|
Les CEO valsent et les ambassadeurs échangent leurs maillots : le tout est qu'il nous reste quelques belles montres à se glisser au poignet !
CETTE SEMAINE, LE SNIPER DU VENDREDI A…
1)
••• RESSENTI L’IMPACT BRUTAL
DE LA « FACE OBSCURE DU SCANDALE DES BIJOUX EN OR »…
Emission-choc de la Télévision suisse romande, hier soir, avec une véritable commotion au sein de la communauté horlogère, qui a immédiatement fait le lien avec l’ouverture récente du dossier des « reptiles de la honte » (alerte récente : Business Montres du 12 octobre, info n° 1). L’émission « Temps présent » a cette fois enquêté sur la provenance de l’or dont on fait les bijoux : « La face cachée d’un scandale ». Enoncé très clair : « Alors que l’on insiste pour des fruits ou des t-shirts “éthiques“, l’or échappe, lui, à tout contrôle sérieux ». C’est très exactement le genre de « signaux faibles » dont Business Montres estime régulièrement qu’ils sont révélateurs ou annonciateurs de séismes sociétaux capables d’avoir un impact décisif sur les industries de la montre…
• ARGUMENT DE L’ÉMISSION : « De vastes étendues rendues désertiques par l’abattage des arbres. Des rivières infectées par de fortes doses de mercure qui rentrent dans la chaîne alimentaire. De véritables zones de non-droit où règnent la violence et tous les maux d’une société ravagée par la pauvreté et l’appât du gain rapide. Telle est la réalité de l’extraction minière au Pérou, où une équipe de “Temps Présent“ s’est rendue. Pas facile de filmer dans un tel contexte où les caméras de télévision ne sont pas les bienvenues. C’est du Pérou que vient une grosse partie de l’or importé en Suisse et vendu dans les bijouteries. Peu de bijoutiers d’ailleurs savent dans quelles conditions leur marchandise est produite. De grosses fonderies helvétiques, liées aux banques, restent discrètes. Il y a bien la volonté de mettre un label sur cet or sale, de vérifier qu’il soit produit dans des conditions “éthiques“, mais ces tentatives n’en sont qu’à leurs premiers balbutiements ».
• REDIFFUSION : ce vendredi soir, à 1 h, et lundi 8 à 15 h 35 sur TSR2 (ainsi que sur Internet : lien ci-dessus). Le débat est en tout cas ouvert au sein de la communauté horlogère, qui attend de la FH et des autorités de la branche un minimum de réactivité sur un sujet au moins aussi explosif que celui des « reptiles de la honte » : quand on commence à questionner l’or dont sont faites les montres, sa provenance et son caractère « éthique », c’est une question d’éco-responsabilité collective, donc de prise de position collective. Assez de vœux pieux mollassons ou de vagues intentions pseudo-unanimistes, de l’action ! A suivre…
2)
••• RISQUÉ UNE PENSÉE ICONOCLASTE À PROPOS DES NOUVELLES HUBLOT KING POWER ET DE BRUNO SENNA…
De plus en plus « brutales » et spectaculaires par leur esthétique extrême, sinon ultime, les nouvelles King Power récemment dévoilées par Hublot ne sont-elles pas en train de recréer et d’occuper le segment d’offre horlogère ouvert voici quelques années par Zenith ? Créneau refermé à la faveur de la crise, en même temps que la porte était claquée au nez d’un Thierry Nataf dont Jean-Claude Biver serait – volens nolens et pour une partie de sa collection – l’exécuteur et réinterprétateur testamentaire. Réflexion iconoclaste, que certains dévots estimeront sacrilège, mais qui s’appuie sur une réelle parenté stylistique (design et matériaux) et sur une démarche de rupture, assumée avec plus d’habileté médiatique, de roublardise marketing et de crédibilité personnelle par Jean-Claude Biver...
• IL SUFFIT DE REGARDER cette série limitée de King Power Ayrton Senna (48 mm), récemment lancée au Brésil, pour se poser la question et comprendre l'analogie. Il est vrai que ces modèles-hommages sont exclusivement destinées au marché brésilien, où les amateurs préfèrent les montres plus... démonstratives et bien gorgées de testostérone. Chanceux [ou malin] comme il l’est, Jean-Claude Biver s’offre le luxe d’annoncer ce partenariat au moment où son nouvel ambassadeur, Bruno Senna, le neveu d’Ayrton Senna, se voir offrir un volant chez Lotus (écurie autrement plus prestigieuse que son actuelle équipe espagnole, Campos Meta)...
• UNE RÉFLEXION EN ENTRAÎNANT UNE AUTRE, on peut aussi se demander s’il n’y a pas un risque potentiel de conflit d’intérêt entre une marque qui se pose en « chronométreur officiel » du championnat de F 1 [c’est à peu près le statut de Hublot] et la même marque qui sponsoriserait un champion automobile dont le titre dépendrait de ce « chronométrage officiel ». La question n’est pas triviale : elle s’est posée quand Omega, partenaire commercial du nageur champion Michael Phelps, a permis à celui-ci de conquérir une mémorable, historique et inestimable huitième médaille d’or sur la seule foi d’un millième de seconde chronométré par… Omega ! A l’époque, en pleins JO (24 août 2008), Business Montres avait été le seul média horloger à oser souligner ce risque. Il avait été prouvé, un an plus tard, que le concurrent serbe de Michael Phelps avait effectivement effleuré le premier la « plaquette de touche » Omega ! Le même conflit existait du temps où TAG Heuer chronométrait la F1 en étant co-partenaire d'une des équipes du championnat. Tout en soulignant à quel point il serait absurde d’imaginer un Stephen Urquhart, président d’Omega, ajoutant un millième de seconde au temps de son poulain nageur, on ne peut envisager un coup de pouce de Jean-Claude Biver au jeune Bruno Senna, mais la question du conflit d’intérêt n’en reste pas moins posée…
3)
••• DOUTÉ DU RÉALISME D’UN NOUVEAU CONCEPT D’ENCHÈRES EN LIGNE…
Tout le monde le sait : le roi des enchères en ligne, c’est eBay, même si ces enchères sans marteau sont une malédiction moderne qui a pris la place des traditionnels « marchés aux voleurs » qu’on trouve dans toutes les capitales du monde, y compris dans les mégalopoles européennes. Trois commissaires-priseurs [priseuses ?] parisiennes, Elodie Froger, Virginie Pillon et Caroline Bession d’organiser des « vraies » enchères en ligne, uniquement pour des produits de luxe (dont des montres) et dans le respect des dispositions réglementaires qui s’imposent aux maisons d’enchères françaises et qui font de celles et ceux qui tiennent le marteau des « officiers ministériels » : les enchérisseurs bénéficieront donc de l’expertise de l’« étude » Lacparis, d’une garantie quinquennale sur les objets vendus (donc d’une quasi-certitude sur leur authenticité) et de tout un environnement législatif supposé encadrer les adjudications. Une vente thématique mensuelle est prévue dans chaque grande catégorie de biens de luxe (bijoux, mode, maroquinerie, accessoires, etc.), en parallèle à des ventes « physiques » traditionnelles (en salle) pour quelques objets d’exception…
• SUR LE PAPIER, l’idée tient la route : on ne peut que se féliciter de tout ce qui peut moraliser une foire d’empoigne à la eBay et réassurer les amateurs. Dans la vraie vie, c’est un peu différent. En ligne, il manquera, d’une part, l’adrénaline du marteau et des « aboyeurs », ainsi que le contact physique avec les objets que procure chaque exposition : on pourra voir les pièces et passer des ordres, mais ce sera sur rendez-vous, compliqué et aléatoire – s’il faut se déplacer pour « tâter » la marchandise (et il faut le faire pour des montres, un sac ou des chaussures, à moins d’avoir totalement confiance dans l’« auctioneer, autant faire des ventes classiques.
• D’AUTRE PART, on ne peut que s’inquiéter de la quantité hallucinante de vraies-fausses montres en circulation : même les experts spécialisés s’y trompent et ces forgeries commencent à envahir les catalogues des maisons les plus réputés [voir les nombreux articles de Business Montres à ce sujet]. Même constat pour les articles de mode (surtout dans l’univers du vintage), pour la maroquinerie et pour les accessoires – tous domaines qui ont leurs experts reconnus et leurs propres circuits d’enchère, d’où les doutes sur la marchandise disponible pour des non-spécialistes.
• ENFIN, la validité économique de ce concept est loin d’être prouvée, pour des questions de taxes, de TVA et de « freins psychologiques » face au risque d’un montant d’enchères trop élevé sur le Net. Sauf s’il s’agit de « fonds de tiroir » des marchands de la place, on ne voit pas quelle « belle marchandise » serait dispersée ici, ni quels « beau prix » elle ferait…
4)
••• ADORÉ LA NOUVELLE DIVERSCOPE EN TITANE DE JEANRICHARD…
Difficile pour une montre de plongée de ne pas (trop) ressembler à un Rolex Submariner ou à une Panerai ! Un des meilleurs moyens d’y parvenir est sans doute de préférer la lunette tournante intérieure à la classique lunette graduée et crantée extérieure. Dans cette famille, la collection Diverscope de JeanRichard sait imposer son originalité, avec son boîtier coussin en titane mat microbillé (pas tout-à-fait noir, mais plutôt sombre) et les deux couronnes vissées opposées qui fondent son identité (9 h : réglage de la lunette tournante ; 3 h : réglage de la montre et mise à l’heure). Hyper-lisibilité du cadran, des aiguilles et de la lunette intérieure (luminescence maximale), étanchéité à 300 m comme pour toute « plongeuse » qui se respecte et – vrai bonheur ! – mouvement automatique manufacture qui est vraiment « manufacture » – c’est-à-dire produit par et pour JeanRichard, marque-sœur de Girard-Perregaux (image ci-dessus). Bracelet en tissu à gros grain caoutchouté. La date (rouge), le blanc du « quart d’heure de décompression » et le vert de certains marquages apportent une touche italienne inattendue, mais savoureuse…
5)
••• RETROUVÉ QUELQUES « CHENILLES » DANS LES ARCHIVES DES ENCHÈRES GENEVOISES…
« C’est la chenille qui redémarre », constatait Business Montres le 3 novembre, à propos d’une des pièces les plus curieuses des prochaines ventes horlogères de Genève. On retrouve quelques-unes de ces chenilles dans les anciens catalogues Antiquorum : trois d’entre elles (au moins deux fois la même pièce) sont passées sous le marteau entre 1997 et 2004, à des prix trois à quatre fois moins élevés que l’estimation de Sotheby’s et sans la moindre référence au marché chinois. Ce qui permet de penser que Sotheby’s veut « faire un coup » avec ces automates émaillés, qui constituent un des marchés de substitution les plus prometteurs pour les classiques « montres de collection »…
6)
••• CHERCHÉ À COMPRENDRE LE MYSTÈRE DU NOUVEL AMBASSADEUR ESPAGNOL DE ZENITH...
Vicente del Bosque, entraîneur des champions du monde de football espagnol, est vraiment un grand amateur de montres ! Pendant le Mondial, on ne voyait que lui et sa Bovet Sporster (repérage Business Montres du 12 juillet) et on le considérait comme un « ambassadeur » de Bovet. Depuis, il a reçu (entre autres) sa Hublot réglementaire de champion du monde (avant-première Business Montres du 30 août) et sa Franck Muller spéciale Fédération espagnole (indiscrétion Business Montres du 16 octobre). Hier, le site espagnol Relojes de Luxe révélait que le même Vicente Del Bosque était désormais le « nouvel ambassadeur de Zenith » et il posait avec un chrono El Primero Captain...
• Sauf que M. le nouvel ambassadeur dément cette nouvelle mission, même s’il a gardé la montre. No comment pour l’instant côté Zenith, mais Pascal Raffy fait du raffut dans la mesure où il n’a pas été diplomatiquement prévenu de ce changement de maillot de l’entraîneur espagnol. Ce n’est pourtant pas la saison des transferts et du mercato...
7)
••• RIGOLÉ DU FESTIVAL DE LANGUE DE BOIS ORCHESTRÉ AUTOUR DE L’ « AFFAIRE FRISCHKNECHT »...
A propos du limogeage sans ménagement du CEO des Ambassadeurs (un des principaux détaillants horlogers suisses, on nous annonce sans rire une décision « d’un commun accord de se séparer, suite à des divergences de vue sur l’orientation stratégique de l’entreprise ». Tout y est, mais personne n’y croit une seconde, ni dans l’entourage de Patrick Frischknecht, ni du côté des représentants suisses de l’investisseur proche-oriental (HNW) ! Tout aussi amusant : on remercie « Patrick Frischknecht pour avoir conduit avec succès, durant les 14 dernières années, l’entreprise d’horlogerie et de joaillerie renommée ». La sémantique est subtile : « avoir conduit avec succès » nous dit-on. Ce qui est incontestable. On en déduira que Patrick Frischknecht ne conduisait plus avec le même... succès les affaires du réseau Les Ambassadeurs (quatre boutiques de premier plan : Genève, Lugano, St Moriz, Zurich) ! Tout le monde sait que les coûts avaient explosé sans que les recettes suivent, avec un effet de ciseau on ne peut plus classique et destructeur. Et les projets de création de boutique Les Ambassadeurs hors de Suisse n’allaient pas arranger le bilan…
• CONCLUSION PROVISOIRE : à force de communiquer sur l'idée de la… porte horlogère (gimmick visuel de la publicité des Ambassadeurs), on finit par la prendre, cette porte, et dans le nez ! On espère seulement que cette sanction de l’investisseur séoudien, le cheikh Abdullah al-Rayes n’indique un prochain désinvestissement de son « véhicule » horloger (les marques Vulcain ou Jaermann & Stübi, entre autres mises de fond).
|