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Une promenade dans les allées de l’EPHJ (Lausanne)
 
Le 09-06-2010
de Business Montres & Joaillerie

Salon-clé pour l’amont des industries de la montre, l’EPHJ Environnement professionnel horlogerie joaillerie) est un des moments les plus forts du calendrier horloger.

Cette année plus que jamais !

Dans les couloirs de l’EPHJ,


ON A ZAPPÉ SUR...

1)
••• UN SALON DE LA RECONQUÊTE

Un peu plus de 500 exposants sur deux étages, dans une halle totalement remaniée, et un rendez-vous qu’aucun professionnel de la montre – qu’il soit fournisseur ou donneur d’ordres – ne voudrait manquer, parce que c’est là que bat, pendant quatre jours, le cœur de l’industrie horlogère. C’est la magie de l’EPHJ, qui rassemble aussi bien les machines-outils que les spécialistes des écrins ou de la PLV, c’est-à-dire la totalité des maillons de la chaîne.

• Une édition 2010 marquée cette année par moins de stress (la crise de 2009 n’est pas oubliée, mais digérée), ce qui ne signifie pas que les carnets de commande débordent, et par plus de détermination à survivre, ce qui ne signifie pas que tout le monde pourra le faire. Manifestement, la Première Crise mondiale a fait des dégâts (on remarque quelques absences), mais également stimulé les énergies créatives.

• Une évidence : les marques donneuses d’ordres ne prennent plus le moindre risque ! C’est maintenant aux fournisseurs d’assumer – à leurs risques et périls – l’effort de recherche et de développement de nouveaux produits ou de nouvelles idées. D’où la floraison des initiatives pour un salon qui reste plus que jamais celui de la reconquête, sinon celui de la renaissance.



2)
••• UNE EXPLOSION DES MANUFACTURES DE MOUVEMENTS

On compte cette année à l’EPHJ une bonne quinzaine de propositions de mouvements alternatifs aux grandes manufactures spécialisées (ETA, Sellita, Soprod, etc.). Plusieurs de ces nouveaux acteurs travaillent directement à leur propre échappement, production de spiraux comprise (là, on doit rester plus discret par peur des représailles de « Qui vous savez »). Parmi les initiatives les plus intéressantes (par ordre alphabétique) :

• ASXP (PHILIPPE RUEDIN) : il a créé sa propre marque (MAR), mais il termine aussi la mise au point du mouvement automatique qu’il a conçu (ça commence à bien « tourner ») et qu’il mettra à la disposition de plusieurs jeunes marques...

• CENTAGORA : pas encore de vraie référence présentable pour cette équipe de concepteurs-constructeurs des Geneveys-sur-Coffrane, , qui s’annonce spécialiste des rouages non-circulaires (ils ne sont pas les seuls) et de l’accompagnement des marques dans leurs innovations.

• DIMIER : opérationnelle à Tramelan, la manufacture de Pascal Raffi (Bovet Fleurie) est venue présenter à l’EPHJ (c’est une première) son travail en termes de mouvements (exclusivement du très haut de gamme : rien au-dessous du tourbillon, même si on annonce pour l'an prochain un « tracteur » automatique) et surtout de spiraux (production autonome).

• IMH (Innovations Manufactures Horlogères) : cette équipe du Locle a déjà quelques réalisations à son actif (Hautlence, Perrelet, etc.), plusieurs calibres développés à la disposition des marques (tourbillon, chronographe monopoussoir, etc.) et une spécialité, le titane (avec plusieurs innovations qu’on attend avec impatience)...

• MAGMA : l’équipe de Cédric Grandperret dispose à présent d’une base de tourbillon (entièrement produite à côté de Genève), qui devrait bientôt évoluer vers une base automatique et quelques variantes, en plus de développements qui permettent de personnaliser n’importe quel mouvement (non seulement le dessin des ponts, mais également la taille du calibre, qui peut passer de 13 à 16 lignes)...

• MANUFACTURE DES FRANCHES-MONTAGNES : on retravaille ici des bases mécaniques Unitas (16 lignes et demi), avec d’importants développements côté modules additionnels et, surtout, des propositions intéressantes pour la décoration ou le squelettage...

• REGENCE : une équipe genevoise qui ne fait pas que des composants horlogers (elle les fait de toute façon très bien, pour les meilleures manufactues) et qui a, en plus de grandes ambitions, quelques calibres surprises dans ses tiroirs, mais il faut insister et demander très poliment...

• TELL WATCH : un logiciel aux fonctionnalités cinématiques parfaites, c’est bien. Un vrai mouvement, c’est mieux ! Surtout pour démontrer le savoir-faire dans la conception, le développement et la mise au point d’une chaîne de composants. TellWatch (Polysoft Tell) propose donc un « calibre de démonstration » qui n’est pas simple : chronographe automatique monopoussoir à minutes rétrogrades, dont on s’aperçoit qu’il est non seulement fonctionnel, mais modulable, plein d’innovations (masse extérieure circulaire, absence de platine) et surtout bourré de talent. Business Montres y reviendra prochainement...

• TELOS : les créateurs de la Montblanc Metamorphosis ou de la Dior Chiffre rouge 8 fuseaux horaires (révélation Business Montres du 4 mai) ont beaucoup de choses à dire pour imaginer des mouvements « qui bougent bien » et qu’on remarque au poignet...

• VAUCHER MANUFACTURE FLEURIER : c’est toujours un peu pathétique de voir une « grande manufacture » qui revendiquait un statut d’exclusivité haute horlogère venir faire la « retape » dans un salon comme l’EPHJ, surtout avec une offre qui continue à être inadaptée en termes de taille et de prix (Business Montres du 3 mai, info n° 10). Mettre une Richard Mille en vitrine ne suffit pas à étayer les prétentions d’une maison qui a perdu ses repères et son identité, mais qui a heureusement pour elle d’être placée sous la responsabilité d’un « Himalaya de la pensée horlogère »...



3)
••• UNE NOUVELLE RÉVOLUTION DANS LES BRACELETS

Longtemps considéré comme le maillon faible de la qualité (c’était un scandale dans certains grandes manufactures), le bracelet et désormais traité en composant stratégique, tant pour son impact visuel sur le client final que pour ce qu’il peut apporter pour compléter le concept de la montre. Quelques propositions intéressantes :

• AJS : pourquoi payer trop cher ses moules pour ses bracelets en caoutchouc quand on peut se contenter de les... graver ? AJS (Porrentruy) propose un système original de décoration indélébile sur caoutchouc (on congèle le matériau pour le fraiser et lui intégrer la « peinture » qui le décorera). Effet assez saisissant pour des petites séries : certains font graver le dessin de leur pneu préféré, d’autres leur logo ou même des images. Un procédé innovant très amusant et relativement économique...

• BIWI : tout ce qu’on a pu et qu’on pourra faire dire au caoutchouc, Biwi le fera. Pour cette année, on remarque une offre innovante pour l’intégration céramique/caoutchouc (VulcaCeram), avec des superbes effets de matière et de contrastes. Esthétique gagnante pour le Vulcolor qui permet d’intégrer (en positif ou en négatif) deux motifs de couleurs différents sur un même bracelet, sans discontinuité dans la matière. Amusant : le caoutchouc nacré ou métallisé. Arrivée sur le marché des bracelets en Kalrez (le caoutchouc le plus cher du monde, préempté avant même sa sortie par Richard Mille, mais désormais accessible à d’autres marques) et des bracelets en Vulcateather (cuir et caoutchouc). Prometteurs : les nouvelles générations de caoutchouc translucide (on imagine les gainages), la technicité de ce qui serait un mix kevlar/caoutchouc ou le caoutchouc thermochromatique (qui change de couleur selon la température). Et quelques innovations dont il sera temps de parler... en 2011 !

• LIC : le spécialiste belge du bracelet innove cette année avec son alligator nubucké, qui donne un toucher très doux et des reflets mats aux écailles, tout en permettant de nouvelles nuances de couleurs. De quoi démoder définitivement le méchant « croco noir brillant » qu’on nous a infligé pendant trop d’années !



4)
••• UNE RAFALE D’INNOVATIONS CÔTÉ COMPOSANTS

Il est devenu clair que l’initiative est désormais du côté des manufactures de composants ou de mouvements : à elles de prendre les risques à la place des marques ! D’où une explosion de propositions intéressantes, qui relancent la mise dans tous les compartiments du jeu (toujours par ordre alphabétique) :

• IMA-Arc (Institut des microtechnologies appliquées) : on les savait spécialistes des rouage non-circulaires (ils en ont développé les équations « qui marchent » et ils travaillent à présent sur des profils de dentures non-conformistes, avec des effets visuels épatants), mais on les découvre innovateurs dans le laser, avec un traitement du cadran qui peut permettre de détecter les faux grâce à un simple rayon laser. En frappant avec un rayon laser la surface du cadran (qui a été « structuré » de façon invisible pour réfléchir la lumière d’une façon ordonnée), on dessine en lumière une sorte de logo virtuel qui peut ou non authentifier la montre. Facile à mettre en œuvre et spectaculaire...

• MIMOTEC : on en est désormais à intégrer directement des pierres dans les pièces produites selon le procédé UV-Liga (croissance galvanique). Simplification des opérations d’empierrage et surtout ultra-précision dans le positionnement des axes : de quoi améliorer encore l’exactitude d’un mouvement horloger...

• MPS : des roulement à billes sans lubrification (procédé x-myrox en première mondiale), une terminaison inaltérable sur les roulements visibles (y compris des mises en couleur attrayantes : procédé microcolor) et des finitions étonnantes, des roulements unidirectionnels, une réserve de marche innovante et compacte, de quoi rendre superbe ce qu’on peut voir à travers un fond saphir !

• PYLANIA : les cadrans disent merci au procédé Triple L Luminova (« Long, Lasting, Legibility »), qui leur permet de briller encore plus longtemps dans la nuit, avec un système muti-couches qui peut atteindre les 200 microns...

• TROIS HERZ : la gravure laser en 3D offre de fantastiques possibilités de décoration, puisque le laser, finement maîtrisé et guidé par une nanocaméra, sculpte littéralement la matière pour créer des sortes de bas-reliefs aux effets visuels saisissants. On imagine le potentiel pour des rotors en 3D ou des cadrans qui ressembleraient à des frises de l’Antiquité grecque. L’horlogerie hésite aujourd’hui entre hypercomplication (les « ovnis ») et hyperdécoration (les « métiers d'art ») : Trois Herz a dégainé une arme fatale pour réconcilier créativité et technicité !



5)
••• UN SURSAUT CRÉATIF DANS LA PRÉSENTATION

Concevoir, construire, terminer des montres, c’est bien. Il ne reste plus qu’à les présenter avec la même créativité. Manifestement, les écrins n’ont pas encore fait leur révolution, mais quelques maisons s’y emploient, alors même que les nouvelles technologies s’apprêtent à bouleverser l’information visuelle sur les montres :

• OPAL CRÉATIONS : le plus bluffant des écrins horlogers s’ouvre grâce à une reconnaissance d’empreinte digitale, il se déploie en jouant sur les lumières et la transparence de son cube et il s’élève dans l’air pour présenter la montre. C’est très cinématographique, mais c’est un complément indispensable à toute grande complication qui se respecte [image ci-dessus : le coffret avec le module de présentation déployé et la « tirette » d'identification digitale ; tout redevient un simple cube en fin d'opération]. Egalement cette année : une nouvelle collection de coffrets en « marqueterie de paille », un procédé fétiche pour les décorateurs des années trente. Il s’agit de créer des effets géométriques et chromatiques avec la fibre de fétus de seigle recomposés : spectaculaire !

• RTC (Real Time Concept) : la technologie tactile en 3D développée par Nicolas Ruchonnet tient ses promesses (Business Montres du 3 juin). Sa présentation sur le stand Pibor est stupéfiante d’efficacité et d’ouverture sur de nouveaux champs d’exploration pédagogiques ou graphiques. Les images obéissent au doigt pour mieux séduire l’œil : on redécouvre les composants horlogers comme on ne les avait a jamais imaginé. C’est une vraie révolution dans la transmission du savoir horloger, aussi bien entre professionnels que vis-à-vis du grand public. La génération iPad a trouvé ses magiciens !

• SICT : une nouvelle vague d’écrins à système d’ouverture mécanique complexe, c’est-à-dire autrement qu’en poussant un bouton. Si on admet que les montres sont des « jouets de garçon », il faut que l’écrin – aujourd’hui très peu valorisé, sinon négligé par les marques (à quelques exceptions près) – reflète le même parti-pris technologique ou esthétique que la montre, et donc qu’il en accentue l’esprit mécanique. Vivement la fin du traditionnel bois exotique verni-garniture de cuir : les écrins doivent redevenir un atout créatif de première importance !

 



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