|
Rentrée sans transitionpour le Quotidien des Montres, après une pause estivale prolongée...
L’actualité horlogère continue à bouillir dans sa marmite, les vacances ayant provisoirement ralenti le feu sans l’éteindre.
CETTE SEMAINE, DANS SON COLLIMATEUR TOUJOURS EN MODE AOÛTIEN, LE SNIPER A...
1)
••• RELU ATTENTIVEMENT L’ARTICLE DU « TEMPS »
SUR LE « DOUBLE JEU DE L’HORLOGERIE SUISSE »...
A se demander si on ne peut pas parler du... « double jeu de la presse horlogère suisse » ! Dans cet article, signalé hier par Business Montres (25 août, info n° 5), on sent tellement le bras du Swatch Group derrière la plume du journaliste qu’on ne peut que commencer à se montrer méfiant et à se demander à qui une telle manipulation profite. Surtout dans le contexte de tension actuelle à propos de l’autorisation donnée par la Comco (commission suisse de la concurrence) aux réductions des livraisons ETA et Nivarox dès 2012...
••• Manifestement, avec un tel « Scud », quelqu’un veut la peau de Miguel Garcia, le patron de Sellita, moralement cloué au pilori pour des pratiques que tout le monde connaît et dont tout le monde s’accomode depuis des années. On aurait aussi pu parler des 4,6 millions de mouvements à quartz Swiss Made exportés chaque année, mais on a préféré focaliser l’attention – et mobiliser l’indignation – des lecteurs sur les mouvements mécaniques Swiss Made que Selitta délivrerait aux « concurrents asiatiques » des marques suisses...
••• S’il avait détecté la désinformation dont il était victime (on l’espère inconscient de cette instrumentalisation), Bastien Buss aurait dû se demander quelles marques avaient été lésées par Sellita au cours de ces dernières années : aucun des clients de Sellita contactés par Business Montres n’a souffert de livraisons en baisse. Pas une n’a été informée d’une réduction potentielle de ces livraisons avant que le Swatch Group ne réduise les siennes. Question toute bête de logique : l’industrie horlogère afficherait-elle les 25 % ou 30 % de croissance dont elle se flatte si elle avait enduré une quelconque pénurie de mouvements mécaniques ? Ceci pour cause de livraisons excessives aux concurrents chinois...
••• Un seul indice accentue le malaise provoqué par Le Temps, tout en signant – maladroitement – l’origine du tir de ce missile. Selon le journaliste, « Pour les besoins de cet article, le numéro mondial de l’horlogerie [Swatch Group] a joué la transparence, données comptables à l’appui ». Imaginer Nick Hayek en nouveau prophète de la transparence comptable et en parangon de l'innocence statistique, c'est prendre un risque grave : l’éclat de rire collectif a failli créer un tsunami dans les bureaux des analystes zurichois et genevois. Pas plus tard qu’il y a deux jours, Business Montres demandait à Nick Hayek des éclaircissements sur la bizarrerie des 100 millions de dollars prêtés à titre personnel par le Swatch Group au CEO chinois d’Hendgeli (Business Montres du 25 août, info n° 3). La réponse personnelle de Nick Hayek n’a pas vraiment « joué la transparence » affichée pour Le Temps. Elle laisse même perplexe ! Texto : « Une rumeur disait que le frère d’un joaillier/bijoutier connu aurait eu un chauffeur qui avait entendu une histoire incroyable d’un policier qui réglait la circulation sur une place centrale d’une ville pittoresque. Etc. Etc. (...) »... Ceci alors que ce surprenant prêt personnel capable de faire basculer Hengdeli sous le contrôle du Swatch Group a été officiellement confirmé par le CEO chinois en question...
••• Donc, au final, un article qui se trompe d’angle et qui passe à côté de sa cible : en dénonçant une illégitimité supposée, quoiqu’anodine et sans conséquence actuelle sur l’industrie, on s’exonère de rechercher les vrais responsables d’illégalités avérées chez tous les tricheurs du Swiss Made – vrai sujet clivant s’il en est, et donc vrai tabou à la FH...
2)
••• REGRETTÉ QUE L’ « AFFAIRE SELITTA » NE SOIT PAS
L’OCCASION DE REPARLER À FOND DU « SWISS MADE » (VRAI OU FAUX)...
Si « enquête confidentielle » de la FH il y avait [d’après nos sources, ce document date d’il y a un an, et il n’est guère opérationnel, puisque clairement téléguidé par le Swatch Group], on aurait mieux fait de s’intéresser aux statistiques – totalement confidentielles, et jamais communiquées à la presse – des centaines de milliers de mouvements Swiss Made rapatriés d’Asie pour être emboîtés et « finis » en Suisse. Si, si, ça existe, aussi étrange que celui puisse paraître. On pourrait parler aussi des importations en Suisse de boîtiers et de composants d’habillage Swiss Made : par quel miracle la Suisse ne fabrique-t-elle qu’un petit quart des boîtiers des montres Swiss Made qu’elle exporte ? Un phénomène qui concerne la plupart des marques de la plupart des groupes – même et surtout celles qui se flattent des factures de leurs fournisseurs suisses, lesquels sont des donneurs d’or bien connus en Chine, en Thaïlande et en Malaisie : on ne s’étonnera pas que la FH refuse de communiquer aux journalistes trop curieux ce genre de statistiques ! On aurait enfin pu parler de toutes ces marques Swiss Made dont les centres opérationnels sont –au vu et au su de tout le monde – à Hong Kong, cité suisse bien connue...
••• Bref, Le Temps s’est trompé de cible et s’est laissé engluer dans une polémique subalterne au lieu de profiter du scandale permanent de ces échanges Suisse-Asie – parfaitement illégitimes à défaut d’être illégaux – pour poser les vraies questions qui fâchent. Il est clair pour tout le monde que l’actuel Swiss made fait eau de toute part et qu’il est devenu impossible à réformer, sinon à sombrer dans le ridicule des 60 % envisagés par la Confédération. Puisque le Swatch Group, qui rapatrie effectivement de plus en plus de capacités en Europe, sans pour autant cesser ses opérations à la périphérie chinoise, a désormais clairement intérêt à durcir les dispositions du Swiss Made, profitons de cette énergie pour aller plus loin et recréer un label horloger euro-suisse, qui permettrait d’arrimer à l’industrie suisse les ateliers de la zone euro proche...
3)
••• LOCALISÉ L’ESPACE GENEVOIS
OÙ S’OUVRIRA LA PROCHAINE CAVERNE D’ALI BUSSER (MB&F)...
Un lieu inclassable puisqu’à la fois « laboratoire horloger, expérience artistique et aventure humaine », ce qui rend tous les formats possibles avec une équipe aussi déjantée que celle de MB&F. Maximilan Busser en Ali Baba new look : on va en parler, c'est sûr ! Pour la géographie, ce sera dans les petites rues qui ruissellent du cœur de la Vieille Ville de Genève vers le lac, rue Verdaine (n° 11), à portée d’arbalète des bureaux actuels de MB&F. Pour le concept, on devrait être à la fois dans une ambiance de galerie artistique, de boutique de montres nouvelle génération et de lounge d’avant-garde, avec des bureaux en arrière-plan pour loger une partie de l’équipe trop à l’étroit dans les locaux actuels. Inauguration planifiée pour octobre, mais les travaux d’aménagement viennent à peine de commencer. On vous tiendra au courant de toute façon...
4)
••• COLLECTÉ QUELQUES NOUVELLES INFORMATIONS
SUR LE « SWATCHGATE » PRÉSUMÉ (PARFUM DE CORRUPTION AUTOUR DE SWISS TIMING)...
C’était un feuilleton d’avant l’été [synthèse partielle : Business Montres du 5 mai, mais il y a eu depuis quelques rebondissements], mais tout ça risque de revenir sur le devant de la scène avant l’automne. Aux dernières nouvelles, à la mi-août, les deux accusés en fuite depuis février – ceux qui étaient les sous-traitants de Swiss Timing et d’Omega (Swatch Group) – ont fini par se rendre à la justice. Intéressant : les enquêteurs indiens ont pu établir que ces sous-traitants leur avaient présenté des factures « fictives » et qu’ils ont été en relation étroite avec Swiss Timing, un récent voyage en Suisse intriguant même les policiers. Suresh Kalmadi, le principal inculpé, semble également avoir tenté de plaider la... « démence », source de ses pertes de mémoire au cours de son emprisonnement... Scanner à l’appui !
••• Seuls les dirigeants suisses de Swiss Timing – déjà formellement inculpés, et donc convoqués – n’ont, à ce jour, pas été entendus par les juges indiens et les enquêteurs du Central Bureau of Investigation. L’opération semble retardée par des problèmes de traduction (en allemand) dans la délivrance des assignations. La justice indienne, qui considère que cette « affaire de corruption » porte sur une enveloppe de 27 millions de francs suisses d’ « argent sale », affirme avoir lancé une convocation par voie diplomatique internationale, mais les délais officiels de comparution semblent avoir été rallongés jusqu’au 4 novembre...
5)
••• TENTÉ DE DÉBROUILLER L’ÉCHEVEAU
DES TESTS DE PATERNITÉ CONCERNANT GÉRALD GENTA...
Tout le monde le connaissait, mais personne n’avait vraiment idée des limites de son œuvre, pas même lui ! Dans son hommage à Gérald Genta, disparu la semaine dernière, Business Montres (23 août) évoquait l’apport « pas très clair » du designer à la montre Overseas de Vacheron Constantin. L’affaire semblait effectivement compliquée : Gérald Genta et, surtout Claude Daniel Proellochs (ex-CEO de Vacheron Constantin) et Juan-Carlos Torres (son successeur) avaient eux-mêmes payé tribut à la créativité du designer à propos de cette montre Overseas et de sa première version, la référence 222. La cause semblait donc entendue...
••• Sauf que c’était tout faux ! Pour The Hour Lounge (forum privé Vacheron Constantin), Alex Ghotbi nous a rappelé que les deux séries d’Overseas avaient été dessinée, la première en 1996 par Giampiero Bodino, et la seconde en 2004 par Vincent Kauffmann (le designer « maison » de la manufacture). Pour ce qui est de la référence 222, matrice de l’Overseas, le dessin était signé... Jorg Hysek ! Vérification faite, rien à voir avec Gérald Genta : comme quoi il faut se méfier des légendes horlogères emportées par le vent et remportées par les marées de la mémoire...
6)
••• RELEVÉ LE SURSAUT TARDIF
D’UNE DES MANUFACTURES CONCERNÉES À PROPOS DE GÉRALD GENTA...
Du moins le communiqué officiel d’Audemars Piguet, qui lui doit le dessin original de la Royal Oak (actuellement, près de 70 % de ses ventes) et pratiquement sa survie au cours de ces quarante dernières années : « Au-delà du grand homme à la fois brillant et cultivé, véritable gentleman, il faut retenir de ce personnage haut en couleur toute sa générosité, sa créativité et sa passion pour la tradition horlogère. De par son esprit visionnaire, il a été à l’origine de nombreux mythes horlogers et sa contribution à la Haute Horlogerie est sans égal. (…) La célébration des quarante ans de la Royal Oak ne pourra pas se faire sans un hommage appuyé à ce créateur de génie, qui était resté un passionné et un artiste dans l’âme ». C’était un peu tardif, mais mieux vaut une semaine de retard qu’un étrange silence comme celui de Patek Philippe, d’Omega, de Cartier, d’IWC et des autres [voir notre propre hommage à Gérald Genta : Business Montres du 23 août, avec nos regrets face à l’absence de réaction des manufactures dont il avait créé les icônes]...
7)
••• REGRETTÉ QUE L’HOMME QUI A LE PLUS INFLUENCÉ NOS VIES QUOTIDIENNES
AU COURS DES DERNIÈRES DÉCENNIES AIT TOUJOURS REFUSÉ DE PORTER UNE MONTRE...
On parle évidemment de Steve Jobs (Apple), qui vient de se retirer des affaires et qui aurait mérité une montre de nouvelle génération. Ce qui aurait constitué un « signal fort » pour tous les geeks et pour tous ceux qui ont abordé la planète numérique grâce à Apple. Un horloger avait essayé de le convaincre, mais jamais parvenir à lui glisser une Big Bang au poignet. Vous aurez compris qu’il s’agit – qui en doutait ? – de Jean-Claude Biver...
8)
••• AIMÉ LA NOUVELLE
« REINE DE NAPLES » EN ACIER (REF. 8967ST)...
Ce boîtier a toujours été un des plus élégants de toutes les vitrines féminines. Immédiatement reconnaissable, il prouve que la montre féminine n’est pas forcément une montre d’homme en réduction, comme le pensent les Jivaros des bureaux de design horloger. En acier, légèrement agrandie (image ci-dessus), la Reine de Naples est encore plus séduisante sans cesser de prouver un raffinement qui ne sacrifie rien à la vulgarité : on peut aimer la nacre du cadran, mais les hommes des femmes qui aiment les montres apprécieront le mouvement automatique à échappement silicium et sa masse oscillante en or. Comme quoi une montre de femme peut aussi posséder une mécanique de rêve... |