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C’est le transfert le plus étonnant de cette fin 2010.

Un an après avoir pris en mains la direction des Ambassadeurs Genève, Pierre Jacques rebondit à la tête de la manufacture De Bethune...

••• MONSIEUR L'AMBASSADEUR
CHANGE DE CAMP ET DE FAUTEUIL DIRECTORIAL...

L’actualité est une drogue dure : Pierre Jacques, sans être lui-même journaliste, en avait éprouvé l’addiction en montant le magazine GMT avec son complice Brice Lechevalier. Une fois racheté par le groupe Edipresse Luxe, il lui avait manqué ce parfum d’aventure et de liberté qu’on ne trouve pas dans un groupe de presse et il était parti remplacer Alexis Meyer à la direction des Ambassadeurs Genève. Si la greffe avait pris, il manquait cependant à ce fauteuil de direction cette pointe d’épices – ce grain de folie – qu’est le défi quotidien de l’actualité, du monde qui bouge, des décisions à prendre et des avancées stratégiques à y conduire.

••• C’EST POURQUOI, tout juste un an après son arrivée aux Ambassadeurs Genève (c’était une révélation Business Montres du 19 novembre dernier), Pierre Jacques a donné sa démission de son poste de direction pour tenter une nouvelle aventure : il sera le prochain CEO de De Bethune, manufacture dont David Zanetta restera le président et Denis Flageollet la tête pensante horlogère. Annoncée ce matin aux personnels des deux maisons, c’est donc une double aventure qui commence :
• Pierre Jacques, encore jeune quadra, se sent des fourmis dans les jambes à la pensée de la nouvelle mission qu’il entend mener à travers le monde (restructurer le réseau international, rationaliser les activités internes, redonner à cette maison la première place qu’elle mérite sur la scène de l’horlogerie indépendante).
• De Bethune, brillantissime manufacture de très haute horlogerie (image ci-dessus), illustration parfaite de la nouvelle « révolution conservatrice » qui marquera les années 2010, s’offre avec Pierre Jacques le consolidateur qui lui manquait, ainsi que le porte-parole capable de relayer ses messages sur la scène internationale, avec cette urbanité ferme et souriante qu’on connaît à Pierre Jacques.

••• LA MAUVAISE NOUVELLE, c’est le renforcement des incertitudes liées au sort du groupe Les Ambassadeurs, déjà récemment privé de son CEO Patrick Frischknecht (Business Montres du 5 novembre, info n° 7) et troublé par les rumeurs de départ des uns ou des autres qui courent au siège social de Zurich. La démission de Pierre Jacques laisse ce vaisseau stratégique de la distribution des montres de luxe en Suisse un peu désemparé : que le groupe n’ait pas pu retenir un Pierre Jacques – c’est-à-dire le motiver assez et lui offrir de meilleures raisons de rester – est en soi un terrible aveu de faiblesse.
• Théoriquement, Pierre Jacques devrait rester en place jusqu’au 1er mars, de même que Patrick Frischknecht doit rester à son poste jusqu’en avril : on peut cependant quelles sera leur crédibilité commune pendant les salons de janvier, quand ils devront négocier leurs commandes de 2011 pour Les Ambassadeurs auprès des principales marques clientes de leurs magasins...

••• BON COURAGE, cher Pierre ! Tu n’avais pas vraiment démérité à la direction du Grand Prix de Genève et tu y avais fait ce que tu pouvais comme tu pouvais, pris entre l’arbre de ton actionnaire et l’écorce des « ajustements diplomatiques » extérieurs. Tu avais également bien géré ton arrivée aux Ambassadeurs Genève et ton intégration dans une équipe un peu secouée ces derniers temps (notamment par le départ surprise d’Alexis Meyer, autre grand talent dont le groupe s'est privé : révélation Business Montres du 26 septembre 2009). Tu prends un gros risque personnel chez de Bethune, mais ce courage est tout à ton honneur, car l’enjeu est formidable : faire d’une éternelle start-up, gérée avec brio mais dilettantisme par un surdoué de la montre comme David Zanetta, une vraie marque et en (re)faire une manufacture capable de régater devant les meilleures maisons de tradition pour devenir une des références horlogères du XXIe siècle...