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BAUME & MERCIER - La revitalisation intégrale
 
Le 15-02-2012

La seule marque de volume de Richemont profite déjà des effets d’un recentrage attendu.

Baume & Mercier occupe une place à part dans l’univers Richemont. Géographiquement d’abord, puisque c’est la seule fililale dont le siège jouxte la direction du groupe, à Bellevue Genève (la marque compte encore une unité d’assemblage aux Brenets, Neuchâtel, et une entité logistique dans le canton de Fribourg). En termes de positionnement ensuite, étant la seule occurence moyen de gamme du groupe (segment moyen 2000-5000 francs). La marque est entrée dans le portefeuille du groupe avec la reprise de Piaget.

Historiquement, Baume & Mercier avait été acquis par la famille Piaget pour construire l’entrée sur la montre de volume, sur des segments de prix abordables. Une vocation plus orienté positionnement que contenu horloger, qui a conditionné un développement manufacturier focalisé sur l’assemblage de composants industriels, hors des stratégies de verticalisation dont les autres fabriques du groupe bénéficient aujourd’hui. Un héritage presque vécu comme un handicap: Baume & Mercier a toujours été perçue comme une particularité, en décalage avec l’approche résolument haute horlogerie et hauts segments de Richemont. Une exception qui a freiné d’une manière ou d’une autre le développement de la marque, malgré toutes sortes de tentatives. La communauté des analystes notent depuis plusieurs années Baume & Mercier parmi les points faibles de Richemont.

Défaut de construction? Défaut d’image? Toujours est-il que le point faible fait l’objet d’un recentrage net et clairement perçu. Il y a un peu plus de deux ans, la maison est placée sous la tutelle de Georges Kern, à la tête d’IWC Schaffhouse (également président des montres Roger Dubuis, Genève) et figure forte du (re) branding chez Richemont. Les premiers signes de changement sont immédiats. En particulier le départ de Michel Nieto, après 7 ans à la direction de Baume & Mercier et le renouvellement du management autour d’Alain Zimmermann, ex-IWC et proche de Georges Kern.

La reconstruction interne se poursuit jusque dans la distribution, entièrement redessinée. En 2011, la marque se présente enfin au salon de l’horlogerie de Genève avec un catalogue produits totalement épuré, recentré sur l’inspiration des lignes historiques, et une approche marketing complètement revisitée, sur la thématique familiale et patrimoniale du «seaside living». Les efforts de clarification sont largement relayés par la presse spécialisée. Une année plus tard, la direction annonce déjà des effets significatifs (les chiffres ne sont jamais précisés). Alain Zimmermann revient sur les grands axes du repositionnement.

Stéphane Gachet: Tout le monde a observé le travail de clarification des collections effectué depuis bientôt deux ans. Quels en sont les effets?
Alain Zimmermann: Le sell out! Nous ne donnons pas de chiffre, mais je peux vous dire que le niveau d’acceptation des nouvelles collections est excellent.

Rien de factuel?
On peut clairement mesurer que tous les relais de notoriété ont fonctionné. Nous avons retrouvé une visibilité dans les points de vente. Nous sommes la marque numéro un sur Twitter. Nous comptons 230.000 amis sur Facebook. Et il y a encore deux ans, nous n’aurions jamais eu autant de présence dans la presse.

En termes de débouchés?
La marque reste très forte en Europe et aux Etats-Unis. La relance nous a permis de nous renforcer encore sur ces débouchés.

Et l’Asie?
Nous étions déjà présents en Asie, mais jamais à un niveau suffisant. Nous sommes toujours à l’étape de la construction. La première phase a surtout été une opération de nettoyage: nous avons fermé la moitié des points de vente.

Quel est l’objectif sur l’Asie?
L’Asie est l’une de nos priorités. L’objectif est d’atteindre ce qu’elle représente pour l’ensemble du secteur. Le potentiel est important et nous ne l’adresserons pas au détriment des débouchés historiques.

Reste-t-il des marchés à ouvrir?
Non. Il y a surtout des marchés à travailler et à ajuster selon les spécificités locales, l’Amérique du Sud et le Moyen Orient par exemple. Une affaire d’ajustement fin plus que de remaniement en profondeur. Ma mission est de ramener la marque à sa juste place dans l’industrie et de regagner des parts de marché dans la montre féminine. Pour cela, nous devons être plus proches des marchés. Nous avons toujours eu des équipes en place, mais il fallait les renforcer.

Revenons à votre arrivée, qui a marqué une refonte presque intégrale de la marque, mais ce n’est pas le premier recentrage. En quoi est-ce différent cette fois?
Mon arrivée et celle de Georges Kern marque le recentrage le plus fort et le plus global. Nous n’avons pas fait de fine tuning, le message a été clairement délivré. Au cours des 24 derniers mois, nous avons procédé à un assainissement total et nous avons mis en place une stratégie. Nous commençons maintenant à écrire un nouveau chapitre à 360 degrés.

L’un des grands chantiers a été la distribution.
Nous avons divisé le nombre de points de vente par deux, soit de plus de 3000 à quelque 1600 dans le monde. L’objectif était de regagner en exclusivité et de nous assurer de profiter d’un bon environnement de marques. La transition a été faite en douceur, sur plus d’une année.

Quels ont été les critères de sélection?
Le détaillants doit développer une vraie stratégie horlogère multimarque. La clientèle a besoin d’être initiée. Nous avons par exemple fermé près de 500 points de vente problématiques, dans des centres commerciaux aux Etats- Unis.

Pas de boutiques en propre?
Nous n’avons pas de vocation retail.

Le deuxième élément le plus visible a été la redéfinition des collections.
Nous sommes passés de plus de 200 références à moins de 80. Nous avons entièrement revu notre politique produit et nous avons eu le courage s’arrêter certaines collections. C’est un travail de redéfinition et de recentrage sur les codes design propres à l’histoire de la marque: la rondeur, la couleur des cadrans, les chiffres arabes plus que romains.

En lien direct, vous avez aussi révisé l’univers de la marque.
La réflexion a été au centre de toutes les décisions prises au niveau design. Nous avons défini un territoire que l’on comprend de manière naturelle, le seaside living façon Hamptons. Cela fait partie du changement radical. Nous avons touché à tous les paramètres en même temps, jusqu’au packaging. Un véritable exercice de style: avoir une idée directrice et la décliner sur l’ensemble des points de contact.

Influence moins visible, mais tout aussi radicale sur le management, qui a été complètement renouvelé.
Nous avons ajusté toutes les structures et procédé à un enrichissement global des compétences, dans la communication, dans le commercial, que nous avons renforcer avec des équipes dédiées, en particulier en Asie.

Qu’en est-il des investissements?
Les investissements sont concentrés sur les marchés où nous devons renforcer la notoriété.

Toujours pas de stratégie de verticalisation? La maison n’a jamais développé d’approche de type manufacture, n’est-ce pas un handicap?
Notre approche actuelle est de nous appuyer sur les entités du groupe. Même si nous fonctionnons à travers la sous-traitance, il est indispensable de maîtriser la production dans nos contraintes de prix. La verticalisation n’amène aucune réponse de ce point de vue. Nous avons déjà intégré tous les métiers indispensables, création et surtout le développement technique et l’assemblage. Des métiers décisifs sur notre segment de marché, où il n’y a aucune tolérance pour les écarts de qualité.

AGEFI - 14 février 2012

Propos recueillis par Stéphane Gachet

 



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