La seconde est un clin d’œil à la nouvelle Galibier GT de Bugatti, avec un bracelet en fer à cheval dont les « cornes » rappellent les poignées de portière de la voiture et un boîtier qui fait allusion aux culasses en alu bouchonné chères à la marque (à découvrir sur son blog : lien sur son nom ci-dessus). Un « hommage » à Porsche devrait suivre. Bienvenue dans notre mundillo horloger, même si aucune marque ne lui a encore confié de mission...
4)
••• COUCOU, LE REVOILÀ !
Qui ? Jørgen Amundsen, l’ex-associé norvégien de Villemont, dont il animait la collection sportive grâce quelques interventions mémorables, dont une partie de baignade au pôle Nord pour démontrer le réchauffement climatique ! Fidèle à la mémoire de son ancêtre, l’explorateur polaire Roald Amundsen (conquérant du pôle Sud en 1911), il reste dans les grands froids en lançant Amundsen, une marque de prêt-à-porter d’inspiration sportive, à la fois technique et tendance, aux couleurs du drapeau norvégien et avec un « 1911 » identitaire qui marque la grande date de la tradition familiale. On parie qu’il y aura des montres dans les accessoires Amundsen ?
5)
••• LE TORCHON BRÛLE DANS LE PACS RALPH-JOHANN
Déjà bien fâchés avant le SIHH, Ralph Lauren et Johann Rupert (Richemont) sont maintenant à couteaux tirés ! Dernière pomme de discorde : le budget de leur joint-venture. Ralph Lauren a bien compris qu’il lui fallait maintenant accélérer le développement de la marque, notoirement en sous-effectif pour ses ambitions internationales. Il veut donc embaucher une quinzaine de personnes pour muscler son équipe. Problème : Johann Rupert et Richemont ne veulent plus investir au-delà de ce qui avait été budgété initialement. « 50-50, c’est 50-50 : pas un centime de plus. A M. Ralph Lauren de financer lui-même ses nouveaux projets de développement », précise-t-on à Bellevue, où le « boulet Ralph Lauren » commence à fatiguer tout le monde – surtout les petites marques du groupe pour lesquelles on mégote sur tout nouveau projet de renforcement...
6)
••• L’INITIATIVE SEPIATOWN
Le site SepiaTown a entrepris de restituer l’image du monde tel qu’il était (à l’aide de photos anciennes et de documents historiques, dans une logique coopérative) et non tel qu’il est (façon Google Maps). Une initiative qui manque à l’industrie horlogère, non seulement pour la physionomie de ses gens et de ses lieux, mais aussi pour les catalogues de montres : à quand une méga-base de données qui compilerait, en remontant le plus haut possible dans l’histoire, toutes les marques de toutes les montres ? Il n’existe aujourd’hui aucun archivage documentaire central des montres nées dans les années 1970-2000 (avant la numérisation), ni de leur environnement en communication (films promotionnels, dossiers de presse, études marketing)...
7)
••• L’AFFAIRE OMEGA-COSTCO PASSIONNE LE MARCHÉ AMÉRICAIN
Dans le procès Omega contre Costco (Business Montres du 21 avril, info n° 8), on voit maintenant monter en ligne des groupes de défense des consommateurs (en faveur de Costco et des prix écrasés), des associations de détaillants (même défense des prix libres) et même des plus « gros poissons » comme eBay ou Amazon, qui ont déposé des mémoires à l’intention de la Cour suprême américaine, qui statuera sur ce cas à l’automne prochain. Décision qui sera analysée à la loupe par les groupes de luxe européen : un feu vert à Costco (contre Omega) ferait voler en éclats l’actuel système de distribution sélective et enclencherait une vague de discompte sans précédent – dont une des conséquences immédiates serait de pousser les marques de luxe à organiser elles-mêmes leur e-business et leurs propres réseaux de boutique ! Le droit européen vient cependant de trancher en faveur des groupes de luxe contre eBay, pour le maintien d’une distribution sélective.
••• EUROPE DU LUXE CONTRE AMÉRIQUE DU DISCOMPTE : le match ne fait que commencer et il sera sans doute arbitré in fine par l’OMC de Genève, qui a toujours jusqu’ici défendu... la conception américaine de la liberté du commerce !
8)
••• LA MONTRE DES VRAIS AFICIONADOS
Elle s’appelle forcément... Toro Watch, elle est forcément espagnole et on y trouve forcément le célèbre profil en silhouette du taureau Osborne. Forcément, puisque c’est la marque horlogère du groupe Osborne, une des plus puissantes entreprises espagnoles dans les vins et les spiritueux. Devise horlogère très RJ : « Le temps et la légende unis » ! Les collections (300 points de vente en Espagne, distribution dans 16 pays) sont sportives, plutôt bien dessinées (pas de nom sur le cadran, juste le toro : tout le monde comprend), avec des tailles généreuses pas du tout Swiss Made (mouvements Miyota) et gentiment tarifées entre 100 et 300 euros (image ci-dessus : le chronographe Toro Steel Icono).
9)
••• LA FAUSSE ROLEX DE DEAUVILLE
Même si la ville en compte énormément de vraies le week-end, on s’y délecte avec cette histoire de fausse Rolex vendue aux enchères en mars 2008 : une Submariner « Royaume du Siam » (superbe blason thaïlandais sur le cadran), expertisée par Artcurial et authentifiée par l’expert Jean-Christophe Guyon (voir le catalogue de la vente, n° 140, sachant la montre était déjà passée aux enchères, toujours sur un catalogue Artcurial en 2007), puis vendue 11 500 euros. Montre déclarée fausse par Rolex, qui a demandé et obtenu sa destruction. Dommage, la Sub était bonne : c’est le cadran qui était bidouillé !
10)
••• « DÉBARRASSEZ-VOUS DE L’INUTILE ! »
Suite de la proposition : « The WatchHouse vous propose le rachat de vos montres de luxe ». Lesquelles semblent donc « inutiles » aux yeux des créateurs de The WatchHouse, une nouvelle maison spécialisée dans l’achat et la vente des montres haut de gamme (boutiques à Bruxelles et au Zoute, en Belgique). L’un de ces créateurs, Gilles Vanpelt, est même un fin limier capable d’en remontrer aux meilleurs spécialistes : « En plus d'être des mécaniques compliquées, les montres de luxe sont souvent des bijoux façonnés dans les matériaux les plus nobles et ornés de pierres précieuses. Leur commerce nécessite des connaissances qui dépassent largement la fiche technique du fabriquant ». Moyennant quoi, il déstocke des montres neuves ou quasi-neuves (boîte, papiers pour ces « occasions jamais portées ») à des prix qui rendraient sympathiques les habituels parallélistes de l’Internet horloger. Vous avez dit « inutile » ?
11)
••• UNE COURSE SUR LA GLACE EN PLEIN DÉSERT
On s’amuse comme on peut à Dubaï quand on y pratique la course de kart sur glace, sous la verrière du Dubaï Mall ! C’était ce week-end la toute première « course de glace » jamais organisée au Proche-Orient : organisée par Seddiqi, la TAG Heuer Ice Race était, en centre ville, réservée aux acheteurs d’une TAG Heuer au mois de mars. Engins entre les mains des pilotes : des karts électriques spécialement modifiés pour ne pas trop détériorer l’anneau de glace aux dimensions olympiques. Vainqueurs, sous les yeux de Son Altesse le Sheikh Mansour Bin Mohammed Bin Rashid Al-Maktoum : Anas Al-Halabi pour les hommes, Nicole Martinez pour les femmes, ont gagné une TAG Heuer.Une vidéo pour avoir une idée de l’ambiance de cette course (absente de l’agenda officiel du site TAG Heuer), mais aussi quelques questions sur la pertinence de l’événement. Dont celle de l’« empreinte carbone » de la manifestation : certes, le kart électrique est un bon point (encore que la recharge des batteries ne soit probablement pas solaire !), mais l’entretien d’un circuit de glace sous l’implacable soleil de Dubaï relève de la provocation eco-unfriendly, surtout pour le simple diverstissement de quelques clients...
12)
••• DAMIEN HIRST AU MUSÉE OCÉANOGRAPHIQUE DE MONACO
Etonnante présence de l’art contemporain au musée océanographique de Monaco, avec une dissémination de sculptures étranges et de peintures tout aussi surprenantes de Damien Hirst, un des dynamiteurs de l’art contemporain. A part son « bassin à requins » (qui ne relève pas vraiment de l’océanographie), aucun rapport a priori entre cette vision esthétique et la cause des océans chers aux souverains monégasques. Virgin Mother, la femme enceinte et nue à demi-écorchée à l’entrée du port de la principauté (Fontvieille), est particulièrement déroutante (10 m de haut !). L’ange en découpe organique – sauf le sex : mystère ! – n’est pas mal non plus. Il y a même un hommage pervers au bling-bling à travers la série des Cornucopia (« cornes d’abondance ») : dans le contexte monégasque, c’est assez gonflé ! Les familiers de l’artiste adorent ce type de provocation, mais on s’étonne qu’aucune marque d’horlogerie n’ait encore récupéré la fantastique énergie qui se dégage des 60 œuvres exposées de Damien Hirst : que fait Adam Lindemann et qu’attend-il pour nous proposer une Ikepod aussi disruptive que les carcasses anatomiques de Damien Hirst ? Ne serait-ce que pour un ultime clin d’œil aux 400 000 visiteurs attendus...
••• À PROPOS D’IKEPOD, UNE INJUSTICE À RÉPARER : la marque aurait largement mérité d’être citée parmi les maisons indépendantes qui ont bien tiré leur épingle du jeu (Business Montres du 22 avril). Sous la direction d’Alexandre David, Ikepod a multiplié son chiffre d’affaires par trois (en un an !), mis en place un réseau de distribution que beaucoup de « jeunes marques » lui envient et lancé un sablier (dessiné par Marx Newson) qui est déjà un best-seller du design avancé dans l’horlogerie contemporaine...
13 (à la douzaine, comme chez les bons fournisseurs)
••• NOUVEAU : LE BAROMONTRES HORLOGER DU MOIS D’AVRIL 2010
À ne manquer, vendredi prochain (dernier jour du mois), dans Business Montres : la météo de l’actualité horlogère d’avril (marques, montres, horlogers et dossiers chauds), avec un classement du beau temps vers la tempête, en passant par le variable. Une nouvelle initiative de Business Montres pour mieux décoder l’actualité et pour mettre en perspective les hommes et les faits du mois...
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