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Il faut maintenant apprendre à décoder les opérations de marketing sportif, en se méfiant des starlettes qui ne rendent pas les bijoux qu'on leur confie...
POUR CE DÉBUT DE SEMAINE, FIDÈLE AU POSTE DANS SON NID-DE-PIE, LA VIGIE DU LUNDI VOUS SIGNALE...
1)
••• UNE BONNE BLAGUE POUR DÉRIDER
LES ESPRITS CHAGRINS DU LUNDI MATIN...
Elle nous est racontée par un lecteur, lui aussi un peu interloqué par le décalage mental entre l’hyper-optimisme des statistiques horlogères et l’hyper-pessimisme des acteurs de l’horlogerie. C’est une histoire de basse-cour : « C’est l’histoire de la dinde de Noël. Elle n’est jamais autant choyée que dans les mois qui précèdent la fin de l’année. On l’engraisse, on la chouchoute et on la couvre de faveurs. Pour elle, c’est le paradis : aujourd’hui mieux qu’hier et moins bien que demain. La dinde est sur son petit nuage et elle en vient à vouer un culte respectueux à ceux qui la nourrissent avec tant de soins et qui veillent sur sa santé avec tant d’attentions. Comment imaginer un changement de situation ? Pourquoi se préoccuper d’un avenir que tout annonce radieux, puisque cet horizon radieux est confirmé de mois en mois ? » Sauf que, évidemment, les fêtes de fin d’année vont tragiquement interrompre – pour la dinde, pas pour les convives – cette série statistique de bonnes nouvelles mensuellement répétées. Bon courage pour la suite : devinez qui va y laisser des plumes...
2)
••• LES SUBTILITÉS SÉMANTIQUES
DES CHAMPIONS DU MARKETING SPORTIF DANS L’HORLOGERIE...
Défaite ultra-honorable du Quinze de France face aux All Blacks (un petit point qui valait son pesant d’arbitraire arbitral), mais qui a repéré TAG Heuer dans tout ça, alors que la marque était « montre officielle » du tournoi ? Même avec la meilleure volonté du monde, on n’a quasiment rien vu, mais c’est peut-être parce qu’on avait mal lu le communiqué officiel et qu’on avait confondu « montre officielle » et « chronométreur officiel » – nuance de taille, qui vaut, pour le coup, son pesant de lourds dollars ! De quoi rendre tout le monde de plus en plus méfiant face aux annonces de « partenariat » qui se multiplient et qu’il convient de décoder en lisant entre les lignes les communiqués officiels..
••• Récemment, c'était Hublot qui confirmait une info préalable de Business Montres (17 octobre, info n°10) sur l’engagement de la marque aux côtés de l’Ajax Amsterdam (football). Comme « montre officielle », pas comme « chronométreur » ou comme « partenaire » officiel. Ce qui signifie tout simplement que Hublot va faire une série limitée de montes pour l’Ajax, sans aller beaucoup plus loin. De même, on se perd un peu dans les annonces réciproques de Longines et de Hublot concernant les partenariats et le chronométrage officiel pendant les compétitions de ski alpin.
••• Entre Rolex et Omega, sans parler de quelques comparses subalternes, le décodage concernant le parrainage des circuits de golf est devenu d’une rare complexité. On s’égare aussi dans la subtilité des codes diplomatiques entre certains « ambassadeurs » sportifs, leurs équipes et les compétitions où ils sont engagés : trois sponsors horlogers possibles autour d’une même prestation et trois revendications possibles. Un dernier exemple avec les circuits de F1 : sachant que le seul partenaire horloger autorisé à utiliser le logo « F1 » est Hublot, qu’en est-il de certains circuits comme Monaco, Singapour et, récemment le Buddh (Inde), où on retrouvait la communication cette année d’autres horlogers (TAG Heuer, Richard Mille) ?
••• Cette semaine, il va donc falloir ausculter de près l’annonce d’un nouveau partenaire horloger pour Ferrari. Cela concernera-t-il la Scuderia, la Formule 1 (avec ou sans logo sur la voiture, les combinaisons ou les casques ?), les compétitions Ferrari hors F1, la marque elle-même, un modèle de voiture de série, des séries limitées de montres, tous les produits horlogers dans les boutiques ou tout simplement – cela s’est vu – le décor mural de Maranello ? Le choix des mots, le choc des infos : les horlogers adorent visiblement jouer les illusionnistes...
3)
••• L’HABITUELLE SÉANCE DE RATTRAPAGE POUR ÊTRE SÛR
DE N’AVOIR RIEN MANQUÉ D’IMPORTANT LA SEMAINE DERNIÈRE...
Les ratages du second Concours de chronométrie, la nouvelle tendance « hydro-mécanique », le quotient intellectuel numérique des marques, la souscription LOLwatch, le clip Breil plus glamour que jamais, la polémique sur les aiguilles « naines » ou les « bijoux de famille » de la jeune mariée indienne, c’est ici, et nulle part ailleurs dans les médias horloger (compilation Business Montres du 23 octobre)...
4)
••• LA NOUVELLE ADMIRAL’S CUP 45
RÉPÉTITION MINUTE-TOURBILLON S’OFFRE UN BOÎTIER EN TITANE...
Le titane est un matériau acoustique de premier choix pour une montre à sonnerie, même s’il n’est pas considéré comme assez « noble » pour une montre à grande complication (répétition minutes + tourbillon : calibre développé par La Fabrique du Temps). C’est vrai, mais c’est moins stupide qu’un répétition minute en platine, métal qui assomme littéralement le son de tout timbre ! En plus de sa légèreté, cette montre s’offre une autre légitimité : celle de la sonnerie – rarissime sur une montre nautique, alors que les rythmes de la vie à bord sont scandés par des alertes sonores. On rêverait ici de montres capables de siffler l’arrivée à bord des invités ou de cadencer les manœuvres : ce sera pour une future génération d’Admiral’s Cup ! En attendant, on peut saluer la réussite de ce boîtier en titane, métal nautique par excellence puisqu’inaltérable, qui met en valeur le calibre CO 010 soigneusement épuré sous son verre saphir fumé (image ci-dessus), avec des finitions remarquable. Le « verrou » d’armage de la répétition minutes est situé – belle innovation, là aussi – dans la lunette de la cette répétition minutes, qui s’offre en plus 100 heures de réserve de marche. Pourvu que le père Noël ait le pied marin : il comprendra toute la splendeur et la beauté de cette montre !
••• Seul bémol (déjà signalé ici même pour le lancement de la version précédente de cette montre) : à quoi rime l'inscription « tourbillon » sur un cadran qu'on a voulu par ailleurs épurer pour sublimer le mouvement ? Soit le client sait repérer ce qu'est un tourbillon, et c'est inutile de lui en reparler chaque fois qu'il regarde sa montre. Soit il ne le sait pas, et cette montre n'est pas pour lui. Assez de bavardages redondants sur les cadrans !
5)
••• LA LOTERIE HORLOGÈRE QUI TIENT SES PROMESSES
ET QUI FAIT MÊME GAGNER DES MONTRES AUX HORLOGERS GENEVOIS...
« Pour 100 balles, t’as plus rien ? Si, si : tu as une Rolex Submariner qui vait 5 000 euros ! »... Ces histoires de « loterie horlogère » font rêver, mais c’est encore plus frappant quand on peut mettre la main sur un des gagnants de la tombola permanente organisée par Win Luxury Watches (Rolex, Patek Philippe, Panerai, etc.) : ce fournisseur genevois des grandes manufactures a misé 60 euros pour gagner une Submariner lunette verte à 5 000 euros (reportage Business Montres du 22 octobre et questions-réponses en vidéo sur la chaîne images de Business Montres)...
6)
••• LE BOYCOTT ÉCONOMIQUE
COMME NOUVELLE ARME « CITOYENNE » ANTI-MARQUES...
Les « consommacteurs » contemporains ont bien compris que les marques étaient autrement plus fragiles que les appareils politiques pour conquérir de nouveaux contre-pouvoirs sociétaux. D’où la vogue montante du boycott économique, « arme de punition massive » dont la puissance a été dopée par Internet et les réseaux sociaux. Auteur de Le Boycott, histoire, actualité, perspectives (éditios Fyp), Marc Drillech situe ces nouveaux enjeux sur son blog, Le Boycott, dont les éclairages prouvent que la pression monte entre les marques et leurs publics. Parce qu’elles reposent essentiellement sur des considérations émotionnelles et la mobilisation d’affects immatériels - hors du domaine du besoin élémentaire -, les marques de luxe sont encore plus sensibles que les autres acteurs économiques à cette nouvelle « dictature de l’opinion » et aux pressions du climat sociétal. D’où les réactions de plus en plus contrastée pour l’étalage du « luxe ostentatoire » dans les médias (voir ci-dessous, info n° 9, les réactions américaines aux suppléments luxe dans les journaux)...
••• Pour INfluencia, Marc Drillech explique : « Aujourd’hui, on boycotte pour punir... (...) On assiste également à une nouvelle forme de pression, en particulier aux Etats-Unis, orientée vers les annonceurs pour toucher les media... (...) le boycott en soi n'est ni moral ni immoral. Il dépend de ses actions, de ses raisonnements, et aussi de la manière dont il est relayé dans les media. Il permet de libérer les énergies les plus plus créatives et les humanistes. On peut l'apprécier parce qu'il est l'arme des petits, tel David contre Goliath. Mais il peut tout autant pencher vers sa zone sombre, quand il renforce la désignation du bouc émissaire ou les tendances à la désinformation et à la manipulation... (...) »
••• L’avenir du boycott ? « Le boycott est certainement l'une des formes revendicatrices les plus symboliques de notre époque. Il regroupe de manière profonde ce que Michel Maffesoli nomme post-modernité et qui n'est rien d 'autre qu'une société en profonde restructuration. Il illustre parfaitement cette transformation radicale de nos mondes. Il est fondé sur l'action collective qui donne à l'individu un rôle dominant.Et il va se développer parce qu'il est en phase avec les désirs des consommateurs de disposer de contre-pouvoirs. Ils savent qu'ils ont des droits et des devoirs. Par exemple, ils considèrent que les entreprises ne les respectent pas quand elles augmentent les prix. Leur seule réponse est donc de couper temporairement les relations. Cette rupture momentanée montre bien l'importance de la relation dans le commerce; elle est aussi le reflet de l'accroissement de la tension entre marques et consommateurs… (…) »...
••• On ne peut pas s’empêcher de considérer la campagne de dénigrement systématique de Rolex par les polémistes français comme une forme de boycott rampant, dont la facilité d’emploi n’a d’égal que l’acceptation consensuelle par le grand public. Cette campagne prouve en tout cas qu’aucune marque n’est à l’abri de ces phénomènes de boycott : « Il ne faut jamais oublier que si la plupart des boycotts ne déséquilibrent pas la rentabilité des entreprises, ils pèsent lourdement sur l'image, la réputation et ces dimensions immatérielles qui donnent leur valeur aux marques »...
7)
••• LA CONDAMNATION DE JACOB ARABOV
(JACOB & CO) À UNE DOUBLE PEINE À CAUSE DE COURTNEY LOVE...
Encore un « coup fourré » dans le bijoutage à tout va de n’importe quelle starlette ! Non seulement Jacob Arabov (« Jacob the Jeweler ») s’est fait dépouiller par Courtney Love d’une parure de joaillerie d’une valeur de 100 000 dollars - et la chanteuse n’est plus sa copine maintenant que le juge de Manhattan l’a condamnée à indemniser Jacob & Co -, mais ce même juge de Manhattan – qui reconnaît la responsabilité de la chanteuse dans la disparition de ces bijoux – a tout de même estimé qu’ils ne valaient pas les 100 000 dollars exigés. On se demande laquelle des deux gifles fait le plus mal (coup de projecteur Business Montres du 23 octobre)...
8)
••• LA DISPARITION DE GEORGE DANIELS,
QUI ÉTAIT UN DES DERNIERS « DIEUX VIVANTS » DE L’HORLOGERIE MÉCANIQUE...
C’était un des meilleurs maîtres-horlogers (si ce nom a encore un sens) de son temps, mais sans doute un des plus discrets, encore que son apport à l’horlogerie soit considérable, en particulier grâce à son échappement co-axial, qui prouve le génie séculaire des Britanniques pour l’invention de nouveaux échappements. Son seul défaut : il n‘était suisse, et il était trop modeste – ce qui lui vaut moins d’hommages officiels qu’il ne le mériterait (voir ci-dessous, info n° 9, la non-réaction d’Omega à sa disparition). Le savoir-faire traditionnel et l’art de faire des vraies montres à la main perdent un de leurs meilleurs défenseurs (hommage Business Montres du 22 octobre)...
9)
••• QUELQUES ACTUALITÉS HORLOGÈRES
EN VRAC, EN BREF ET EN TOUTE CURIOSITÉ ÉDITORIALE...
••• BOURSE HORLOGÈRE DE GENÈVE : rendez-vous le dimanche 13 novembre (9 h-16 h) au Crowne-Plaza de Genève, pour une des plus sympathiques bourses aux montres de l’espace francophone, organisée par la SGHA (Société genevoise des amateurs d’horlogerie). Les initiés savent qu’on y fait des affaires, sans doute parce que la Suisse romande reste un petit marché (renseignements : SGHA)...
••• BREITLING : une superbe image de la réussite de Breitling dans le sponsoring aérien, avec un exceptionnel vol en formation de toute l’escadrille Breitling (Business Montres du 24 octobre – image grand format à télécharger pour ne perdre aucun détail de ce vol en formation au-dessus de la Suisse)...
••• INFLUENCE : qu’est-ce qu’un influenceur aujourd’hui, que peut-il changer par son influence, qu’est-ce qui le rend influent et pourquoi les influenceurs sont-ils déterminants pour reformater en permanence notre culture au quotidien ? Un intéressant documentaire (13:55 mn), très pédagogique, avec quelques « papes » de l’influence, en version sous-titrée français et en en version originale (anglais) : à consommer sans modération pour mieux comprendre le monde qui nous entoure...
••• MONTRE POST-IT : rien ne vaut un Post-it pour prendre des notes, mais quel meilleur endroit que le poignet pour porter ces mémos comme une montre et être sûr de ne pas les oublier. La « Montre Post-it » est vendue par bloc de 100 montres, 9,80 euros (repérage Business Montres du 24 octobre)...
••• OMEGA : George Daniels nous a quittés il y a trois jours, mais personne ne s’en est encore aperçu chez Omega. Son génial échappement co-axial était pourtant la principe contribution d’Omega à l’histoire horlogère au cours du dernier quart de siècle : pas la moindre mention de cette disparition, ni la moindre trace d’hommage sur le site de la marque...
••• SUPPLÉMENTS LUXE : dans un contexte de crise socio-économique violente, interrogations de la presse américaine sur le « décence » des cahiers luxe, suppléments horlogers et autres hors-séries cadeaux dans la presse américaine. Est-ce conséquent alors qu'on ressent de plus en plus la « colère du peuple » et surtout sa souffrance ? Le New York Times (qui vient de diffuser un supplément montres Watch Your Time) vient ainsi de se faire allumer pour ses pages et ses publicités consacrées au luxe ostentatoire, totalement contradictoires avec sa couverture du mouvement Occupy Wall Street – très populaire aux Etats-Unis – et totalement déconnectées de ses admonestations moralisatrices aux élites économiques américaines, qui sont la principale cible des marques pour cette ultra-conspicuous consumption (exemple d’éditorial sur ce thème : Ad Age)...
••• TIFFANY & CO : cap à l’Est, mais plus près qu’en Chine, avec l’ouverture d’une boutique à Prague, prélude à l’ouverture d’autres vitrines dans les anciens pays de l’Est (Pologne et Roumanie, notamment)... |