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C'est forcément à Belles Montres que se focalise, pour tout le week-end, le monde horloger qui parle français
…POUR CETTE FIN DE SEMAINE, AVEC L’ACTUALITÉ DES MONTRES EN LIGNE DE MIRE, LE SNIPER A…
1)
••• CONCENTRÉ SON ATTENTION
SUR LE SALON-ÉVÉNEMENT BELLES MONTRES, AU CARROUSEL DU LOUVRE (PARIS)…
C’est le grand événement de la semaine, non seulement pour les marques engagées, mais aussi pour tous les professionnels, qui vont d’efforcer de venir prendre la température dans les allées où une grosse cinquantaine de marques (54 exactement) ont choisi de présenter ce qu’elles font le mieux : des belles montres ! Un double espace pour cette année pour la joaillerie, deux (vrais) ateliers de sertissage, une « salle d’études » pour s’initier à la mécanique horlogère, loupe à l’œil et brucelles en main, une exposition sur les montres mécaniques des origines à nos jours - certains attributions d’avant le XIXe siècle laissent rêveur -, des conférences, le service d’expertise proposé par Sotheby’s, l’exposition des montres finalistes du Grand Prix d’Horlogerie de Genève : les visiteurs seront gâtées, et les visiteuses aussi grâce aux merveilles présentées dans le « cube » des grands joailliers…
••• Comme toujours dans ces salons (du moins quand ils sont réussis), les absents ont toujours tort : pas facile d’expliquer aux visiteurs de Belles Montres que Rolex ne fait pas partie du club des « belles montres », raisonnement valable pour les grandes marques du Swatch Group (pas « belles », les montres de Breguet, Blancpain, Jaquet Droz ou Omega ?) ou des maisons indépendantes pour Breitling, Chopard ou Patek Philippe, et même pour quelques-unes des marques récemment distinguées au Grand Prix d’Horlogerie, comme Boucheron, Van Cleef & Arpels, TAG Heuer, Urwerk, pour ne pas parler de Laurent Ferrier ou A. Lange & Söhne. Même si les salons horlogers se multiplient en Europe (Londres avec SalonQP, Munichtime, Viennatime, The Watches Days à Genève), Belles Montres Paris reste la version originale, souvent imitée, jamais égalée par la qualité des visiteurs, le prestige des marques et cette inimitable touche de style parisien dans la mise en scène des marques. Paris, capitale mondiale du luxe, reste l’écrin idéal pour les belles montres, piliers internationaux de la culture luxe…
2)
••• CROISÉ ENTRE LOUVRE ET CONCORDE
LE TOUT-PARIS ET LE TOUT-HELVÉTIE DE L’HORLOGERIE…
Pour quelques heures, le cœur de l’horlogerie internationale (du moins la francophone) bat exclusivement pour le premier arrondissement de Paris, en attendant la soirée inaugurale du salon Belles Montres (jeudi soir) et les trois jours de l’exposition au Carrousel du Louvre. Si les Parisiens jouent à domicile, avec leurs bureaux à portée de semelle (de la place Vendôme à la rue Saint-Honoré), les Genevois, les Biennois et les Neuchâtelois sont montés dans la capitale. On les croise devant sur les trottoirs, devant les vitrines de leurs concurrents ou la main dans la main en amoureux (pas forcément en toute légitimité, mais c’est la magie de Paris). On les croise dans les grands hôtels du quartier où ils ont leurs habitudes et leur concierge préféré - on vous recommande l’efficacité de Dominique, au Hyatt Vendôme - et dans les patios où l’automne presque indien permet de fumer un cigare en consultant ses e-mails. Aucun doute : le français – avec sous accent romand – est bien la langue officielle de l’horlogerie et Paris une annexe de la capitale helvétique de la planète Montres…
3)
••• RENCONTRÉ UN VISITEUR INATTENDU
DANS LES ALLÉES DE BELLES MONTRES : THIERRY NATAF EN PERSONNE…
L’ancien président tourbillonnant de Zenith est de retour dans les coulisses de l’horlogerie : égal à lui-même, fidèle à son dandysme gipsy chic, il vient de lancer The Consulting Company sur le marché du coaching d’entreprise de haut niveau, dans l’univers des montres et de la joaillerie, mais aussi des vins et spiritueux, des parfums, de la mode, de l’art et du retail (secteurs dont Hierry Nataf a été familier dans les différentes séquences de son parcours professionnel). Du Thierry Nataf tel qu’on l’aime, en Nataf dans le texte, séduisant et mirobolant, grand acteur et grand rêveur, mais toujours avec beaucoup de rigueur, plein d’idées et de projets : le monde lui appartient et son ciel n’a plus de limite (renseignements : TCCTN Group)…
4)
••• CONSTATÉ QUE L’« AFFAIRE OLD ENGLAND »
FAISAIT BEAUCOUP CAUSER DANS LES CHAUMIÈRES DE L’HORLOGERIE PARISIENNE…
C’était une révélation Business Montres du 9 novembre dernier, mais les répliques de ce mini-tremblement de terre continuent à secouer le mundillo de la distribution des montres à Paris : les détaillants voient dans cet emporium multi-marques une sorte de « déclaration de guerre » du groupe Richemont – qui n’a toujours pas démenti quoi que ce soit, mais admis en privé que tout ça était effectivement « dans les tuyaux ».
••• Même la presse parisienne a fini par admettre qu’il allait se passer quelque chose, en reprenant, citation à l’appui, l’essentiel de l’enquête effectuée par Business Montres : « Le boulevard Haussmann va-t-il concurrencer l’avenue Montaigne ? », titrait Challenges avant-hier, avant un bandeau « Exclusif qui prête à sourire alors que l’article n’ajoute rien à nos informations. Le plus amusant reste quand même l’article du Figaro : « Un Palais de la montre bientôt ouvert à Paris ». Pas beaucoup de conditionnels dans cet article pour parler d’une information « non officielle et non autorisée », d’autant que l’article reprend également toutes les informations de Business Montres qui concernent le projet concurrent de LVMH (précision Business Montres du 11 novembre, info n° 7). Pourquoi amusant ? N’allez pas croire que cet article du Figaro, consacré à un « Palais de la montre » exclusivement ciblé pour les touristes chinois à Paris, figure dans le supplément « L’horlogerie à l’heure chinoise » du même Figaro : ce serait prendre le risque de fâcher les « chers annonceurs » horlogers du quotidien. Non, il est caché dans les pages économiques : on n’est jamais trop prudent !
••• Plusieurs réflexions au sujet de cette « affaire Old England », qui est, rappelons-le encore, totalement justifiée sur un plan strictement managérial : le groupe Richemont avait non seulement le droit, mais aussi le devoir économique de prendre une telle initiative. On s’étonne d’ailleurs que Le Printemps ou Les Galeries Lafayette, qui captent l’essentiel de la manne touristique chinoise, n’aient pas eu l’idée de créer eux-mêmes, et avant Richemont, en marge de leurs établissements dans le quartier, de tels < em=""> horlogers : cet indifférence marketing risque de se payer au prix fort…
••• La naïveté des détaillants parisiens est confondante : comment peuvent-ils encore douter que la stratégie commerciale des grands groupes de luxe et des grandes maisons indépendantes passe par le retail et non plus par le wholesale ? A quelques exceptions près, les détaillants indépendants n’intéressent plus ces marques, qui préfèrent leurs propres réseaux de boutique – même si, à moyen terme, on peut considérer que l’actuelle folie d’ouverture tous azimuts de boutiques monomarques est une stratégie datée, qui va se révéler pernicieuse et pénalisante dans le grand ralentissement économique international qui s’annonce. Le « coup Old England » est donc parfaitement logique et en phase avec le déshabillage progressif de la distribution parisienne et française par des marques comme Cartier, Vacheron Constantin, Panerai ou même Jaeger-LeCoultre – qui préfèrent garnir les vitrines de leurs boutiques exotiques plutôt que celles de leurs ex-partenaires parisiens…
••• On parle évidemment là des détaillants indépendants, puisqu’il se confirme de plus en plus que l’opérateur choisi par Richemont sera le groupe suisse Bucherer, dont les accords privilégiés avec Rolex ne sont plus un secret pour personne dans l’horlogerie helvétique. A quoi bon s’encombrer de petits indépendants aux égos difficiles à gérer, quand il suffit de mener, une fois par an, un bras de fer avec un réseau qui génère assez de commandes pour compenser la perte du chiffre d’affaires représenté par des myriades de détaillants ? Plus on pèse sur et dans ces réseaux, plus ils sont obligés de passer par les fourches Caudines des grands groupes : c’est du pain bénit ! Autant que les détaillants indépendants qui veulent survivre n’ont plus le choix : soit ils se vendent à des marques - solution choisie par les frères Bry, rue de la Paix, pour être « les premiers à en profiter, et non les derniers à en succomber » -, soit ils restructurent leur portefeuille de marque, en choisissant, par effet miroir, des marques indépendantes dignes de confiance, qu’on parle ici de Franck Muller ou de Corum en haut de gamme, ou de Frédérique Constant en moyenne gamme, sans oublier tous les jeunes créateurs. Face au rouleau compresseur des groupes de luxe, il faut bétonner les niches pour résister !
••• En soi, l’approche multi-marques n’est pas condamnée, elle doit seulement évoluer : l’opération Old England est ici bien pensée. En marge des boutiques monomarques, il faut des mégastores capables de proposer un maximum de marques et de références, chacune dans leur environnement. A la fin du XIXe siècle, le commerce parisien a vécu une telle révolution avec l’ouverture du Bon Marché, qui a obligé tous les petits commerçants à évoluer. Au milieu du XXe siècle, les épiciers ont dû faire à l’apparition des grandes surfaces et ils ont été contraints à repenser leur métier. Au début du XXIe siècle, la distribution des montres va connaître la même mutation. Nous en reparlerons…
5)
••• REBAPTISÉ UNE DES ALLÉES DE BELLES MONTRES
EN « HOMMAGE PARISIEN À LA CHAUX-DE-FONDS »…
Explication : les marques chauddefonnières sont inexpliquablement regroupées dans la grande allée qui ferme Belles Montres, au Carrousel du Louvre. On commence par Ellicott, pour continuer sur Hautlence, Girard-Perregaux ou JeanRichard, toutes marques qui ont leur quartier général dans un rayon de 200 mètres sur les hauts du « Pod ». Hommage involontaire de la « capitale du luxe » à la « métropole horlogère » ?
6)
••• EFFECTUÉ UN DÉCOMPTE CHRONOLOGIQUE
DES VINGT-TROIS SIÈCLES D’HISTOIRE MÉCANIQUE RACONTÉS À BELLES MONTRES…
Vingt-trois siècles séparent le mécanisme d’Anticythère présenté sur l’espace Hublot des « machines horlogères » de Maximilian Büsser, avec une halte devant les premières montres mécaniques du XVIe siècle que présente l’exposition montée par la Fondation de la Haute Horlogerie. Tout ça sur cinquante mètres. Le plus étonnant reste que, par delà ces vingt trois siècles d’histoire, chacune de ces expressions du génie micro-mécanique ait gardé sa singularité et son potentiel révolutionnaire. On ne comprend guère plus le mécanisme d’Anticythère que les « ovnis » de MB&F, alors que les « montres » de la Renaissance nous déroutent encore totalement. Seul lien possible entre ces pièces : la créativité assistée par la virtuosité et l’envie de dépasser les limites des paysages connus et rebattus. Dans l’Antiquité, on se passait parfaitement du « calculateur astronomique » mis en rouages par les mécaniciens grecs. La preuve : après le naufrage d’Anticythère, tout le monde a oublié que cette « machine » existait. La capacité disruptive d’un Maximilian Büsser est aujourd’hui aussi scandaleuse que devait l’être les premières montres « portables » de la Renaissance : au XXIe siècle comme au XVIe siècle, il y a toujours le conformiste de service pour demander à quoi ça sert et pour se demander si on ne se paye sa tête. Dans l’Europe de la Renaissance, il fallait être un peu fou pour accrocher ces boîtes pleines de rouages proprement inutiles à sa ceinture ou autour de son cou – de même qu’il faut une certaine audace pour porter une Horological Machine quand tout le monde se contente d’une montre ou d’un iPhone pour avoir l’heure.
••• Vingt-trois siècles de micro-mécanique en trois pôles : vingt-trois tout petits pas pour le visiteur de Belles Montres, mais vingt-trois grandes enjambées dans l’histoire de l’horlogerie…
7)
••• BAVARDÉ QUELQUES MINUTES AVEC LAURENT PICCIOTTO,
QUI FUMAIT SA CIGARETTE SUR LE TROTTOIR DEVANT CHRONOPASSION…
C’était histoire de vérifier la taille de la nouvelle boutique que Jaeger-LeCoultre vient d’ouvrir à portée de mégot de Chronopassion (Business Montres du 21 novembre). Laurent Picciotto (« Lolo » dans le mundillo) ayant l’habitude de fumer une cigarette sur son trottoir, autant lui demander s’il a entendu parler de la future affectation à Piaget de cette boutique, une fois que Jaeger-LeCoultre aura réintégré ses nouveaux locaux de la place Vendôme : effectivement, c’est un bruit qui court dans les couloirs de Richemont, à la Cité du Retiro. Pourquoi pas, demain, IWC ou A. Lange & Söhne ? On aura reconnu dans ce genre de procédés l’élégance naturelle des technocrates du luxe aux commandes chez Richemont : si les détaillants parisiens voulaient une preuve des usages cavaliers avec lesquels ils seront traités - c’est-à-dire stangulés dans l’ombre comme des janissaires ottomans devenus gênants -, autant observer ce qui se passe avec Chronopassion…
••• D’autant que la volonté de parasitage de Chronopassion est manifeste : la future boutique Jaeger-LeCoultre étant en travaux, il suffit d’y pénétrer pour comprendre que ce « placard à balais » est indigne de la marque tout comme le fait d’ouvrir à côté de Chronopassion est indigne des codes de politesse de l’horlogerie européenne. Que vient faire Jaeger-LeCoultre dans ces vingt mètres carrés un peu ridicules dès qu’il y aura des vitrines ? On pourra y parler d’affluence dès qu’il y aura plus… d’un client ! Ce sera tout aussi ridicule pour Piaget, qui doit entamer prochainement des travaux dans sa boutique de la place Vendôme. S’il est parfaitement légitime que Jaeger-LeCoultre ouvre un point de vente provisoire pendant la réfection de son espace vendômois, autant le faire dans un voisinage horloger valorisant (mais pas pile à côté de Chronopassion) et dans des volumes qui ne soient pas dévalorisants (donc, ailleurs que dans une boîte à chaussures)… |