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Fin de partie pour le Revolution suisse, média qui a porté (et déçu) tant d’espoirs...
 
Le 24-11-2010
de Business Montres & Joaillerie

Un titre qui disparaît, c’est toujours un crève-cœur, même si touta été fait pour rater sa mise sur orbite.

Triste fin de parcours pour l’édition française de Revolution, qui a incarné, puis naufragé, le rêve d’une nouvelle communicaton horlogère !


1)
••• L’ÉDITION FRANÇAISE DE REVOLUTION MET LES POUCES...

Ceci est une information « non officielle et non autorisée », mais... Du temps de sa version papier, Business Montres avait salué la naissance de Revolution à Singapour comme l’émergence d’une nouvelle génération de médias horlogers. On brisait les codes des discours traditionnels (textes et images) pour les recomposer sur une base plus contemporaine, plus glamour et plus « cinématographique ». Très vite, le succès prouvait la pertinence de la proposition, qui devait se décliner à travers le monde dans différents éditions « régionales ».

••• IL FALLAIT METTRE EN PLACE une édition francophone de Revolution et Business Montres a suivi de près plusieurs tentatives, pendant plusieurs années, jusqu’à ce qu’Edipresse se décide à prendre une participation – chèrement négociée – dans la holding singapourienne du titre, ainsi qu'une licence pour différents régions du monde (Russie, Espagne, etc.), dont les pays francophones. On allait donc pouvoir passer aux choses sérieuses. Sauf que le marché, toujours très porteur sur le plan publicitaire, s’était déjà retourné sur le plan éditorial au moment de ce rachat : l’impact massif d’Internet avait changé la règle du jeu pour la communication horlogère. La première erreur d’Edipresse a été de ne pas comprendre que la « révolution des contenus » était en marche et que les lecteurs en avaient assez de retrouver, deux à trois mois plus tard, les mêmes fadaises de dossiers de presse lus auparavant sur Internet...

••• LA DEUXIÈME ERREUR aura été de tout miser sur la publicité au moment même où le marché commercial se retournait, à l’aube de la Première Crise économique mondiale. D’une part, on vendait le média à ses annonceurs au lieu de le vendre à ses lecteurs. D’autre part, on ne donnait pas à ces lecteurs ce qu’ils étaient en droit d’attendre d’un magazine de nouvelle génération. Double erreur qui sera fatale et qui conduit aujourd’hui Revolution (édition française) à cesser toute activité. C’est malheureux pour l’équipe rédactionnelle mise en place par un excellent journaliste comme Michel Jeannot, mais c’était devenu inévitable compte tenu de la médiocrité de l’approche managériale et des résultats d’une équipe commerciale qui avait perdu toute crédibilité auprès de la communauté horlogère...

••• LA TROISIÈME ERREUR consistait à ne pas prendre en compte le paysage concurrentiel et à se comporter comme une sorte de référence de droit divin du fait d’une implantation privilégiée en Suisse. Illusion d’optique : le fait d’être « sous le microscope » des marques ne les rend que plus susceptibles et exigeantes. Illusion créative : de nouveaux concepts – entres autres, Plaza Watch – n’ont cessé de venir éroder, puis démoder le concept initial de Revolution – danger que ses animateurs singapouriens avaient bien perçu en repositionnant leur titre sur un créneau life style, moins horloger et plus clairement fashion.

••• EN SOMME, Edipresse a racheté le droit d’éditer Revolution au moment même où ses créateurs n’y croyaient plus. Au lieu de concevoir le Revolution des années dix et à anticiper les évolutions du marché, le projet de Revolution Edipresse consistait à reproduire un magazine des années zéro-zéro déjà obsolète dans la tête de ses concepteurs : le « Déclencheur de pulsions mécaniques » n'a évidemment pas déchaîné l'enthousiasme attendu...



2)
••• UN INCROYABLE ACCUMULATION D’ERREURS STRATÉGIQUES...

Entre des annonceurs évanescents, auxquels on proposait des discomptes toujours plus spectaculaires [ces dernières semaines, les pages se négociaient à 20 % du tarif officiel, mal positionné de toute façon] et des lecteurs réticents, l’équation n’était pas facile à résoudre. Ajoutons-y une gestion générale déficiente, qui chargeait la barque au-delà du réalisme en coûts d’exploitation et qui pénalisait, pour sauver Revolution, les autres médias du pôle horloger d’Edipresse, jusque-là profitables, mais désormais déficitaires ou en péril [Business Montres du 24 novembre, info n° 7 sur GMT repositionné en trimestriel]...

••• LE SUCCÈS MÉDIOCRE des autres éditions de Revolution gérées directement par Edipresse (notamment l’Espagne, pays qui ne porte décidément pas chance à l’éditeur suisse), n’ont pas permis de renflouer une édition franco-suisse qui semblait dater d’il y a cinq ans et qui se contentait de parodier le premier style Revolution, déjà remis en cause et repensé par les créateurs singapouriens...

••• UNE DES DERNIÈRES « BOULETTES », pour la faire courte, concernait l’édition chinoise de Revolution. On imagine à quel point, sur un marché émergent, suractif et aussi assoiffé de connaissances horlogères que la Chine, un version locale de Revolution ne pourrait que gagner le jack-pot côté annonceurs, avec une pagination publicitaire qui se comptait en centaines de pages ! C’est pourtant cette licence chinoise qu’Edipresse a accepté de recéder, dans des conditions financières inespérées, aux Singapouriens qui n’en revenaient pas de la naïveté suisse dans ce domaine ! Suisses qui venaient de se couper le seul bras encore valide qui leur restait et la seule pompe à fric encore envisageable...

••• L’ILLUSION INITIALE provenait sans doute d’une analyse erronée du phénomène Revolution, média magistralement conçu pour un marché émergent dépourvu de la moindre tradition de presse magazine : à Singapour, Revolution était à la fois Playboy, Vogue Homme, Forbes, L’Express, La Revue des Montres et quelques autres titres spécialisés dans les hobbies contemporains. Il ne fallait surtout pas considérer que quelques jolies filles photoshopées avec des montres allaient créer une révolution sur des marchés matures gavés de références magazine. On a suivi la lettre de Revolution quand il fallait en recréer l’esprit : dès lors, l’échec était programmé et la fin de l’aventure fixée à la limite des déficits supportables par le groupe Edipresse...



3)
••• LA VRAIE « RÉVOLUTION DE LA COMMUNICATION HORLOGÈRE » RESTE À CONDUIRE...

L’échec de Revolution Suisse ne signe pas la défaite de toute innovation dans les médias horlogers ! Au contraire, les médias actuellement les plus en pointe (Plaza Watch dont nous avons parlé) commencent à patiner et ils butent sur la « révolution des contenus » évoquée ci-dessus, ainsi que sur les nouvelles exigences des lecteurs de la génération 2.0. L’aventure horlogère sur papier n’est pas morte, elle est simplement à réinventer, dans le respect de l’attente des lecteurs et avec le soutien des annonceurs qui commencent à comprendre la différence entre la puissance d’un titre et son influence. C’est le papier glacé magazine et l’éditorial standard qui sont morts, pas le besoin d’informations sur les montres et ceux qui les font...

••• LES MAGAZINES PAPIER ont toujours leur partition à jouer dans le grand concert de la communication horlogère. S’ils n’y occupent plus une place centrale [le nouvel Internet les en a délogés], ils sont cependant appelés à y remplir un rôle essentiel : celui d’un média plus lent certes, mais aussi plus réfléchi et capable de somptueuses mises en scène (choix du format, qualité du papier, approche typographique, travail des visuels) appelées à exister dans la durée. On en reparlera...

 



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