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Coups de théâtre et coups de gueule, coups de génie et coups de sifflet, coups tordus et coups fumants : à tous les coups, on gagne !
C'est la grande chronique du village horloger avec Baselworld à bout touchant...
POUR CETTE FIN DE SEMAINE, AVEC L’ACTUALITÉ DES MONTRES EN LIGNE DE MIRE, LE SNIPER DU VENDREDI A...
1)
••• SOURI DES PETITES CACHOTTERIES
DE TAG HEUER, QUI BUZZE SANS BUZZER TOUT EN BUZZANT TRÈS FORT...
Passons sur les nouveautés dans les collections classiques, spectaculaires puisque TAG Heuer débarquerait à Bâle avec plusieurs centaines de nouvelles interprétations des piliers de la marque. Ne pas manquer, entre autres, une nouvelle Carrera deux compteurs, avec un intéressant Calibre 17, qu’on nous dit destiné à célébrer les 80 ans de Jack Heuer, président d’honneur de TAG Heuer. Du côté des « concept watches », on reverra évidemment le Mikrogirder dévoilé à Genève, dans une nouvelle interprétation de son affichage du 1/2000e de seconde et des nouvelles avancées sur le Mikrotimer au 1/1000e de seconde présenté l’année dernière (amélioration spectaculaire de la réserve de marche). Côté industriel, on est curieux de savoir où en est le projet de « certification chronographique » : sur combien de secondes peut-on garantir (et certifier) un chronographe au 1/2000e de seconde ? Les amateurs vont très vite se poser la question...
••• TAG Heuer ayant fait de 2012 son « année de la femme », il y aura les inévitables versions serties et recolorées des icônes de la marque, mais il faut s’attendre à une « concept watch » féminine – ce qui est presque plus audacieux pour les femmes que pour les hommes. Groundbreaking, vraiment ? L’attente est forte. Faut-il classer sur ce versant féminin le « tourbillon le plus tourbillonnant de tous les temps » dont on parle dans les couloirs de La Chaux-de-Fonds. On nous a déjà promenés de la Lune à Mars, puis à Saturne : pourquoi pas un détour par Vénus ?
••• Au fait, si « tourbillon tourbillonnant » il y a, qu’il soit pour les filles ou pour les garçons, de chez qui provient-il ? Aux dernières nouvelles, TAG Heuer ne disposait pas encore d’un atelier de haute horlogerie capable de travailler sur cette complication – mais les constructeurs ne manquent pas dans le voisinage chauxdefonnier...
••• Comme toujours, le plus amusant sera dans les tiroirs et dans les poches de Jean-Christophe Babin ou de Guy Sémon. A peine aura-t-on découvert Baselworld 2012 qu’on sera déjà en train de rêver de 2013 : c’est désespérant, cette course contre le temps...
2)
••• ENTENDU DES ÉCLATS DE VOIX ET DES PORTES QUI CLAQUENT
CHEZ DEWITT, OÙ LA COMTESSE JUTHEAU DE WITT SEMBLE VOULOIR FAIRE LE MÉNAGE...
La femme de Jerôme De Witt a débarqué cette semaine dans les locaux de la manufacture, à Meyrin, un peu comme un shérif de western s’engouffre dans le saloon avec l’intention d’en découdre avec les outlaws ! En 2011, tout semblait pourtant à peu près remis en ordre à la manufacture : la marque disposait enfin d’une stratégie cohérente, d’une équipe motivée et de bons produits. DeWitt avait su mener une discrète, mais efficace politique de requalification et de (re)développement de son réseau international. Ce regain de consistance et de légitimité – sur un marché de plus en plus difficile pour les « petites marques » – n’a cependant pas remis l’entreprise à flots comme elle l’espérait. Les problèmes lancinants de trésorerie de la marque n’étaient plus un secret à Genève, ni les retards dans le paiement des salaires. Les différentes négociations menées pour le rachat de la marque – avec des investisseurs suédois ou asiatiques (notamment les Chinois d’Haidian) – ont eu tendance à avorter les unes après les autres devant les complications souterraines relevées par tous les repreneurs. Les fournisseurs créanciers étaient au bord de la révolte, sinon du dépôt de plainte. Bref, rien n’allait plus vraiment, sans réelle perspective d’amélioration à court terme, ni visibilité à moyen terme...
••• Une situation qui ne pouvait pas convenir à une femme au sang vif comme la comtesse Viviane Jutheau De Witt, femme de Jérôme De Witt (le fondateur de la marque) et détentrice du capital : elle a donc décidé d’intervenir, avec toute la franchise qu’on lui connaît dans la gestion des ressources humaines. Éclats de voix, engueulades de couloirs, épluchages des comptes, portes qui claquent, lettres recommandées et même mise à pied immédiate de la CEO, Nathalie Veysset, qui n’était d’ailleurs pas présente dans l’entreprise. Ambiance tendue et atmosphère explosive ! C’est la loi du business : quand les résultats ne sont pas à la hauteur des objectifs fixés, on change le capitaine ! Nathalie Veysset a certainement payé pour les faiblesses que les audits des repreneurs potentiels ont mis en lumière – faiblesses qui tiennent malgré tout beaucoup plus aux incohérences d’un modèle économique obsolète et aux stratégies hasardeuses du passé qu’à l’incompétence supposée d’une équipe de direction. On ne fait pas d’omelettes sans casser d’œufs...
••• Aux dernières nouvelles, alors qu’elle ne cachait pas son intention de « sortir » au plus vite de cette affaire horlogère (où elle aura décidément perdu beaucoup d’argent personnel), Viviane Jutheau De Witt reprendrait elle-même les choses en main – sinon les commandes de l’entreprise – avec le concours de Jérôme De Witt dans les semaines à venir. Semaines décisives puisqu’on est à bout touchant de la grand-messe bâloise. L’idée n’est donc plus d’attendre un racheteur providentiel, mais de tout remettre sur pied en misant sur la croissance interne pour relancer la marque : le track record de Mme De Witt dans le domaine économique étant aussi controversé que contrasté, les prochains mois s'annoncent chahutés...
••• A une semaine de Baselworld, cette reprise en main et ce licenciement de la CEO en poste sont pour le moins audacieux, sinon périlleux : nul doute que tout le monde regardera le stand DeWitt d’un autre œil, et qu’on serrera la main de Jérôme De Witt comme on prend le pouls d’un grand malade. Il n’est pas évident que cela encouragera les détaillants à passer commande – ce qui n’améliorera pas les comptes de la maison. Engrenage fatal ! L’urgence est à la restauration de l’indice de confiance : la marque reste forte et son créateur a gagné le respect, sinon la sympathie de tous. La maison DeWitt a sans doute encore quelque chose à dire, et une singularité à faire valoir sur le marché, mais comment l’exprimer de façon audible et surtout crédible ? Derrière le western se joue une autre tragédie : une cinquantaine d’employés sont aujourd’hui otages de facteurs émotionnels sur lesquels ils n’ont pas prise...
3)
••• REPÉRÉ DE NOUVELLES BONNES RAISONS
DE NE PAS MANQUER LE RENDEZ-VOUS DE CORUM À BASELWORLD...
Les nouveautés ne vont pas manquer ! De la plus marquante (une vraie « première mondiale » !), on ne vous dira rien tout de suite : attention les yeux ! On ne sait même pas encore si elle sera présentée à Baselworld, les horlogers ayant plus ou moins prévu de ne pas dormir pour terminer à tout prix le premier prototype. Une autre pièce forte sera une nouvelle Admiral’s Cup plutôt « bestiale », par sa taille (48 mm) et par son style très viril. Le crayonné nous révèle des angles sans concessions (image ci-dessus) et un cadran travaillé de façon inhabituelle : les compteurs sont cerclés au-dessus du verre saphir, en appliques. Esthétique décalée, mais heures et minutes décentrées à 12 h. Derrière ce « surcadran » en applique, on devine l’aiguille du chronographe, mais il se peut fort qu’il ne s’agisse pas d’un simple chronographe...
4)
••• COMPTÉ UN TOTAL DE 25 000 ACHETEURS
POUR LE GUIDE « THE WATCH ENTHUSIAST » (EN VENTE SUR iTUNES)...
Manifestement, il y avait une demande ! 25 000 clients payants à ce jour, sans la moindre opération de marketing (à part Business Montres, quels médias en ont parlé ?) pour découvrir les 2 144 montres des 105 marques déjà référencées dans ce « guide de l’acheteur » qui se permet de noter les marques : 10 333 photos et 202 vidéos. Des clients « spontanés », qui se contentent de la version anglaise, mais la version chinoise est lancée aujourd’hui, puis ce sera le tour de la version espagnole, de la française et de la japonaise (printemps 2012). Plus gros contingent : les Américains (5 000 acheteurs), suivis des Anglais (2 740, puis les Chinois (Singapour, Chine et Hong Kong). La France est au 8e rang avec 864 clients. Les plus petits clients sont Madagascar, Kenya, Ghana et Biélorussie avec un acheteur dans chaque pays. A noter 7 clients en Jamaique, 5 à l'Ile Maurice et au Sri Lanka, 22 au Vietnam et 49 au Pakistan ! La marque la plus regardée/chargée : Rolex, suivie d'Omega, d'IWC, Patek Philippe, TAG Heuer, Audemars Piguet, Jaeger-LeCoultre et Breitling. Objectif : 150 marques en juin, et 3 000 montres analysées, référencées et notées
5)
••• PRÉFÉRÉ NE PAS TROP DÉVOILER
LA PROCHAINE « OPUS 12 » PRÉSENTÉE À BÂLE PAR HARRY WINSTON...
Oui, au fait, qu’est-ce que devient cette Opus 12 ? Business Montres a déjà identifié l’atelier de construction qui en est chargé (on le trouvera entre Cormondrèche et les Geneveys-sur-Coffrane, aux portes de La Chaux-de-Fonds). On a également repéré le « responsable des savoir-faire horlogers » qui a piloté le projet pour le compte de la manufacture genevoise : que de lourds secrets sous son grand front ! Il serait donc facile de tout raconter, mais est-bien intéressant ? Contentons-nous de préciser que c’est une heures-minutes-secondes, sans hyper-complications mécaniques autres que dans l’affichage de ces fonctions horaires. Ni chaîne, ni rouleau, ni « planétaire », mais beaucoup de cames, de renvois et de pignons, avec des différentiels qui permettent d’inverser la course normale des affichages : des prouesses microtechniques au service de la micromécanique ! Le tout est réalisé dans un style plus spectaculaire à regarder (on travaille dans le style 3D) que réellement difficile à industrialiser : on sait que le passage en production de série – même limitée – a toujours été le talon d’Achille des concepts Opus...
6)
••• AIMÉ LE NOUVEAU CONCEPT DE iPOD NANO-MONTRE DE POCHE,
QUI S’ANNONCE CAPABLE DE RAMENER À LA MONTRE UNE GÉNÉRATION DE NON-PORTEURS...
C’est une idée du designer australien Edwin Conan : plutôt que de porter au poignet son iPod Nano, autant en faire une « montre de poche » de nouvelle génération. Il a pensé son IpocketWatch (iPW) comme un mini-container en aluminium au bout d’une chaîne, totalement fonctionnel (on se sert « normalement » de son iPod Nano) et facile à glisser dans une poche de veste ou de pantalon (idéal pour le gousset d’un jeans). Rien de difficile à produire, un style très réussi et un appel au peuple numérique pour mettre en chantier un projet très générationnel : tous les ingrédients du succès sont de son côté ! En attendant la future iWatch promise par Apple (ce sera immanquablement une révolution dans l’horlogerie, pour des raisons plus sociétales que commerciales), cette IPW peut redonner le goût des montres à des générations qui se contentent de l’heure sur le cadran de leur téléphone...
7)
••• NOTÉ QUELQUES ACTUALITÉS HORLOGÈRES
À LA VOLÉE, EN VRAC, EN BREF ET EN TOUTE LIBERTÉ...
••• CHAISES MUSICALES (1) : Estelle Tonelli (ex-MB&F), qui avait fait un détour par la manufacture Harry Winston, revient au cœur du vieux Genève, à un jet de pierre de ses anciens bureaux MB&F, en prenant la direction de la communication de DeLaneau, aux côtés de David Gouten. On la retrouvera à Baselworld dans quelques jours...
••• CHAISES MUSICALES (2) : après quatre années de « mission impossible » chez DeWitt, où elle était une des rares femmes CEO de l’horlogerie, Nathalie Veysset (ex-Crédit suisse) a été brutalement débarquée par son actionnaire - voir ci-dessus, info n° 2. On ne la retrouvera donc pas à Baselworld dans quelques jours...
••• BILL’S : une nouvelle vidéo-promo pour ce nouveau concept horloger suisse, sur la base des montres « slap » – enroulage automatique du bracelet autour du poignet – imaginée à Hong Kong. C’était une découverte Business Montres du 20 mai dernier. Pleine de fraîcheur et bonne humeur, la vidéo, très générationnelle et bon enfant (tournée sur les bords du Léman) est à découvrir sur la chaîne images de votre Quotidien des Montres
••• EBEL : la marque joue une partie de sa survie sur le lancement d’une nouvelle collection à Baselworld, en ciblant avec beaucoup de circonspection une nouvelle génération de femmes à travers un réseau très sélectif de détaillants. Des ambitions revues à la baisse pour une marque toujours en mutation alors qu’elle est très exposée aux évolutions du marché (analyse Business Montres du 2 mars)...
••• HYT : la buzzy brand de Vincent Perriard s’offre un nouveau film d’animation à quelques jours de Baselworld, au cas où il aurait encore un internaute amateur de montres qui ignorerait tout de ce concept « hydro-mécanique » d’affichage fluidique (à visionner sur la chaîne images de Business Montres)...
••• ICE-WATCH : c’est la fin des emballages Ice-Watch en forme de briques Lego. C’était une des plus belles idées de packaging horloger de ces dernières années, mais, en appel, et sur la forme plus que sur le fond, Ice-Watch vient une nouvelle fois de perdre son procès contre Lego – mais il reste à la marque belge d’autres possibilités d’appel...
••• JACOB & CO : un bon conseil, passez sur le stand de Jacob & Co à Baselworld ! C’est inattendu, mais il y a de la haute complication créative dans l’air – dans un registre beaucoup plus horloger que spectaculaire...
••• RJ-ROMAIN JEROME : confirmation d’une prochaine montre « Pac-Man » (anticipation Business Montres du 25 février), avec l’annonce d’une collaboration entre la marque et la Namco Bandai Games, qui détient les droits sur Pac-Man et qui a autorisé la création de montres « thématisées Pac-Man » (utilisation de personnages sous licence). Il s’agit de la seconde montre de ce genre pour RJ-Romain Jerome, qui avait déjà lancé une montre « Space Invaders » : les jeux vidéos sont des « légendes contemporaines et générationnelles »
••• REGLISSE : sans « é » accent aigu, ça fait plus chic ! La nouvelle marque de bijoux accessible de Renaud de Retz (ex-Hautlence) s’offre un jolie brune pour présenter ses jolies bagues dans une amusante vidéo de présentation (à retrouver sur la chaîne images de Business Montres)...
••• ROLEX : info ou intox, cette Sky-Dweller, dénomination récemment déposée par la marque à la couronne ? C’est en tout cas la plus belle rumeur pré-Bâle, avec le lancement d’une nouvelle Submariner sans date à lunette céramique et d’une GMT-Master II à lunette « Pepsi » (bleu-rouge) en céramique dont Business Montres avait déjà parlé (13 février, info n° 3). On parle un peu moins d’une « petite complication » de type phases de lune – et c’est bien dommage ! Pour ce qui est de la Sky-Dweller : indice de crédibilité assez faible, mai sait-on jamais avec Rolex...
••• SWATCH GROUP (1) : excellente plaisanterie de Nick Hayek, le président, lors de la présentation de ses résultats annuels aux analystes. Il portait une Swatch édition spéciale « Occupy your Wrist », dédiée implicitement aux « Indignés » qui occupe Wall Street pour protester contre les grands banquiers. Cette Swatch, qui ne sera pas commercialisée, sera néanmoins distribuée aux actionnaires lors de leur assemblée générale, à Bienne, en mai prochain...
••• SWATCH GROUP (2) : une question n’a pas été posée par les analystes lors de cette présentation des résultats du groupe. Derrière les chiffres (excellents) et le réalisme du président (qui a bien anticipé et reconnu le ralentissement chinois), le non-renouvellement de la haute direction du groupe reste problématique. On garde les mêmes et on recommence : pourquoi pas, puisqu’ils n’ont pas démérité, mais ne faudrait-il pas préparer le relève ? Ce qui n’est pas le cas, pour aucune des marques-phares du groupe (celle qui pèsent dans le chiffre d’affaires et dans l’EBITDA : Omega, Tissot, Longines, Swatch). Réponse non officielle : la gestion des ressources humaines ne repose pas, dans la culture interne du groupe, sur le caractère d’un homme, mais sur la force de la structure qu’il anime – ce qui permet aux marques de pouvoir se passer de tête d’affiche pendant de longues périodes (c’était pendant longtemps le cas pour Swatch, mais on a vu les limites de cette pratique, et ça pourrait l’être demain pour Omega, Tissot ou Longines)...
••• DOSSIER SINCERE-HENGDELI : qui est la « dame de platine » qui tire les ficelles dans cette création d’un méga-réseau indépendant capable d’inverser le rapport de forces avec les marques suisses ? Une descente dans les coulisses de la nouvelle nomenklatura capitalo-communiste chinoise (nouvelles révélations Business Montres du 1er mars, mais la presse asiatique n’a toujours identifié le volet Hengdeli de l’opération (alors que c’est la vraie clé stratégique de la manoeuvre)...
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