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L’horloge du temple des Pâquis est figée depuis 5 ans
 
Le 18-08-2010

La petite aiguille s’est arrêtée sur le chiffre 3, la grande lui a rajouté une demi-heure.

Bref rappel historique. L’arrivée de Jean Calvin à Genève coïncide avec une conception nouvelle du temps, dont il ne cesse de marteler l’influence dans ses sermons. Il faut, répète-t-il, «rendre compte au Seigneur de chacune des minutes de l’existence». Cette consigne d’horloger spirituel, les amateurs de théâtre l’ont entendue la saison dernière aux abords du temple de Saint-Gervais, à l’occasion d’un spectacle fort opportunément intitulé Le maître des minutes.

C’est un autre spectacle qui se donne à voir chaque jour sur la façade du temple des Pâquis. D’un quartier à l’autre, la consigne s’écoute différemment. Ou pas du tout. L’horloge, ici, s’est figée dans une drôle d’éternité. La petite aiguille s’est arrêtée sur le chiffre 3, la grande lui a rajouté une demi-heure. Les deux font la grève du temps qui passe. Pour l’insomniaque, il est toujours 3h30 du matin; pour l’amateur de sieste, la sienne commence et se termine toujours à 15h30.

Depuis quand, si l’on peut dire, cela dure-t-il? Depuis que l’employée du proche bureau de change travaille derrière son guichet. «Je suis arrivée peu avant 2005, raconte-t-elle. Je n’ai jamais vu l’horloge indiquer la bonne heure. Moi, ça me convient: on a le sentiment de ne pas vieillir. Je n’ai jamais entendu l’un de mes clients se plaindre. De vous à moi, la première vocation d’un temple n’est pas forcément de donner l’heure.» Soit. Celui des Pâquis œuvre, il est vrai, dans un fuseau horaire plus caritatif: les gens qui viennent manger la soupe populaire savent par cœur le jour et l’heure de sa distribution.

Août n’est pas le meilleur mois de l’année pour résoudre l’énigme de ces deux aiguilles grévistes. Le temple est actuellement fermé. «Rendez-vous en septembre», précise le mot sur la porte. Hier mardi, un seul homme avait la clé d’entrée, mais c’était «pour régler les antennes Swisscom situées sur le toit». L’horlogerie à l’ancienne, ce n’est pas son affaire.

L’affaire concerne la Ville de Genève qui gère un parc d’une quarantaine d’horloges publiques. Sitôt une panne signalée, elles sont déposées et remises à l’heure, comme ce fut le cas il y a quelques années de la pièce accrochée au-dessus de la plaque Henri-Fazy, à l’angle de la rue éponyme et de la Grand-Rue.

Cette vigilance municipale ne concerne pas, en revanche, les horloges des édifices religieux. «On se charge du contrôle du carillon, pour autant que le carillon soit laïque. Celui de Saint-Pierre est ainsi sous notre responsabilité», indique Philippe Meylan, chef du Service des bâtiments au Département des constructions et de l’aménagement. La nuance est de taille comme l’écart temporel qui, chaque jour et chaque nuit, fait changer de continent en passant simplement à pied devant le temple des Pâquis.
Thierry Mertenat

Tribune de Genève

 



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