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L'horlogerie britannique ressuscite à La Chaux-de-Fonds. Deux passionnés des mouvements à complications (Eric Loth et Max Imgrüth) ont acquis en 1995 les brevets et le droit des marques Graham, Arnold & Son, ainsi que Tompion.
«Mon projet n'était pas de créer une marque mais d'en reprendre une», explique l'horloger Eric Loth, un ancien de la direction de Swatch Group. «Comme il y avait déjà beaucoup de monde sur les marques suisses, nous avons acquis les droits délaissés de trois noms prestigieux de l'horlogerie britannique», précise-t-il.
Graham et Arnold & Son ont cessé leur activité au 19e siècle. La dernière Tompion a été produite en 1911, mais ses brevets ne sont pour l'heure pas exploités. Les deux autres marques ont ressuscité à La Chaux-de-Fonds sous la raison sociale The British Masters. La société a atteint depuis 2001 son rythme de croisière.
La collection Arnold & Son est liée au monde de la marine. Selon Eric Loth, quelque 550 pièces mécaniques par an sont produites à La Chaux-de-Fonds, mais la demande est deux fois supérieure. Pour les montres Graham, 6000 pièces par an en moyenne sortent des ateliers de la Joux-Perret, qui occupent une quarantaine de collaborateurs.
Le public aujourd'hui a oublié que l'horlogerie anglaise des 17e et 18e siècle était la plus réputée, bien avant que la Suisse ne se mette à fabriquer des garde-temps. George Graham (1673-1751), inventeur du chronographe, fut l'apprenti de Thomas Tompion, lequel a joué un rôle dans la création de l'Observatoire de Greenwich.
En plus du chronographe, l'horlogerie doit à Graham l'invention de l'échappement à cylindre et du pendule au mercure. A la fin du 17e siècle, le monde de l'horlogerie était étroitement associé à celui de l'astro-physique: les scientifiques de l'époque mettaient l'accent sur l'importance de la mesure précise du temps.
L'activité horlogère allait de pair aussi avec le domaine de la marine. Le problème de l'évaluation du degré de longitude en mer n'était alors pas résolu, ce qui rendait la navigation plus aléatoire qu'aujourd'hui. George Graham fut un des premiers membres du jury du Prix de la Longitude, institué par la monarchie.
John Arnold (1736-1799) fut un des quatre lauréats de cette distinction. Avec un groupe d'horlogers, il fut à l'origine d'un instrument de calcul des écarts de temps entre la position du soleil et l'heure du méridien de Greenwich. Cette méthode fiable contredisait la méthode astronomique préconisée par Newton.
John Arnold mit au point un concept de production industrielle de chronomètres marins capables de calculer la longitude en mer. L'Angleterre avait érigé alors au rang de cause nationale l'invention de cet ancêtre du GPS. L'horloger britannique inventa notamment l'échappement à détente et le balancier bi-métallique.
L'inventeur du fameux tourbillon, le Suisse d'origine neuchâteloise Abraham-Louis Breguet (1747-1823), considérait John Arnold comme son maître. Selon Eric Loth, le Britannique n'avait pas son pareil pour répondre aux plus hautes exigences de précision avec des solutions techniques simplifiées en terme de composants.
«Nous sommes une compagnie britannique dans l'esprit et suisse en terme de qualité», indique de son côté Max Imgrüth, responsable marketing et ventes. Selon lui, un membre de la famille Aspray, soit une des plus anciennes compagnies britanniques actives dans la distribution, siège au conseil d'administration de la société The British Masters.
En ce qui concerne l'habillage des modèles, la spécificité de l'esthétique britannique permet l'expression de designs originaux, ajoute Max Imgrüth. Les modèles Graham et Arnold & Son appartiennent au segment de qualité supérieure, à des prix situés entre 7300 et 30'000 francs.
Romandie News
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