|
C’est une solution industrielle entre industriels de la montre : motoriste de nombreuses marques indépendantes, la manufacture La Joux-Perret aurait pu passer sous la coupe d’un groupe et cesser, à terme, ses approvisionnements en mouvements.
Il n'en sera rien : l'indépendance semble assurée durablement...
••• UN BASTION DU « SWISS MADE » CONSOLIDÉ
PAR LES CAPITAUX JAPONAIS D’UN GROUPE HORLOGER...
Paradoxalement, le choix de Citizen – un groupe japonais qui figure parmi les dix premiers dans le monde – est un choix indépendant dans la mesure où l’opérateur japonais entend raisonner en termes de stratégie industrielle sur un marché menacé de pénurie par la réduction des approvisionnements jusqu’ici assurés par le Swatch Group.
••• La Joux-Perret représente aujourd’hui une capacité d’environ 50 000 mouvements par an (modules compris) : la manufacture de La Chaux-de-Fonds était devenue, ces dernières années, la providence des marques indépendantes, mais quelques groupes (notamment LVMH) n’hésitaient à s’y fournir en calibres ou en composants. On verra à Baselworld, que ce soit avoué ou gardé confidentiel, une bonne quinzaine de mouvements d’origine La Joux-Perret chez différentes marques, à commencer par le superbe mouvement extra-plat squelette de la nouvelle Classic Fusion chez Hublot (image ci-dessus)...
••• Citizen devrait apporter à La Joux-Perret une envergure industrielle crédible, tout en lui donnant les moyens de mettre en place une nouvelle offre dans d’autres domaines stratégiques. Par exemple, les spiraux, dont Citizen maîtrise parfaitement la technologie pour ses mouvements Miyota : de quoi desserrer le carcan de Nivarox et assurer, toujours en Swiss Made une offre alternative aux marques suisses...
••• C’est probablement la question de ce Swiss Made qui sera débattue autour de ce rachat. Il serait vraiment étonnant que Citizen, qui a fait là un investissement industriel, tue la poule aux œufs d’or en se permettant le moindre écart – si bien que les mouvements La Joux-Perret seront probablement, dans les années à venir, les plus rigoureusement conformes que jamais à l’esprit du Swiss Made ! Ce qui n’est pas forcément le cas des autres motoristes suisses. En revanche, les marques « suisses » du groupe Citizen (par exemple, Bulova) devraient trouver des mouvements à leur disposition chez La Joux-Perret...
••• Selon Citizen, « le but premier de cette transaction est de renforcer la manufacture La Joux-Perret en tant que producteur indépendant de mouvements mécaniques et de composants. Nous utiliserons également des mouvements mécaniques produits par Manufacture La Joux-Perret pour les collections swiss made de nos propres marques et de celles sous licence et les différencierons ainsi des autres produits haut de gamme ».
••• Selon Frédéric Wenger, qui conserve son fauteuil de CEO, « en combinant la puissance financière du Groupe Citizen avec le savoir-faire du Groupe Prothor en matière de production de mouvements, nous créerons un acteur suisse encore plus fort dans le secteur du mouvement mécanique et des composants horlogers. La stratégie du Groupe Prothor est d’élargir encore d’avantage sa gamme de produits pour les marques d’horlogerie haut de gamme et d’être un partenaire fiable sur le long terme. Nous continuerons également à travailler étroitement avec tous nos fournisseurs actuels et partenaires de longe date ». Acceptons-en l’augure...
••• Dans la corbeille de la mariée, on trouve également Arnold & Son, qui passe donc sous la bannière de Citizen, dont ce sera la première marque de haute horlogerie et de complications suisses. Les quolibets seront faciles autour du nouveau pavillon japonais de l’ancien fleuron des « British Masters » : c’est juste un mauvais moment à passer...
••• On peut se réjouir de voir La Joux-Perret maintenir son statut de de motoriste « indépendant » dans l’actuel rapport de forces de l’horlogerie suisse. Les 160 emplois de la manufacture sont sécurisés et les développements en cours pérennisés. Ce qui constitue plutôt une bonne nouvelle pour l’industrie suisse en général, côté amont pour les fournisseurs indépendants et, côté aval, pour les marques indépendantes... |