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La course aux très hautes fréquences prend de l'ampleur et l'affaire Old England (si bien nommée) se complique sur le plan administratif...
POUR CETTE FIN DE SEMAINE, AVEC L’ACTUALITÉ DES MONTRES EN LIGNE DE MIRE, LE SNIPER DU VENDREDI A...
1)
••• SALUÉ LES 2 000 HZ
D’UNE NOUVELLE « RÉSONIQUE HORLOGÈRE » (DE BETHUNE),
QUI RECADRE LA NOUVELLE COURSE AUX ULTRA-FRÉQUENCES...
1 000 Hz, 2 000 Hz aujourd’hui, 10 000 Hz dans quelques mois : pourquoi pas, mais cela a-t-il du sens ? Non, si c’est pour une course aux records de hautes fréquences, histoire de faire la nique – ce qui rime avec résonique ! – aux 500 Hz de TAG Heuer. Oui, si c’est la première ligne d’un nouveau chapitre de l’art mécanique horloger, avec une accélération réellement quantique des performances énergétiques d’un mouvement et l’ouverture d’un fabuleux champ d’explorations méta-physiques – au sens « lourd » du terme : « au-delà de notre physique » – qui reprennent tout à zéro, en revenant aux premiers balbutiements de l’horlogerie pendulaire (Christiaan Huygens) et aux travaux sur les spiraux de l’abbé physicien français Jean de Hautefeuille, qui travaillait en parallèle à Huygens...
••• Tout ça pour dire que Denis Flageollet (De Bethune) et son équipe, encore tout auréolés de leur récent Grand Prix de l’Aiguille d’Or (Grand Prix de Genève) viennent d’opérer une percée significative dans la chronométrie, en créant une nouvelle « résonique horlogère », capable – à terme – de chronométrer des temps très courts au dix-millième de seconde pendant plusieurs heures ! Percée sur laquelle nous reviendrons longuement par la suite tellement elle va marquer la micro-mécanique horlogère, ordonnée ici à l’univers des vibrations naturelles et des énergies magnétiques grâce à un concept hyper-innovant d’« oscillateur à fréquence sonore » : attention, il ne s’agit plus ici de manier les brucelles avec la loupe à l’œil, mais de jongler avec des équations différentielles sous l’œil vigilant de Siddhartha Berns, le jeune physicien qui assure le soubassement théorique de ce nouvel échappement sans balancier spiral ni... échappement traditionnel, calé sur des vitesses hallucinantes !
••• Le plus amusant (et sans doute le plus moderne) de cette nouvelle démarche de l’équipe R&D de De Bethune reste sans doute son aspect open source offert à toute la communauté horlogère : sans faire de jeu de mots sur le prénom du Siddhartha en question, il y a dans cette attitude bouddhiste d’ouverture au monde et de partage collaboratif un marqueur typique de la nouvelle génération horlogère. Pas de brevet, juste la mise en commun d’un faisceau de nouveaux principes résonico-dynamiques pour les beaux-arts de la montre. Pas de protection jalouse, juste la publication du fruit de recherches passionnées et d’une créativité mécanique débordante qui nous prouve – s’il en était besoin – que De Bethune ne fait pas que des belles montres ou des bonnes montres : en plus de la pratique, la manufacture – qui a tout développé en interne – maîtrise aussi la théorie. Pas de souci, on y reviendra !
2)
••• TROUVÉ LE NOM DU FUTUR CARAVANSÉRAIL HORLOGER
QUE LE SUISSE BUCHERER OUVRIRA BIENTÔT À PARIS AVEC LE GROUPE RICHEMONT...
Eh bien, ça devrait tout simplement s’appeller « Old England » ! Bien obligé, apparemment ! Ce n’est pas une blague, mais, après vérification auprès de l’administration concernée, il semblerait que les vitrines extérieures en bois de palmier de l’actuel magasin soient protégées comme « monument historique » (« inscrites » en jargon de la Direction des Affaires culturelles). Tout comme la façade (y compris le nom « Old England » qui y figure) et le grand escalier intérieur. Il semblerait cependant que les responsables du groupe Richemont aient « oublié » de mentionner ce petit détail administratif au groupe Bucherer, qui devra se contenter d’une timide mention de son nom sur une façade considérée comme partie intégrante du « patrimoine commercial » de la capitale, dans le périmètre protégé de l’Opéra.
••• Ce sera donc vraisemblement « Old England » pour les siècles des siècles : pas facile d’expliquer aux pékins pékinois qu’ils doivent acheter leurs montres suisses dans la vieille Angleterre ! Pire : avec cette protection au titre des « monuments historiques », plus question de planter le moindre clou dans l’escalier sans demander la permission à l’architecte des monuments historiques. Plus question évidemment de visser la moindre enseigne supplémentaire sur la façade extérieure : on peut imaginer que la moindre demande officielle de « permis de construire » (aménagement, réaménagement ou autre) sera suivie de très près par les concurrents de Bucherer. Pauvres Suisses allemands : bienvenue dans l’enfer de la bureaucratie ministérielle française !
••• La révélation par Business Montres de la note interne de Bucherer confirmant l’opération (6 décembre) a évidemment relancé l’attention des médias sur ce dossier, mais cette fois avec de larges citations de votre Quotidien des Montres, jusque dans The Himalayan Times (Népal), ce qui n’est pas rien ! Même Tribune de Genève (Suisse) a fini par s’apercevoir d’une information que la rédaction avait sous le nez depuis un mois ! Idem pour 20 Minutes, mais il n’y a jamais le feu au lac.
••• En revanche, l’autisme du groupe Richemont devient problématique : « Nous ne commentons pas les spéculations », répond la direction du groupe quand on l’interroge sur ce dossier. Bizarre, cette « spéculation » confirmée par le principal intéressé, Bucherer, dont le mail de confirmation circulait de façon tellement ostensible à l’état-major Richemont de Bellevue, près de Genève, qu’il y a été intercepté pour être révélé par Business Montres...
3)
••• DÉCIDÉ QU’IL SUFFISAIT D’Y CROIRE
POUR QU’UNE MARQUE DE MONTRES DEVIENNE « MADE IN FRANCE »...
Il suffit même de le dire, en choisissant bien ses mots, pour que les perroquets du web lancent leurs trilles. Exemple avec une nouvelle marque, Myno Time, qui devient la référence # 79/Génération 2011. Myno Time se présente comme « une jeune entreprise française qui se lance sur le marché hyper-concurrentiel de l’horlogerie avec un concept produit original et une approche “Made in France“ singulière... (...) Nos montres Myno Time sont produites en Auvergne et dans la région de Besançon... (...) La philosophie de l’entreprise est simple : nous misons sur la qualité et savoir-faire de nos PME françaises, la modularité des produits, l’intelligence des clients pour proposer une offre alternative attrayante sur le marché de l’horlogerie » – là, c’est Jérôme Cornu, le fondateur de Myno Time qui parle...
••• Très sympathique tout ça, mais Myno Time aurait tendance à... minorer l’intelligence de ses clients ! Quoi de plus « singulier » qu’une montre à 179 euros qui s’affirme « fabriquée en France », mais avec un mouvement suisse et un boîtier chinois ! Accordons le privilège du doute au bracelet, dont l’origine française est plausible, mais on a de sérieux doutes pour le cadran, les aiguilles et la lunette, composants commandés en France à l’établisseur final – que ne les a certainement pas trouvés danss son environnement industriel franc-comtois. Accordons en revanche une citoyenneté stylistique française au design, à la french touch du concept et au culot de la proposition ! Que peut-on demander de plus à ce prix (coffret « modulaire » à composants interchangeables : une montre et deux blocs bracelet-boîtier sans tête de montre) ?
••• Il est vrai que la législation sur le « Fabriqué en France » est encore plus laxiste que celle du Swiss Made puisque, selon les Douanes françaises, « la détermination de l'origine doit être effectuée en appréciant, cas par cas, chaque opération de transformation ou d'ouvraison au regard du concept de dernière transformation ou ouvraison substantielle tel qu'il est définit par l'article 24 du code ». Autrement dit, pour une montre, il suffit qu’elle soit terminée en France pour devenir « fabriquée en France » (seul label officiel dans ce domaine). Myno Time ne triche pas avec cette appellation : la marque crée seulement un joli storytelling autour de son offre, en surfant sans vergogne sur la vague actuelle du nouveau nationalisme économique (voir, à ce sujet, le dernier article de Business Montres : « “Buy French“ Becomes Battle Cry for Politicians in France »)...
4)
••• REGRETTÉ D’AVOIR PERDU SON TEMPS
À L’ASSEMBLÉE ANNUELLE D’AUDEMARS PIGUET, AU BRASSUS...
Tout le monde était mobilisé pour cette super-séance, très... sécurisée comme il se doit, mais il n’en est sorti qu’une présentation des nouveautés 2012 pour le quarantième anniversaire de la Royal Oak - on s’y attendait quand même un peu ! - et une nouvelle organisation de la communication autour d’un nouveau logo (restylé), d’une nouvelle signature (ce sera « Audemars Piguet Le Brassus » et non plus « Audemars Piguet le maître de l’horlogerie depuis 1875 »), d’un nouveau site Internet, d’une nouvelle campagne de publicité et d’un nouveau concept commercial pour les boutiques...
••• Légère déception des cadres et des troupes, parfois teintée d’ironie (ou même d’un scepticisme rigolard), lors de la présentation d’un nouveau « principe d’appartenance » à la grande famille Audemars Piguet, à travers les « confessions » vidéo des cadres dirigeants : so what ? Adieux et bonnes fêtes de Philippe Merk, qui a donné rendez-vous à tout le monde le mois prochain, pour la nouvelle année : ceux qui lui ont serré la main comme pour lui prendre le pouls en ont été pour leurs frais. Circulez, il n’y a rien à voir – quoiqu’il y ait à prévoir !
5)
••• DÉNICHÉ QUELQUES INFORMATIONS HORLOGÈRES
EN VRAC, EN BREF ET EN TOUTE CURIOSITÉ ÉDITORIALE...
••• DE WITT : belle réussite pour la nouvelle Twenty-8-Eight automatique, dont les lignes dynamiques ensoleillent le poignet. On dira de cette montre qu'elle est « urbaine et classique » dans sa sobriété, quoique gentiment démonstrative avec ses 43 mm, les volumes de son boîtier et les effets de son cadran. Heures-, minutes et secondes avec des finitions raffinées : What Else ?
••• PÉQUIGNET : Didier Leibundgut s’enthousiasme de voir qu’un hit-parade de la presse horlogère au Japon a placé Péquignet « à la première place mondiale, devant les 25 plus grandes marques suisses. Ce n’est jamais arrivé à aucun horloger suisse » ! Mieux que Lip ! Diable, et ces pauvres horlogers suisses qui n’avaient rien vu venir... C’est L’Est républicain (France) qui nous l’apprend, mais en prenant le soin de nous préciser que « Didier Leibundgut ne parle pas le japonais, mais à force... » ! En revanche, il sait compter : il rêve d’embaucher 500 personnes pour « capter 1 % du marché mondial des montres mécaniques ». Un ratio qui va également frapper de terreur les horlogers suisses...
••• URWERK : à propos de la pendulette Cartier à « heures défilantes » qui vient de faire un malheur aux enchères (vente Sotheby’s New York : Business Montres du 7 décembre, info n° 5, et analyse technico-historique du 3 décembre), une explication historique tardive, touchante, mais définitive : c’est parce que son propre père avait réparé des pendules à échappement silencieux des frères Campanus à échappement silencieux que Felix Baumgartner (le co-créateur d’Urwerk) a eu l’idée de reproduire dans une montre-bracelet ce principe d’heures « glissantes ». L’idée de l’échappement silencieux logé dans ces pendules ne lui avait pas non plus échappé, avec leur ressort monté sur l’ancre pour absorber le contact-impulsion de la roue d’échappement : un indice pour les futures Urwerk ?
••• « LE MONDAIN » : c’est le nouveau magazine numérique des « experts lifestyle ». Le Mondain souligne sa vocation cosmopolite avec les horloges de Paris et de New York, mais enfonce quelques portes ouvertes en présentant sous le titre « Les dîners très privés de Cartier » les locaux commerciaux de la marque, rue de la Paix, qui sont ouverts à tous ceux qui prennent la peine de pousser... la porte. Pas mal pour une « adresse secrète »... Autre terrible exploit d’expert lifestyle : l’interview de Thierry Ardisson par Eric Naulleau ! Mais où vont-ils chercher des rencontres aussi « exceptionnelles » ?
6)
••• EXPLIQUÉ À DE NOMBREUX LECTEURS
LE RÉGIME ALLÉGÉ DE « BUSINESS MONTRES » DANS LES PROCHAINES SEMAINES...
Dans les semaines qui viennent, sans sacrifier les informations vraiment déterminantes, Business Montres fonctionnera en régime allégé pour mieux préparer la nouvelle version du site (accès payant réservé aux abonnés pour les trois-quarts des informations) et ses nouvelles fonctionnalités (réellement plus fonctionnelles que l’actuelle architecture « préhistorique »). Pour rire un peu, ne pas manquer la campagne « Libérez l’information horlogère », qui détourne au profit de la cause horlogère une campagne anti-censure de Reporters sans frontières (Business Montres du 3 décembre)...
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