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Loin de la clinquante quincaillerie bling-bling et de l’assommante dictature des composites à base de plastique, c’est l’éternel retour du plus écolo-chicet du plus néo-luxe des nouveaux matériaux : le bon vieux papier !
A méditer avant les salons horlogers : trois propositions de créateurs qui changent notre regard sur la place du papier dans le nouveau luxe...
••• PLIAGE, ENRUBANNAGE ET DÉCOUPAGE SONT-ILS L’AVENIR DU LUXE ?
Alors que le papier découpé est un des beaux-arts de la tradition décorative suisse (les fameux canivets), l’horlogerie a fini par céder aux sirènes du luxe et par abandonner le papier dans sa communication, au profit de matériaux synthétiques sans âme et de piteuses dorures bling-bling... On voit pourtant se profiler un retour au « papier de luxe » et à l’usage du papier comme support d’une communication de prestige adaptée aux nouveaux codes sociétaux du haut de gamme. Quoi de plus chic qu’un matériau écologique que tout le monde avait oublié et quoi de plus « pointu » qu’un message dont le médium prouve en lui-même une volonté de repenser chaque détail sans conformisme ?
••• Sans parler du fait que, dans les pays asiatiques (Chine et Japon, notamment), l’art du papier est une discipline artistique majeure, dont les codes culturels parlent instantanément à tout le monde : les jianzhi chinois sont attestés depuis 2 000 ans et les kirigami japonais remontent aux origines de la religion shinto.
••• C’est précisément du Japon que nous arrive les productions de l’atelier Ribbonesia, qui nous font reconsidérer tout ce que nous avons pu croire sur la banalité du ruban (papier ou tissu) qui entoure un paquet cadeau. Le pliage et l’enrubannage atteignent ici aux limites du sublime dans l’extrême raffinement (image ci-dessus) d’une simplicité trop modeste pour ne pas être ultra-recherchée. On est exactement dans les paradigmes du nouveau luxe, dans l’attention portée aux détails apparemment invisibles, mais en réalité décisifs pour l’image de marque.
••• ON IMAGINE FACILEMENT CE QUE LE DESIGNER BAKU MAEDA, animateur de l’équipe Ribbonesia, pourrait nous fournir si une manufacture de montres avait la bonne idée de le mobiliser sur un projet horloger...
••• Avec la créatrice (française d’origine russe) Anastassia Elias, on ne quitte pas le papier, mais on passe au carton + papier découpé, matériaux dans lesquels elle reconstitue – comme en 3D – d’étonnantes scènes de la vie quotidienne : ses « rouleaux » [une sorte de « tunnel » pour assurer, en perspective, des tableaux qui restituent un univers contemporain, mais néanmoins onirique] feraient d’excellentes saynettes de la vie d’un atelier horloger si on lui en donnait l’idée. Comme elle sait nous raconter – en quelques centimètres de silhouettes découpées – des scènes sportives ou familiales, pourquoi pas une présentation de nouveautés ?
••• LÀ ENCORE, ON SE PREND À RÊVER D’UNE COMMUNICATION réellement poétique quoiqu’impeccablement horlogère sur la base de ces « rouleaux » d’une parfaite maîtrise artistique...
••• On traverse la Manche pour s’intéresser aux découpages de Sam Drury (Londres), un virtuose qui semble à peu capable de recréer n’importe quel univers en papier découpé, qu’il s’agisse de chaises, de linge à sécher ou de typographie. Son studio travaillant de façon artisano-industrielle [au laser, tout de même !], c’est un immense champ d’explorations conceptuelles et graphiques qui s’ouvre pour des horlogers qui voudraient relier leur héritage suisse à leur souci de casser les actuels codes surannés du luxe.
••• ÉVIDEMMENT, IL FAUT OSER, MAIS CETTE SCIENCE DU DÉCOUPAGE mérite d’autant plus l’attention qu’elle peut prendre n’importe forme d’expression esthétiques et réellement refonder l’art de parler (ou de montrer) des nouveautés horlogères...
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