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Douze instantanés genevois à quelques heures du coup d’envoi des quatre principales ventes aux enchères horlogères de cette fin d’année...
••• À VOS MARQUES... ÊTES-VOUS PRÊTS ? PARTEZ !
••• LES TROIS COUPS du brigadier ont été donnés par Antiquorum, qui annonçait son annulation de la vente des Rolex de sir Edmund Hillary, la justice néo-zélandaise était demandé à Lady June, la veuve de l’explorateur, de rapatrier en Nouvelle-Zélande ces éléments du « patrimoine national » (révélation Business Montres du 12 novembre et développements précédents)...
••• CONCERT D’OUVERTURE avec Christie’s, qui organisait dans sa salle d’enchères, à l’hôtel des Bergues, au milieu des ventes du catalogue de lundi, une « causerie » avec Karl-Friedrich Scheufele sur le thème de la collection. On sait que le co-président de Chopard est aussi passionné de montres de collection et d’horlogerie (ancienne) que de voitures ou de vins. Qu’on se rassure : s’il ne devait garder qu’une collection, ce serait celle de ses montres [on sait qu’il a construit autour de sa collection une musée, le L.U.Ceum] ! Et, s’il ne devait garder qu’une pièce de sa collection, ce serait une... Ferdinand Berthoud – comme ça, il n'y aura pas de jaloux dans la communauté horlogère...
••• INTERROGATIONS COLLECTIVES alors que la presse – chauffée à blanc par des maisons d’enchères qui ne sont pas ses moindres annonceurs – s’enflamme par avance sur la réussite des enchères de ce mois de novembre : les acheteurs vont-ils faire flamber la cote et pour quelles pièces ? Il faudra regarder en détail les résultats sous le marteau, non du diamant rose Fancy Intense Pink et qui devrait à lui seul alourdir le score des auctioneers d’une rentaine de millions [plus que le total de toutes les montres du week-end !], mais des Patek Philippe, des Rolex et des « montres chinoises » qui aimantent tous les regards. Christie’s a longuement fait circuler ses trésors en Chine pour y dénicher de nouveaux acheteurs, qui alourdiront au mieux la facture téléphonique à l’heure de la vente, car ils semblent plus excités par les montres de poche et les pièces décoratives que les chefs-d’œuvre de la mécanique horlogère qui font des records sous le marteau. Même constat chez Sotheby’s, où Geoffroy Ader défend bec et ongles le pré-carré qu’il s’est constitué sur le créneau des montres émaillées et des pièces « chinoises » (voir l’extraordinaire « chenille » muée en « ver à soie » : Business Montres du 3 novembre). L’inconnue reste le comportement des collectionneurs européens, plus portés sur la montre-bracelet que sur les pièces de poche, dont la cote s’est dégradée – sauf exceptions – au cours de ces quinze dernières années...
••• LES MARCHANDS ont déjà investi les grands (et les petits) hôtels de Genève, avec le plaisir de se retrouver entre les averses pour fumer une cigarette sur les trottoirs ou dans les bars cossus des palaces pour y négocier de gré à gré quelques pièces rares : il est toujours impressionnant de voir des Patek Philippe de légende sorties d’une poche enveloppées de papier bulle ou tout simplement portées au poignet. Tout bon marchand qui se respecte ne se promène qu'avec une loupe dans la poche...
••• LE MANUEL QUI FAIT RÉFÉRENCE dès qu’il s’agit de négocier en privé une Daytona, Paul Newman ou décolorée : le Patrizzi Pocket Book qu’Osvaldo Patrizzi a consacré aux Rolex Daytona, très pratique pour glisser dans une poche de veste...
••• DE L’AVIS DE CONNAISSEURS, les meilleures affaires ne se feront peut-être pas à Genève ces jours-ci, mais à Zurich, où la maison Koller procédera dans deux semaines à une inhabituelle vente de ces montres Patek Philippe et autres qui enchantent habituellement les ventes genevoises. La provenance de ce lot est encore mal connue, mais ces montres – apparemment de noble provenance – alimentent la conversation et les rumeurs vont bon train...
••• AUX ORIGINES DE LA MONTRE AUTOMATIQUE, on trouve dans le catalogue Sotheby’s (lot n° 162) une montre de poche L. Leroy de 1925 qui assure la transition entre la tradition des « perpétuelles » de Breguet (masse pendulaire latérale) et les premières montres-bracelets automatiques. La toute première montre-bracelet automatique connue est une L. Leroy, de forme marquise, antérieure de trois ans à cette montre de poche, mais basée sur le même principe technique. Ce lot (image ci-dessus), pièce n° 2 d’une série privée de sept montres, se présente dans un état parfait, avec sa documentation d’origne et surtout le pointeau sans lequel on ne saurait ni la remonter, ni la mettre à l’heure par la carrure [c’est ici que la notice technique de l’époque prend toute sa valeur pour comprendre l’usage de ce pointeau]. Cette procédure est unique dans les collections L. Leroy et très originale dans l’univers des « montres sans couronne de remontoir ». L’esthétique est d’une finesse rarement égalée : le « calendrier américain » (jour, date, mois) ne fait qu’ajouter à son charme. Une vraie rareté, à peu près fresh to the market, dont la provenance du « club privé » des sept amis qui avaient passé commande ne fait que renforcer l’attractivité...
••• DÉCOUVERTE EN TERRE GENEVOISE des premiers exemplaires du livre de John Goldberger sur les Patek Philippe en acier (Business Montres du 4 novembre). C’est encore plus lourd que prévu, dans tous les sens du terme : cet épais volume sous cartonnage est à la fois riche en kilogrammes de papier et en kilotonnes d’informations explosives sur les Patek Philippe « blanches », dont la cote n’a cessé de s’alourdir au cours de ces dernières années, tant à cause de la passion personnelle que leur voue un cercle de collectionneurs (emportés par Aurel Bacs, qui ne porte lui-même que des Patek Philippe en acier) qu’à cause de la beauté et de la rareté de ces pièces – Patek Philippe et Rolex se partageant le privilège d’avoir certaines montres de collection plus valorisées en acier qu’en or !
••• QUE DE MYSTÈRES autour de la montre à équation du temps du catalogue Christie’s (lot n° 92 : Business Montres du 6 novembre). Finalement, ce n’est sans peut-être pas une équation du temps « marchante » et elle n’est peut-être pas aussi « pionnière » que Business Montres et Christie’s semblaient l’affirmer, mais elle n’en reste pas moins exceptionnelle une fois qu’on la prend en main : les rumeurs vont bon train et on ne peut pas exclure un coup de Jarnac de collectionneurs qui en minimiseraient l’importance pour créer un buzz négatif autour de cette montre, qui serait alors adjugée dans de meilleures conditions que si son caractère « historique » était proclamé ! A suivre...
••• UN TOURBILLON D’OBSERVATOIRE Patek Philippe du catalogue Christie’s (lot n° 187) permet de comprendre à quel point Laurent Ferrier – la nouvelle marque star de 2010, prix de la montre Homme pour le « Jury fantôme » de Business Montres et sans doute aussi du Grand Prix d’Horlogerie de Genève) est proche de l’esprit et de la lettre des grandes Patek Philippe historiques. Il suffit de rapporter l’image ci-dessus à celle du mouvement Laurent Ferrier révélé par Business Montres le 11 décembre dernier. La parenté esthétique est frappante, dans le style général des ponts, mais aussi dans le pont de tourbillon en « guitare ». Tous les experts qui ont pu examiné la Patek Philippe à la loupe au cours de l’exposition ont hurlé de bonheur en découvrant des finitions de folie qui ne sont plus pratiquées aujourd’hui, sinon par des horlogers comme Laurent Ferrier...
••• À TITRE D’ENCOURAGEMENT pour les amateurs de belle horlogerie ancienne, beaucoup de commentaires sur les adjudications des pendules et des horlogers d’Antide Janvier sur lesquelles Business Montres avait attiré l’attention dès le 21 octobre : quoique ces pièces aient été dispersées dans un ensemble de meubles où elles n’avaient pas grand-chose à faire, les prix sont à méditer.
• Lot n° 120, estimé 40 000-60 000 euros et adjugé à 48 750 euros : plutôt correct pour un régulateur de cheminée pas exceptionnel.
• Lot n° 121, estimé 150 000-200 000 euros et adjugé à 324 750 euros : magnifique enchère pour une monumentale « sphère mouvante » à planétaire. Antide Janvier reste une star des enchères, surtout quand ses pièces sont beaucoup plus spectaculaires que purement horlogères : « Il faut que ça bouge » pour plaire aux nouveaux amateurs de jouets mécaniques !
• Lot n° 122, estimé 400 000-600 000 euros et adjugé 432 750 euros : un prix honnête pour un régulateur de parquet un peu austère...
• Le lot n° 123 un régulateur de cheminée, n’a pas été vendu, en dépit de son esthétique très décalée. Une pièce peut-être un peu trop « horlogère » pour le niveau culturel des nouveaux collectionneurs...
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