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Il y a quelques jours, la HM n° 4 de Max Busser explosait les codes horlogers.
La Christophe Colomb de Jean-Frédéric Dufour (Zenith) ouvre une troisième voie entre les concepts totalement décalés et les classiques créativement recalés : voici venu le temps de l’horlogerie sous globe !
1)
••• UN TOURBILLON MULTI-AXES SOUS GLOBE
« Allons-nous vers une horlogerie globulaire », se demandait Business Montres le 28 juin (info n° 6). On y évoquait assez clairement un « tourbillon multi-axes sous globe » : il s’agissait évidemment de la nouvelle Zenith Christophe Colomb, montre grâce à laquelle Jean-Frédéric Dufour nous prouve qu’il veut (re)découvrir et explorer de nouveaux continents. A sa manière, c’est-à-dire sans emphase fracassante, mais avec la touche de classic with a twist qui signe sa personnalité.
• Tout le monde se souvient de la Zenith Zero-G, extravagant concept gyro-gravitationnel lancé en 2008 par Thierry Nataf, avec un design qui ne rendait hélas pas hommage à l’ultra-complication d’un mouvement à rouages non conventionnels. Jean-Frédéric Dufour a repris le « bébé », mais en le rhabillant d’une livrée d’apparence classique dont le double dôme du tourbillon vient démentir la fausse évidence. Monté sur des cardans comme un chronomètre de marine (du temps de la Marine en bois), le tourbillon multi-axes (organe régulateur de la montre, qui affiche l’heure sur son cadran à 12 h) a été placé dans une sorte de bulle proéminente sur le verre saphir au dessus du cadran comme sous le cadran.
• On renoue ainsi intégralement avec la tradition de la montre de marine, dont Zenith est longtemps resté un des spécialistes suisses. L’échappement reste toujours horizontal, quel que soit la position de la montre. L’idée des cardans s’est simplement transposée au poignet, sans perdre son efficacité chronométrique, mais en acquérant au passage une indéniable efficacité spectaculaire. On laissera ici les érudits discuter sur la nature réelle, virtuelle ou purement visuelle de ce « tourbillon » tri-dimensionnel [très « tourbillonnant », quoiqu’il en soit], sur lequel nous reviendrons ultérieurement avec les schémas techniques utiles pour éclairer ce débat...
• Reste cette étonnante montre bi-hémisphérique, qui sait demeurer portable au poignet, tant par la taille relativement modeste de son boîtier (45 mm à peu près) que par sa minceur, à peine surlignée par ces deux dômes qui ne gênent absolument pas, ni dessus, ni dessous. Waow effect garanti : le jeu de l’ancre et du balancier attisent en permanence la curiosité et hypnotisent le regard...
2)
••• L’AVÈNEMENT D’UNE NOUVELLE GÉNÉRATION CLASSICO-CONCEPTUELLE
Entre les plus ébouriffantes montres « conceptuelles » (MB&F, Urwerk, Hautlence, etc.) et les parangons vestalisés du style classique, Jean-Frédéric Dufour s’inscrit dans une nouvelle tradition, à l’orée d’un terrain que De Bethune a commencé à défricher : c’est la voie d’un rétro-futurisme néo-classique, d’autant plus intéressant qu’il jette un pont entre les grandes traditions de l’horlogerie mécanique et les avancées contemporaines des beaux-arts de la montre.
• Zenith ne pratique pas ici un quelconque « retour au classique » (« Back to the Roots »), mais dépasse, au contraire, les frontières du monde connu pour laisser son imagination courir vers d’autres univers. En inventant pour l’occasion une « cage » de 166 composants, dont 10 pignons coniques et 6 roues sphériques qui défient les lois de la tribologie horlogère (du moins, les lois qu’on croyait connaître). En 36 000 A/h (5 Hz), avec la légendaire précision de la base El Primero, on n’est pas loin de l’arme chronométrique absolue. Et du cas d’école marketing pour l’habileté du repositionnement conceptuel...
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