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Pas de doute, après la première tranche du catalogue Christie’s, on s’achemine vers une excellente fin de saison horlogère et un millésime 2010 exceptionnel.
Impressions prises au vol dans la matinée...
••• LE « SYSTÈME A.B.C. »
(AUREL BACS CHRISTIES) POUR ENFLAMMER LES ENCHÈRES...
Tout le monde était là : les marchands, les acheteurs, les amateurs (pas beaucoup), les grands collectionneurs et même les concurrents venus assister au grand « Aurel Bacs Show », le meilleur spectacle de l’actuelle scène horlogère. Egal à lui-même, ample dans le geste et matois dans le regard, capable de relancer en italien un Italien hésitant et de stimuler un Chinois par téléphoniste interposé [là, c’est plus fort !], il a survolé en grand seigneur sa première session du haut de sa chaire. Méprisant les (rares) invendus et applaudissant lui-même les « belles enchères » (minimum cinq zéros), il a dispersé sans fatigue un peu plus de 180 lots. C’est la magie du « système ABC » (Aurel Bacs Christies) pour emballer les records sous le marteau (repérage Business Montres du 11 mai dernier)...
••• MÊME POUR LES MONTRES « CHINOISES », turques ou émaillées, qui ne sont pas sa spécialité, il parvient à tirer son épingle du jeu, avec la satisfaction secrète – sinon l’ambition sous-jacente – d’aller chatouiller la chasse gardée de Geoffroy Ader, son concurrent de Sotheby’s. Il faut dire qu’il était bien aidé par le Patek Philippe Museum qui avait des gros appétits ce matin, comme la montre Fleurier (lot n° 89 : ce n’était pas forcément une Bovet) de 1820 raflée à 200 000 francs suisses ou la mystérieuse Equation du temps (lot n° 92 : Business Montres du 6 novembre), qui n’était sans doute pas une équation du temps « marchante », comme l’avaient noté fautivement Christie’s et Business Montres, mais qui doit tout de même avoir un certain intérêt horloger puisque le musée l’a poussée jusqu’à 490 000 francs suisses. En revanche, ce n’est pas systématiquement le musée Patek Philippe qui gagne : très disputé, le lot n° 149 – une très grande montre de poche émaillée pour le marché turc – a été adjugée à un collectionneur européen, à 580 000 francs suisses, au nez et à la barbe du musée...
••• AUTRES BELLES ENVOLÉES sous le marteau de « Magic Aurel » : il fallait un sacré métier pour vaincre la résistance des collectionneurs et des marchands européens, qui avaient décidé de bouder la World Time Patek Philippe réf. 2523 en émail bleu. Annoncée à 1 500 000 francs suisses, elle a été emportée par un collectionneur malaisien pour 2 300 000 francs suisses. Somme que les collectionneurs européens, déjà gavés en World Time de toutes sortes, ne voulaient pas payer pour une montre pas forcément ausi rare qu’on l’affirmait chez Christie’s : d’après les numéros de série, il y en aurait d’autres en circulation, mais elles ne sont jamais passées sur le marché – ce qui atténue cependant la notion d’hyper-rareté associée à cette montre.
• Il ne fallait pas avoir d’état d’âme pour vanter la montre en forme d’urne (lot n° 90), qui n’était sans doute pas de Jaquet Droz, ni forcément émaillée par Richter, mais qui est partie en Asie pour 120 000 francs suisses, sous l’œil goguenard des collectionneurs européens, qui n’avaient pas cru le story telling du catalogue...
• Belle opération autour du tourbillon d’observatoire Patek Philippe, bien repéré par Business Montres (13 novembre) comme une pièce majeure à suivre de près : estimée 120 000-180 000 francs suisses, ce tourbillon rejoindra les collections du musée Patek Philippe moyennant 225 000 francs suisses sous le marteau...
• Les amateurs de Rolexiana apprécieront que le profondimètre Rolex Divomet (lot n° 123, bien repéré par Business Montres dès le 17 octobre : image ci-dessus) ait été poussé à 15 000 francs suisses par un amateur proche-oriental, qui a également sous le marteau, à 80 000 francs suisses (estimation 25 000-30 000 francs suisses) une Rolex World Time lot n° 112, d’autant plus rare qu’il s’agissait sans doute d’un prototype jamais commercialisé (alerte Business Montres du 17 octobre)...
• Autres scores exceptionnels : les 290 000 francs suisses (sans les frais) du lot n° 185, une multi-complication Patek Philippe de poche, réf. 658, performance qui annonce – peut-être et on veut l’espérer – une revalorisation à leur juste prix des montres de poche chez Patek Philippe (ce matin, encore, la répétition minutes du lot n° 142 valait bien plus que les 22 000 francs suisses de son adjudication). Ou les 460 000 francs suisses (bien au-delà de l’estimation) de la Patek Philippe ref. 1518 du lot n° 188
••• À L’ÉNONCÉ DE CES CHIFFRES, on se gardera simplement d’imaginer que le marché « explose » ou qu’il est en « folie ». Au contraire, hormis quelques engouements asiatiques qu’on mettra sur le compte d’un enthousiasme typique chez les néophytes, on se rend compte que les prix sont relativement stables et calmes. L’argent circule et il s’investit plus que jamais en montres de collection : était-ce un hasard si le banquier du fonds d’investissement Precious Time et son gérant (synthèse Business Montres du 14 octobre) suivaient ces enchères de près ? Le beau se vend plus cher parce qu'il est plus disputé, l'exceptionnel se vend à des prix exceptionnels, mais le reste stagne : le marché ne pardonne plus la médiocrité prétentieuse des « montres qui se la pètent » ! Ces investisseurs – par passion ou par ambition – restent cependant très sélectifs et bien informés : ce n’est pas non plus un hasard si la « rarissime » (so called) Patek Philippe by Cartier, lot n° 184, a été ravalée à 130 000 euros – pas nette, on n'y touche plus !
••• A SUIVRE, cet après-midi, pour les dernières cartouches de cette session de novembre, qui comptera cependant un dernier épisode – totalement inattendu – à Zurich, le 30 novembre, chez Koller, maison qui ne pratique généralement pas la montre de collection et qui s’offre cette fois ci un mini-catalogue horloger de premier plan. Business Montres reviendra ces jours-ci sur cette vente, qui annonce peut-être de nouvelles grandes manœuvres stratégiques sur le marché suisse des montres de collection...
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