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ACTUALITÉS : Les dix questions qu’il faut se poser après Baselworld 2012 (première partie)
 
Le 19-03-2012
de Business Montres & Joaillerie

Une bonne lecture de week-end !

Derrière les communiqués triomphants qui accompagnent la fermeture de Baselworld, quelques défis majeurs pour l’industrie horlogère.

• Ci-dessous : le volet # 1 des perspectives ouvertes par l’après-Bâle, pour passer en revue les difficultés exogènes.

• Le volet # 2 étudiera les problèmes endogènes...

POUR RESTER LUCIDE SUR L’ÉVOLUTION DE LA SITUATION, IL FAUT S’INTERROGER SUR...





1)
••• LA CYCLO-RÉSISTANCE SUPPOSÉE
(MAIS NON PROUVÉE) DE L’INDUSTRIE HORLOGÈRE, NOTAMMENT DANS LE LUXE...
À la veille de chaque crise, quand le paysage est encore brouillé, chacun s’évertue d’une part à nier la proximité du danger (en arguant des « excellents chiffres constatés »), d’autre part à vanter l’exception d’une activité horlogère crisis-proof. Il n’aura guère fallu que deux ans pour admettre que toute l’horlogerie a sévèrement plongée en 2008-2009 et il serait cruel de rappeler les noms de ceux qui répétaient, fin 2008, qu’il n’y avait pas de crise horlogère. Toute l’histoire horlogère prouve le caractère cyclique de son économie, avec des points bas qui résultent généralement d’erreurs marketing cumulées avec des handicaps conjoncturels, et des points hauts qui résultent d’opportunités commerciales mariées à des emballements économiques mondiaux.
Nous sortons d’une courte surchauffe (2010-2011) provoquée par la faible connexion des marchés émergents aux difficultés monétaires et financières occidentales : l’Asie a continué à accélérer sans se soucier du sort de Lehman Brothers ou de la Grèce, mais c’était au prix d’une dépendance croissante des économies euro-américaines.
Un cycle baissier semble s’amorcer, avec le reflux de la croissance chinoise (dont la demande massive a tiré les exportations horlogères), sans que les autres nouveaux marchés (Russie, Inde, Brésil) soient assez fortes pour compenser cette baisse de régime. Les fluctuations de change pénalisent les montres suisses face à un yuan volontairement déprécié. Les incertitudes internationales se multiplient. Sans moteur de rechange, l’atterrissage est inévitable, avec un retour à des rythmes de croissance à un seul chiffre, plus raisonnables et plus conformes aux capacités industrielles de la Suisse.
••• Peut-on échapper à cette fatalité cyclique ? C’est l’histoire du verre à moitié plein ou à moitié vide : on peut interpréter différemment les signaux donnés par les marchés, sans raison objective d’opter pour l’optimisme ou le pessimisme. Les sociétés cotées doivent envoyer des messages positifs sur leurs perspectives de croissance : on les cherche en vain dans la lecture des commandes passées aux fournisseurs à Baselworld et dans les investissements capacitaires planifiés, qui sont par nature des freins à la croissance des résultats (à court terme).
L’économie réelle n’est pas celle des marchés : les carnets de commande ne sont pas aussi pleins que ne le voudraient une lecture littérale du triomphalisme post-Baselworld. La question n’est plus de savoir si ça peut ralentir, mais quand et comment, à quelle vitesse et avec quelle intensité cela se produira...


2)
••• LA REPRISE AMÉRICAINE,
EN PASSE DE (RE)TOURNER À LA RÉCESSION...
Les Etats-Unis étant un grand marché pour l’industrie des montres (le deuxième derrière la Chine), son évolution est en corrélation étroite avec la santé des marques et des groupes horlogers. Apparemment, les bons indices distillés avant Baselworld semblent prouver une reprise : les détaillants américains présents à Baselworld avaient le moral. On peut cependant redouter un rechute, alors qu’on s’attendait à une « sortie de crise » : rien ne garantit que le « moteur » de l’économie américaine a redémarré et qu’il ne va pas caler brutalement, sous les effets conjugués d’une situation géopolitique incertaine (Iran, Irak, Afghanistan : l’« arc de crise » s’étend, les Etats-Unis sont impuissants et la Chine ou la Russie en profitent pour faire bande à part), d’une situation financière gravissime (endettement public, effondrement immobilier, possible krach des marchés, menace sur les institutions monétaires internationales), d’une récession sans relance possible (pour cause d’Etat en quasi-banqueroute) et d’une croissance trop ralentie dans les BRICS pour « tirer » l’économie américaine.
••• Aucune certitude, ni dans un sens (reprise), ni dans l’autre (rechute), mais des indicateurs à suivre de près : même s’il y a toujours eu des nouveaux milliardaires au cœur des pires crises économiques aux Etats-Unis, les marques de volume (autres que les manufactures de haute horlogerie) souffriraient gravement d’une nouvelle récession américaine...


3)
••• LA FRAGILITÉ D’UN « MOTEUR » CHINOIS
EN PLEINE INSTABILITÉ IDÉOLOGICO-ÉLECTORALE...
La lutte au couteau (et même pire : au croc de boucher !) est lancée dans les ténébreuses arrière-cours du Parti communiste chinois, à propos d’un possible changement d’équipe en fin d’année. Les tendances sont mouvantes entre les héritiers du maoïsme, qui affichent successivement des convictions autoritaires, puis libérales, et qui prônent des orientations tantôt néo-capitalistes, tantôt néo-autarciques. Tous les prétendants ont un rapport complexe au luxe européen, et notamment horloger. De leurs décisions – imprévisibles à ce jour – et de l’orientation générale de la politique économique du nouveau pouvoir dépendent la santé générale de l’industrie horlogère, la régulation de ses flux exportatoires et le réglage fin de ses équilibres commerciaux...
••• Pas la moindre hypothèse de travail crédible sur les changements en cours au sein de l’équipe dirigeante chinoise, ni sur les directives assignées à l’économie (reconcentration sur le marché intérieur, patriotisme économique, impérialisme commercial : tout est possible !). A surveiller de près, alors que deux montres suisses sur trois sont exportées vers l’empire grand-chinois et sa périphérie...


4)
••• LES GRANDES MANŒUVRES DANS LA DISTRIBUTION
DES MONTRES DE LUXE EXPORTÉES PAR LA SUISSE EN ASIE...
Les grands passeurs de commandes chinois ont désormais parfaitement intégré la stratégie de verticalisation commerciale des groupes de luxe européens et des grandes marques suisses, qui étaient jusqu’ici leurs partenaires privilégiés. La réaction est en cours pour reprendre la main et les intrigues se nouent en coulisses, l’opération Sincere (révélation Business Montres du 27 février) étant à la fois ultra-politique (à relier à tout ce qui se trame dans l’ombre au sein du Parti communiste chinois : voir, ci-dessus, point n° 3) et ultra-stratégique, en ce sens qu’elle donne le signal d’une reconfiguration des réseaux, au nez et à la barbe des opérateurs occidentaux. Les « diables » suisses ont voulu se tailler trop vite leur propre empire commercial en Chine et ils ont montré trop d’avidité dans leur volonté de détourner à leur seul profit les fruits de la croissance horlogère : le retour de manivelle n’est pas loin, avec de sérieux renversements d’alliance...
••• Il est devenu clair que « ça branle dans les bambous » et que le business horloger va s’en trouver gravement affecté : les commandes grand-chinoises (sell-in) ont sérieusement ralenti, même à Baselworld, en dépit des annonces faites par les groupes (ci-dessus : l’extraordinaire dragon en relief de la « petite heure » Jaquet Droz, collection 2012). Manifestement, pour les marques leaders sur ce marché, le pic de croissance a été atteint, puis dépassé, et on entame une descente inévitable. Quelques autres marques – « émergentes » sur le marché chinois – conservent encore un certain potentiel de croissance, mais leur choix d’un développement en réseau monomarque risque de les handicaper si les grands donneurs d’ordre s’organisent autrement...


5)
••• L’ABSURDE DÉPOSITIONNEMENT DES MARQUES HORLOGÈRES
SUR UN MARCHÉ EUROPÉEN, QUI EST POURTANT LEUR SEUL TERRITOIRE DE LÉGITIMITÉ...
Si une marque est en quête d’une croissance explosive de ses ventes et qu’elle peut financer des coûts d’accès au marché exorbitants, il faut qu’elle tente sa chance en Chine. Si elle n’a ni les volumes suffisants, ni les reins solides en trésorerie, autant qu’elle se concentre sur son territoire de légitimité naturel : l’Europe. La surexposition chinoise a conduit trop de marques à négliger leur espace de proximité, qui est pourtant celui où se crée l’image et où se pérennise les réputations.
L’horlogerie suisse a gagné la guerre de la globalisation, en parvenant à rester la référence internationale en matière de belles montres - ce n’était pas gagné d’avance avec l’irruption des marchés émergents, om les consommateurs auraient avoir d’autres goûts -, mais la pratique du « tout-à-l’orient » a vu trop de marques ne plus se soucier que des marchés asiatiques, en déshabillant les marchés européens pour habiller leurs boutiques chinoises.
Les budgets de communication ont été recadrés à la mode Ex Oriente Lux, ce qui n’a pas manqué d’accroître la distance mentale (top of mind) entre les marques sino-centrées et les amateurs qui les aimaient : pour une maison, il n’est jamais bon d’être considérée une « marque pour les Chinois ». C’est pourtant ce qui guette les manufactures qui réalisent 70 % ou 80 % de leur activité sur le amrché grand-chinois...
••• Le risque de dépositionnement est patent sur les terres historiques de la montre suisse, où il ne faudrait que s’installe un nouveau désamour à la faveur des nouvelles tendances « anti-luxe ostentatoire » de l’opinion publique. Le jour où les Européens n’aimeront plus certaines marques, les consommateurs exotiques ne mettront pas longtemps à s’en apercevoir et à ratifier le choix de ceux qui donnent le ton au luxe mondial depuis trois siècles...




••• LA SUITE AU PROCHAIN NUMÉRO : les facteurs d’inquiétude endogènes (la pénurie capacitaire, le renouvellement du tissu créatif, la mutation de la distribution, la fidélisation des compétences, la diffusion d’une nouvelle culture : Business Montres du 17 mars)...

 



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