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Ce qu’il y a de bien, avec Antiquorum, c’est qu’on n’est jamais déçu et qu’il se passe toujours quelque chose !
Une poignée d’instantanés en direct des salles d'enchères, alors que le week-end vient tout juste de commencer...
••• C’EST PARTI TOUT DOUCEMENT, MOLLEMENT ET PRESQUE SANS ENTHOUSIASME...
••• REBONDISSEMENT CHEZ LES KIWIS : si le gouvernement néo-zélandais demande à la veuve de sir Edmund Hillary de rapatrier d’urgence la série des Rolex de son ex-aventurier de mari, Antiquorum – qui a renoncé à la vente – se fait tout de même tirer l’oreille pour rendre les montres. Enjeu : une facture de 105 000 dollars, que lady June devrait payer pour récupérer des montres qui ne lui appartenaient pas, mais qu’elle avait confié à Antiquorum (feuilleton Business Montres du 12 novembre et développements précédents)...
• 105 000 dollars, ce n’est pas rien ! Cela peut correspondre en partie aux frais engagés par Antiquorum pour assurer la promotion de cette vente et en partie au montant du dédit contractuel, au cas où ces montres seraient retirées, sur la base d’un forfait pré-établi avant la vente (source : NZ Herald). Autre possibilité : Antiquorum aurait pu directement acheter ces montres à lady June pour les mettre en vente à grand tapage médiatique et en tirer tous les bénéfices. Dans tous les cas, sans donner de précisions supplémentaires, Antiquorum a fait savoir que le retour de ces Rolex en Nouvelle-Zélande ne dépendait que du règlement de ces 105 000 dollars...
• C’est sûr, on ne s’ennuie jamais avec Antiquorum et il se passe toujours quelque chose pendant leurs ventes...
••• PRÉCISÉMENT, ON A VÉCU hier après-midi, à l’hôtel du Rhône de Genève, le premier épisode de la vente Antiquorum, lots n° 1 à 252, avec une succession impressionnante de montagnes russes côté animations et adjudications ! Départ en fanfare, avec une quarantaine de Speedmaster commémoratives des missions spatiales ou en séries limitées : excellents prix sous le marteau, parfois deux à trois fois au-dessus de l’estimation. C’était donc bien parti, mais la suite s’est révélée moins glorieuse avec des acheteurs d’une sagesse inquiétante, tant dans la salle qu’en ligne ou au téléphone. Les premières montres ravalées ont commencé autour du n° 60 pour un final avoué de 75 % de lots vendus, sans doute un peu moins, et généralement – à quelques exceptions près – au-dessous de l’estimation ou dans la fourchette basse (un peu moins de 1,5 millions de francs suisses sous le marteau)...
• Un calme inquiétant pour la suite du week-end et des autres ventes, avec quelques bonnes affaires pour les amateurs et, comme d’habitude, beaucoup d’enchères en provenance d’Asie pour sauver les meubles. Quasiment pas de (bonnes) surprises, sinon une montre émaillée de forme « panier » estimée 5 000 franc suisses et adjugée 20 000 francs suisses [histoire détaillée ci-dessous]. Si la GMT de 1959 (lot n° 141) s’est bien vendue, les chronographes Rolex (n° 146, 147, 149) n’ont pas trouvé d’acheteurs – ceux-ci devenant de plus en plus exigeants sur la qualité réelle des marchandises qu’on leur propose. Il faut dire que ces chronographes sont des pièces pour amateurs euro-américains avertis et dotés d’une bonne culture horlogère !
• Il en va de même d’un QP Audemars Piguet Royal Oak en or ravalé à 23 000 francs suisses, le même QP ne trouvant d’amateur qu’à 15 000 francs suisses en acier PVD noir et or jaune. De même, pas d’acheteur pour une Répétition minutes QP platine d’Audemars Piguet à 100 000 francs suisses. Une Nautilus en or gris, avec date, phase de lune et réserve de marche (réf. 5712, lot n° 248) restée invendue à 24 000 francs suisses sous le marteau, ce n’est pas glorieux ! ...
• Le refus des pièces qu’on repère trop souvent aux enchères est très net, chez les marchands comme chez les amateurs, et il faudrait en nettoyer les catalogues : à quoi remettre une Patek Philippe réf. 2404 (lot n° 231) sur le marché, alors qu’elle est déjà passée six fois aux enchères depuis 2002 et qu’elle a même été mise en vente sur eBay Israel en 2007 ? Six Patek Philippe ravalées les unes à la suite des autres (lots n° 233 à 238) : on n’avait plus vu ça depuis des années. Le réchauffé ne paie plus...
••• L’HISTOIRE DU LOT n° 89 du catalogue Antiquorum mérite le détour. Sur le papier, une mignonne montre de forme « panier », avec des émaux assez bêlants (mouton, colombe et fleurs) et une date : 1810. En main, une montre manifestement refaite : certains experts parlent d’une « vinaigrette » [boîte qui contenait les « sels » destinés à réanimer les dames évanouies] dans laquelle on aurait ajouté un mouvement horloger, quelques-uns estiment la charnière apocryphe, d’autres pointent du doigt la résine époxy (!) étalée sur l’émail pour en camoufler les réparations – rien de tout ceci n’étant mentionné dans le catalogue, sans doute rédigé par un grand myope qui parle d’un émail « légèrement restauré » à propos de cette matière plastique ! En 1810, ça fait désordre (image ci-dessus). De quoi faire fuir tout amateur européen un peu conséquent, d’autant que cette « vinaigrette » est déjà passée, en tant que telle, sur un catalogue américain, qui ne mentionnait pas le moindre mouvement horloger...
••• Estimée 5 500-7 000 francs suisses, « The basket » a été adjugé à 20 000 francs suisses sans les frais. Deux amateurs asiatiques – qui n’avaient pas vu la pièce autrement qu’en photo – se la sont disputée au téléphone, au grand étonnement de la salle. Ce pourrait être plaisant si cela n’était pas vraiment dangereux : une fois qu’il aura la « montre » en main, soit l'enchérisseur déçu la rend à Antiquorum (pas bon pour l'image), soit il est à jamais dégoûté de la collection de montres (pas bon pour le marché). Dans les deux cas, quel gâchis...
••• ON POURRAIT EN DIRE AUTANT (côté bidouillage) de bon nombre de montres anciennes présentées dans les catalogues de ce week-end et de bon nombre de montres de grandes marques contemporaines. Sans verser dans l’angélisme du débat restauration/préservation, qui consiste à bannir comme « inauthentique » la moindre aiguille changée par la manufacture elle-même au cours d’une réparation « officielle et autorisée », on ne pourrait que souhaiter l’établissement d’une sorte de barème officiel, collectivement admis par les auctioneers comme par les marchands, pour évaluer de façon objective l’état réel, et donc la valeur d’une montre une fois notées ses réparations et restaurations au fil des années.
••• À SURVEILLER DE PRÈS dimanche soir, chez Sotheby’s : la Patek Philippe « Asprey » en acier (lot n° 200), estimée 20 000-30 000 francs suisses, mais sans doute vouée à une bien meilleure adjudication. Cadran impeccable (chiffres Breguet) et marquage « Asprey » plutôt rare, en plus d’une relative « fraîcheur » en salle de vente (dernière apparition : 1995) : les amateurs sont déjà nombreux à vouloir lever leur paddle à cet instant de la vente...
••• PENDANT CE TEMPS-LÀ, les bonnes affaires continuent. A Genève, plusieurs marchands venus du monde entier feront sonner leur réveil pour être dès l’ouverture à la quatrième Bourse horlogère de Genève, en espérant y rafler de quoi alimenter leurs clients (ou les enchères) en pièces intéressantes. Bon nombre de marchands américains avaient en revanche préféré le show horloger de Dallas pour regarnir leur inventaire : à voir les SMS passés à leurs copains américains présents à Genève, ils n’ont pas perdu leur temps et déniché beaucoup de belles montres...
••• FINALEMENT, POUR BIEN VENDRE DES ROLEX, c'est peut-être à New York qu'il fallait aller ce week-end, puisque Gaston & Sheehan y dispersait aux enchères publiques une partie des biens personnels saisis chez Bernard Madoff, l'escroc qui détient (provisoirement) le record d'arnaques pour les année deux mille. Le catalogue de la vente ne manquait pas d'intérêt horloger : cinq Patek Philippe (deux Travel Time, deux chrono réf. 533 et un réf. 1579), six chronos Rolex (une Daytona réf. 6239, une Datocompax réf. 4768, une Antimagnetic réf. 6234, une Antimagnetic réf. 6036 et deux non spécifiés), une Rolex « Padellone » réf. 8171, Piaget, Audemars Piguet, Cartier, etc.
• Comme on pouvait s'y attendre, la « Padellone » réf. 8171 a atteint les 67 500 dollars sous le marteau, deux Patek Philippe partant pour 56 000 et 37 500 dollars...
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