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Jean-François Ruchonnet décroche la suprêmerécompense horlogère : la prochaine montre Ferrari sera une Scuderia Ferrari One by Cabestan, soit une Cabestan reconfigurée selon les codes de la Scuderia et réservée à l’élite des meilleurs clients de la marque...
••• UNE « FERRARI-BRACELET » POUR LES DINGUES DU CHEVAL CABRÉ
A force de voir Jean-François Ruchonnet, le créateur de Cabestan, passer son temps à Maranello (ce n’était certainement pas pour y cueillir des champignons) et s’afficher dans la nouvelle Ferrari 599 XX (la bombe des bombes, une sorte de F1 déguisée en Gran Turismo de série), on se doutait bien qu’il y avait du contrat Ferrari-Cabestan dans l’air. Jusque)là, le créateur de la Cabestan ne roulait qu'en Lamborghini...
• Les lecteurs de Business Montres qui savent lire entre les lignes et déchiffrer les allusions s’en doutaient même plus que les autres depuis nos révélations du 3 mars (« Une marque de niche, exclusive, ultra-pointue sur le plan mécanique et aussi reconnaissable au poignet qu’une Ferrari 250 GTO sur la route ») et surtout depuis notre coup de projecteur exclusif sur les coulisses de la négociation (c'était le 29 mars, avec une info n° 6 qui a fait grincer quelques dents) ! La règle du jeu était malheureusement d’en dire le moins possible « dans un domaine très sensible où la moindre indiscrétion peut remettre en cause le contrat » (3 mars)...
• Donc, Luca di Montezemolo a tranché : ce sera Cabestan, mais ce ne sera pas vraiment une Cabestan comme les autres... D’une part, il s’agissait de développer pour les 60 ans de Ferrari dans la Formule 1 une montre réellement extraordinaire, qui ne ressemble à rien de connu et qui soit une sorte de « Ferrari-bracelet » (au sens de « montre-bracelet »), un peu comme un « bolide à porter au poignet ». C’est cette exigence que les marques qui ont démarché Ferrari ces derniers mois n’ont pas compris : il ne s’agissait pas, pour l’état-major de Maranello, de signer un énième contrat de licence pour une Ferrari by X ou Y, mais il fallait être capable d’imaginer un pur chef-d’œuvre de mécanique horlo-automobile, capable de faire plaisir de façon ultra-exclusive aux clients les plus exigeants de la marque [c’est-à-dire, à peu de choses près, les 150 ou 200 richissimes « fanatiques » du cheval cabré, collectionneurs frénétiques qui ont déjà beaucoup de Ferrari dans leur garage !]...
••• LES ÉPICES D'UNE PASSION PERSONNELLE POUR LA COMPÉTITION
A partir de là, le cahier des charges se simplifiait : il excluait les simples signatures sur le cadran tout comme les déclinaisons classiques de modèles connus. En plus d’une création hors pair dans l’esthétique comme dans la mécanique, il y fallait quelques épices supplémentaires, comme...
• Une exclusivité absolue [on ne peut pas dire que Cabestan soit une marque banalisée ou en voie de l’être]...
• Une passion automobile réelle et à l’épreuve de la compétition [pilote de course familier des grands circuits européens, Jean-François Ruchonnet avait quelques longueurs d’avance sur des prétendants plus « commerciaux »]...
• Un esprit non-conformiste capable de « penser out of the box dans tous les compartiments du jeu » [décalage qui faisait de « J.-F. » le candidat idéal]...
• Un réel savoir-faire horloger [le créateur de Cabestan a quelques beaux concepts sur son blason : voir ci-dessous]...
• Il n'y avait plus qu’à célébrer le mariage du style Cabestan – avant tout, une mécanique radicale comme le tourbillon vertical fusée-chaîne à remontage par manivelle – et des codes Ferrari. C’est l’équipe des designers de Maranello, emmenée par Flavio Manzoni, qui a pris les opérations en charge, sous le regard curieux mais très impliqué de Luca di Montezemolo. Ceci sans casser l’esprit de complication horlogère d’un mouvement dont le tourbillon a été rendu précis à la seconde par jour par Eric Coudray et son équipe...
• Concrètement, cela signifie une rafle dans les magasins de composants de la F1 Ferrari pour y trouver des matériaux qui sortent de l'ordinaire et qui ont permis de créer le boîtier (un alliage de titane très spécial), avec des citations de l’esthétique Ferrari dans tous les détails de la montre, un bloc central en composite de carbone, des inserts en alliage spécial de magnésium pour rappeler les crochets d’écrous des F1 rouges, un verre saphir très particulier dans l’esprit des moteurs « sous cloche » des coursières historiques de Ferrari, des chiffres (des tambours rotatifs en aluminium pour l'heure et les minutes) inspirés par ceux des informations de course au bord de la piste ou même l'Alcantara du bracelet dans l’esprit des sièges Daytona perforés que Ferrari proposait aux pilotes dans les années soixante...
• Soit une fusion assez magistrale du patrimoine génétique de Ferrari et des marqueurs identaires de Cabestan : une vraie Ferrari de quelques centimètres cubes, un pur produit de la Scuderia, mais à l’échelle micro-mécanique du savoir-faire horloger des grandes traditions suisses. Il fallait oser mettre ainsi en musique horlo-tourbillonnante le grand rêve Ferrari : Jean-François Ruchonnet et son équipe l’ont fait ! C’est une Cabestan, mais ce n’est plus une Cabestan. C’est une Ferrari qui donne l’heure, donc c’est plus qu’une Ferrari...
••• UNE ÉMOTION FRÉMISSANTE FACE À UN NOUVEL HORIZON HORLOGER
Pour Luca di Montezeolo, le jeune président de Ferrari, ce n’est pas un simple accessoire de plus : il insiste bien sur le fait que cette « Ferrari de poignet » a été développée pour les clients les plus exclusifs de la marque [dans les couloirs de Maranello, on parle d’une soixantaine d’exemplaires pour la première série]. Pour l'état-major de Ferrari, c'est manifestement le début d’une longue et passionnante collaboration avec Cabestan. Qui plus est, c’est une collaboration encore jamais vue auparavant : deux équipes ont œuvré à la production d’une vraie Ferrari avec un moteur Cabestan. Avec toute la passion, tout le culte de la performance et toute l’excitation qu’on attend d’une Ferrari...
• Flavio Manzoni, le directeur du design Ferrari, se montre tout aussi ému face à son nouveau bébé : il ne cache pas que la montre Cabestan l'a tout de suite inspiré et qu'il a su, dès le premier regard, qu'il y avait quelque chose de sensationnel à exploiter avec cette montre, à condition de réussir la symbiose de l’ADN de Ferrari et de de l'ADN de Cabestan. Pour lui, cette Scuderia Ferrari One by Cabestan est une Ferrari à part entière !
• Une montre qu’il faudra mériter, non seulement par son prix [toujours de source maranellienne, on parle déjà d'à peine moins du demi-million de dollars : quelques initiés de passage en Italie ont déjà passé commande], mais surtout par l’exclusivité de sa proposition, qui sera réservée aux Very Very VIP de la marque, et encore seulement à ceux qui la « mériteront » vraiment. Les autres ne pourront même pas la voir...
••• AU FAIT, ET LES AUTRES MONTRES FERRARI ?
Aucune décision n’est définitive à l’heure actuelle, mais il est probable que la réalisation de ces montres plus accessibles (une collection d’entrée de gamme aux alentours des 500-1 500 euros, avec du quartz et des chronos mécaniques) devrait être étudiée en interne par le bureau de design de la Scuderia – qui semble avoir pris goût à l’horlogerie – en liaison avec un opérateur spécialisé en Suisse. On devrait y retrouver les codes Ferrari, adaptés à ceux de l’univers horloger, pour la plus grande joie des tifosi passionnés de performances, d’émotions mécaniques et de chocs esthétiques...
• Pour la moyenne gamme, concept qui avait offusqué quelques marques suisses tentées par ce prestigieux contrat (disons qu'on travaillerait dans une fourchette de 3 000-6 000 euros), Ferrari devrait également procéder en interne, avec le même opérateur suisse, mais il n'est pas exclu qu'une marque parvienne à s'imposer dans la dernière ligne droite. Le dossier reste de toute façon ouvert...
• Pour ce qui est de la future Ferrari/Cabestan, le dessin ci-dessus, extrait d'un carnet de croquis encore virtuel et non définitif, donne cependant une idée intéressante de ce que sera la future Ferrari-bracelet : sur la base d'une architecture mécanique de type Cabestan, un boîtier monospace à bloc central en composite de carbone et verrière intégrale, avec des moyeux et des flancs resculptés, ainsi qu'un bracelet sportif ultra-ferrarisé et des multiples citations stylistiques qui enchanteront les collectionneurs de la marque (il y a néanmoins de fortes chances pour que le rendu final soit assez différent)...
••• UNE BELLE VICTOIRE DE JEAN-FRANÇOIS RUCHONNET, qui sonne aussi comme une revanche sur le petit monde de l’horlogerie, qui l’a plus souvent dénigré qu’encensé au cours de ses différentes aventures dans la montre (TAG Heuer Formula One, Monaco V4, Breguet double tourbillon, Zeitwinkel, Marvin, etc.)...
• Le voir ainsi remonter toute la file d’attente devant le bureau de Luca di Montezemolo, doubler les plus grandes marques et imposer sa vision de ce que doit être une montre à la hauteur de la marque Ferrari est aussi un motif de fierté pour toute la nouvelle génération horlogère.
• Il n’y a pas de fatalité dans la taille de la marque : il n’y a que des bonnes ou des mauvaises idées ! Le reste n’est qu’audace créative, mise en forme de rêves puissants et imagination sans restrictions superfétatoires.
• Il est particulièrement savoureux d'entendre le président de Ferrari évoquer en privé une « collaboration » entre la marque icône des circuits et un jeune horloger au poids économique insignifiant – de plus, sans la moindre histoire de « manufacture » antédiluvienne capable d’en légitimer les prétentions...
• C’est ce qu’on appelle un magistral « coup fumant » : on compte sur les doigts d’une seule main les opérateurs horlogers capables de boxer ici dans la même catégorie qu’un Jean-Claude Biver...
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