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Et une marque de plus au tapis !
Les Américains du groupe Timex avaient rêvé d’un pôle suissede haute horlogerie : ils ont tenté le coup avec Vincent Bérard.
Erreur de stratégie, surtout en temps de crise...
1)
••• LES AMÉRICAINS JETTENT L'ÉPONGE
Aussi sympathique et dévoué soit-il, Herbert Gautschi n’aura pas réussi à convaincre les dirigeants du groupe Timex de tenir bon dans la tempete. Nommé CEO après avoir piloté la reprise de Vincent Bérard par les Américains en 2006, il n’a pas vraiment failli à sa mission, même si sa principale erreur reste d’avoir cru qu’un groupe positionné dans l’entrée de gamme pouvait avoir la moindre affinité avec la très haute horlogerie exclusive qui était le positionnement de la marque Vincent Bérard.
• Question de « culture » sans doute : une marque de haute horlogerie ne se construit pas comme une licence de mode ! Quand on gagne beaucoup (beaucoup !) d’argent avec Guess et d’autres licences, on peut se permettre une « danseuse » comme Vincent Bérard, mais c’est prendre le risque de voir sacrifiée la « danseuse » aux premières bourrasques de mauvais temps. Les groupes américains n’ont jamais développé la vision à long terme indispensable pour bâtir une entreprise pérenne dans la haute horlogerie. Côté américain, pas de commentaires pour l'instant, ni pour confirmer, ni pour démentir, mais on sait que la famille Olsen, propriétaire du groupe Timex, a encaissé de plein fouet la récession américaine...
2)
••• ROLLING STONE N'AMASSE PAS MOUSSE
On ne peut pour autant exonérer l’équipe de Vincent Bérard de toute responsabilité dans une aventure qui se termine mal. Un mouvement presque « manufacture » intéressant et innovant n’a jamais suffi à justifier un positionnement, surtout quand l’habillage de ce mouvement n’a rien d’innovant, ni même d’excitant. Il faut s’appeler Richard Mille pour imposer un retour à la montre de poche nouvelle génération (les Quatre saisons de Vincent Bérard ne dégageaient pas la moindre émotion) et il faut être un peu naïf pour imaginer qu’une montre-bracelet vaguement baroque séduira les amateurs (surtout en pleine repolarisation du marché, tantôt vers le classique qui rassure, tantôt vers le conceptuel clairement assumé)...
• Quelques bobos ont dû trouver sympathique que l’ancien Rolling Stone Ronnie Wood commande une pièce unique, mais il n’y avait pas de quoi en asseoir une stratégie marketing. De même, la démarche haute horlogère très enracinée dans une ferme des hauteurs de La Chaux-de-Fonds demandait un peu plus de consistance que l’air de la campagne : quelques sapins n'ont jamais suscité le waooh effect qui fait craquer pour les jouets de garçon...
• Le segment de la haute horlogerie nouvelle génération a été très encombré, mais il s'éclaircit à vue d'oeil : il y faut désormais beaucoup de sang, de sueur et de larmes (c'est-à-dire du travail et de l'émotion) – mais surtout beaucoup de passion, de sincérité et de pertinence – pour espérer pouvoir un jour tirer son épingle du jeu. Un jour... Pas aujourd'hui, ni demain, mais dans un certain temps – et les Américains sont d'une nature impatiente et vorace !
3)
••• LA LISTE FATALE S'ALLONGE...
Au final, quel gâchis : beaucoup d’argent gaspillé en vain, un jeune horloger plombé en plein ciel, une équipe dispersée alors qu’elle n’avait pas démérité et quelques fournisseurs ou détaillants « plantés » – comme d'habitude : il faudra maintenant ajouter un sixième nom à la liste des avis de décès de la Première Crise mondiale, liste qui devrait s'allonger entre le début et la fin de l'été (Business Montres de ce matin 16 juin, « question bête » n° 10).
• Vincent Bérard est malheureusement la première marque membre de la Fondation de la haute horlogerie à sombrer corps et biens...
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