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Les Chinois commencent à montrer le bout de leur nez dans leur offensive pour reprendre la main sur le marché des montres : les montres suisses ne seraient pas de bonne qualité !
Passé le chic bâlois, l'actualité horlogère reprend ses droits...
POUR BIEN COMMENCER LA SEMAINE, FIDÈLE AU POSTE DANS SON NID-DE-PIE, LA VIGIE DU LUNDI VOUS SIGNALE...
1)
••• LA NOUVELLE OFFENSIVE CHINOISE
CONTRE LES « MONTRES DE LUXE » (ON PARLE DES SUISSES, ÉVIDEMMENT)...
On a dépassé le stade du « signal faible » pour en arriver à celui de l’avertissement au premier degré. La suite s’annonce un peu compliquée. De quoi s’agit-il ? A l’occasion de la Journée internationale des droits et des intérêts des consommateurs (organisme para-gouvernemental chinois, dont on imagine qu’il est absolument indépendant de toute influence du Parti communiste chinois), il apparaît que les consommateurs chinois sont très mécontents des montres de luxe : 46 % de leurs plaintes concernaient ces montres, loin devant les articles de mode et les voitures de luxe. Et seulement 16 % de ces plaintes ont été réglées. 57 % de ces plaintes concernaient la... qualité ! Selon Zhou Ting, directeur exécutif du centre de recherche de luxe, de l'UIBE (University of International Business and Economics) de Beijing, « l'expansion rapide des marques de luxe en Chine est l'une des raisons de la faible qualité des articles de luxe »...
••• Chacun sait que les montres de luxe chinoises sont absolument parfaites et ne sauraient donc donner lieu à la moindre plainte. C’est pourquoi le Quotidien du peuple en ligne nous précise que « bien que le marché soit vaste, les consommateurs chinois ne reçoivent pas suffisamment d'attention de la part des marques internationales de luxe » (selon Ouyang Kun, directeur du Bureau de l'Association mondiale du luxe en Chine). Ce dernier estime que « le processus compliqué et très long du service après-vente augmentait les difficultés des consommateurs pour bénéficier de ces services ». C’est pourquoi « l'association a lancé un appel aux marques internationales de luxe pour mettre en place un système unifié de service après-vente. Cela comprend des lignes téléphonique directes, un processus fixe de service après-vente et un étiquetage des centres de réparation du pays d'origine et local »...
••• Traduction pour les non-initiés : ceci est un premier coup de règle sur les doigts. « Amis des marques de montres occidentales : prenez garde à notre pouvoir de rétorsion et investissez davantage dans les services en Chine ». Un avertissement à mettre dans la perspective de la campagne de néo-nationalisme industriel qui fermente dans les sphères économiques des hautes autorités chinoises : sans le dire, on tente de décrédibiliser les marques occidentales, tout en préparant un arsenal réglementaire nettement plus contraignant à leur égard. Le climat chinois devient soudain moins clément pour les horlogers suisses...
2)
••• LA RASSURANTE PERMANENCE DE NOMOS (GLASHÜTTE),
UNE DES PLUS HONNÊTES MANUFACTURES DU MONDE DE L'HORLOGERIE...
Une horlogerie qui échappe ainsi aux encodages du temps en affichant ses codes d’un autre temps est finalement très apaisante : c’est un repère de sérénité dans les tempêtes de salons qui tournent à la foire d’empoigne entre bateleurs médiatiques. La manufacture la plus discrète de Glashütte poursuit d’année en année un chemin créatif sans surprises, dans un style qu’on qualifierait volontiers d’intemporel si ce mot n’était pas devenu le cache-misère des marques sans imagination ou en panne de créativité.
• Chez Nomos, cette volonté de ne pas donner prise au temps relève de l’apostolat, sinon de la weltanschauung (conception du monde). D’où le manque d’effets spectaculaires de la nouvelle montre de l’année, une Ruban Bleu qui se flatte de son cadran bleu comme les ciels saxons quand il fait de l’orage, travaillé et soleillé avec les gestes traditionnels des horlogers locaux, logé, enfin, dans une montre au mouvement automatique manufacture (Epsilon) et au design revu et corrigé du Zuruchois Hannes Wettstein.
• Les subtils décalages contemporains de ce design échapperont aux néophytes, mais il y a de l’élégance dans le traitement de ces lignes gentiment tendues, dans la proportion cornes/taille du boîtier, dans le rapport de la petite seconde guillochée avec le diamètre du cadran ou dans le travail des aiguilles (image ci-dessus). Tout est dans la nuance : il faudrait faire preuve d’un horrible mauvais goût latin pour ne pas apprécier dans cette Zürich cette démontration du « nombre d’or » tel qu’on l’apprécie en Saxe...
••• Les puristes, qui auraient pu être choqués par cette audacieuse incursion de la couleur (même bleue) dans l’univers si bien ordonné de Nomos, pourront toujours se rabattre sur la version « plus chic de noir » de la même montre Zürich, toujours aussi soigneusement soleillée et guillochée.
• Suprême fantaisie, dans le même boîtier Zürich : la Weltzeit est une heures du monde (fuseaux horaires géographiques) à dateur, qui prouve que Nomos sait non seulement développer des complications sur la base de son propre calibre Epsilon, mais aussi trouver de nouvelles expressions stylistiques dans son parti-pris d’intégrité et d’honnêteté (en cartouche dans l'image ci-dessus). Si, pour beaucoup de marques, le « retour au classique » est un prétexte paresseux pour ne plus prendre de risques, le néo-classicisme d’une maison comme Nomos est un choix exigeant et sincère...
3)
••• L’INDISPENSABLE SÉANCE DE RATTRAPAGE POUR NE RIEN MANQUER
DE CE QUI A PU SE PRODUIRE PENDANT ET APRÈS BASELWORLD...
Des informations qui n’étaient publiées, en toute liberté, en priorité ou en exclusivité, que par votre Quotidien des Montres, parce que c’est ici, et nulle part ailleurs que s’écrit, à chaud, en temps réel et au jour le jour, la grande chronique de l’histoire des montres...
• La rachat de la manufacture De Grisogono par des investisseurs angolais, qui sont les premiers Africains à débarquer dans l’industrie horlogère suisse : Fawaz Gruosi aura finalement réussi à sauver sa marque et l’honneur de son nom (exclusivité Business Montres du 13 mars)...
• Le double tourbillon à hautes fréquences de TAG Heuer : un MikrotourbillonS 100 en forme de « concept watch » confidentiellement sortie des poches de Jean-Christophe Babin, qui oblige tout le monde à recaler sa hiérarchie des meilleures montres de Baselworld (avant-première Business Montres du 16 mars, info n° 1)...
• Les dix questions à se poser après Baselworld 2012 : la solidité du marché chinois, la vrai-fausse reprise américaine, le réinvestissement capacitaire, la dramatique pénurie de mouvements et de personnels formés, la quête d’une nouvelle culture horlogère et tout le reste (analyse Business Montres du 16 mars pour la partie internationale et second volet le 17 mars pour les défis internes lancés à l’industrie horlogère)...
••• Les tricheurs (gros et petits) du Swiss Made, mais aussi les hypocrisies dans un débat qui embrouille le dossier plus qu’il ne tente de faire respecter l’esprit initial d’une protection géographique devenue référence mondiale (décryptage Business Montres du 14 mars, infos n° 1 et 2)...
• La révolte ouverte des fournisseurs : comment les exposants de l’EPHJ et ceux de Lausanne préparent leur riposte pour ne plus être pris entre deux feux dans la querelle pour l’institution d’un salon de référence pour les sous-traitants de l’horlogerie (indiscrétion Business Montres du 16 mars)...
• Et toutes les actualités de la semaine, au jour le jour, avec les « chaises musicales », les nouvelles montres de la saison, les concepts qui décoiffent, les coulisses de Baselworld, les rumeurs du printemps, les tendances de l’année, le sacre du « nateau » comme nouveau matériau (!), les statistiques personnelles du « franc-tireur de Baselworld » et les différents « prix » attribués aux marques qui ont imaginé des accessoires créatifs (meilleure clé USB, meilleur « cadeau presse », meilleure dégustation œnologique, etc.)...
4)
••• LE BESTIAIRE « AJOURÉ » DE BOUCHERON
(UNE ENVIE DE TRANSPARENCE ET DE LIMPIDITÉ DANS L’IDENTITÉ)...
Ce n’est pas encore le vrai nouveau visage de Boucheron, maison horlo-joaillière qui aura changé en quelques mois de président et de directeur de la création, mais on sent dans les collections qui ont été présentées à Baselworld une forte envie de transparence et de limpidité, sinon de lisibilité et de simplicité, dans le respect des codes identitaires de la marque.
• Témoin, la collection « Ajourée », qui aligne quelques classiques du bestiaire Boucheron, comme la grenouille ou le caméléon (image dans l’article sur « Les dix leçons de Baselworld »), pour leur restituer une dimension à la fois plus joaillière (322 pierres, dont 117 saphirs pour le caméléon) et plus « intime » (disons plus « personnelle »), par les dimensions du boîtier (38 mm) autant que par celles du cadran (18 mm : il faudra que les – jeunes ! – clientes aient de bons yeux).
• C’est du quartz ! Et alors ? L’intérêt de cette montre n’est pas dans son expression horlogère, mais dans la manière dont elle impose au temps son style joaillier, avec une volonté minimaliste de rester portable (understatement) autant que très désirable. Si Boucheron joue la discrétion dans une veine animalière à la 3D à peine esquissée, ce n’est sans doute que pour mieux nous surprendre dans les années à venir : à Baselworld, on a pu vérifier dans les poches et dans les tiroirs autant dans les vitrines qu’une révolution se prépare - sans oublier le recrutement de Denis Giguet pour animer la manufacture de Genève......
5)
••• LA PROCHAIN EXPLOIT SOUS-MARIN DE ROLEX
ET LA MONTRE DEEPSEA QUI N’ÉTAIT PAS PRÉSENTÉE À BASELWORLD...
Il y a cinquante-deux ans, c’était le bathyscaphe Trieste et la Deep Sea très spéciale accrochée à son flanc, par 10 916 m de fond, avec le professeur Auguste Piccard aux commandes. On a compris depuis cette plongée qu’il y avait des points bas encore plus profonds dans la fosse des Mariannes, et donc qu’on pouvait battre ce record : quatre équipes s’y préparent, dont celle de Richard Branson (indiscrétion Business Montres du 7 avril 2011, info n° 1). Rolex – qui détient le record horloger de profondeur réellement atteinte (autrement qu’en caisson) – suit évidemment tout ça de très près, mais, depuis quelques jours, on n’a plus de nouvelles du défi Deepsea Challenge, où Rolex soutient le cinéaste James Cameron (Titanic) dans son projet d’exploration des profondeurs extrêmes de cette fosse des Mariannes, dans le Pacifique. Il s’agirait de passer la barre symbolique des 11 000 m et d’atteindre les 11 100 m sous la surface, descente considérée comme la plus profonde réalisable sur cette planète.
• Deepsea Challenge est un curieux bathyscaphe vertical, qui bénéficie donc du soutien de Rolex et du National Geographic, le projet ayant repris le nom de la montre utilisée pour la descente de 1960 (source : Deepsea Challenge). Pour découvrir cette expédition et son curieux engin (une sorte de bouchon flottant), une vidéo de présentation sur la chaîne images de Business Montres (01:16 mn)...
••• Contrairement à ce qui s’était passé pour le Trieste, Rolex n’a pas voulu accrocher à l’extérieur du Deepsea Challenge une montre spécialement réalisée pour l’occasion (boîtier et verre spécial), mais une Sea-Dweller Deepsea quasiment de série, à quelques détails près : un boîtier en acier spécial et un verre un peu plus épais - on sera quand même à quatre fois la profondeur de l’actuelle montre Deepsea -, mais surtout un cadran qui porte la mention magique et jusqu’ici impossible – « 12 000 m/39 370 ft ». De sources internes évidemment non officielles et non autorisées, la montre est prête : ce sera le collector absolu pour tous les amateurs de montres extrêmes. Au lieu d’en réaliser une petite dizaine (comme pour la Dee Sea spéciale – importable ! – de 1960), Rolex devrait en proposer une série limitée beaucoup plus large, à un prix encore inconnu, l’originale (celle de la descente) rejoignant les collections du musée Rolex...
••• Date précise de l’exploit : tout dépend de la météo sur place (capricieuse, comme toujours dans le Pacifique) et de l’emploi du temps de l’équipe, James Cameron étant bloqué dans les semaines qui viennent. Il y a donc plusieurs « fenêtres de tir » possibles, mais il semblerait la première – planifiée la semaine dernière – se soit refermée. La suite au prochain épisode...
6)
••• QUELQUES INFORMATIONS HORLOGÈRES NOTÉES
À LA VOLÉE, EN VRAC, EN BREF ET EN TOUTE INDÉPENDANCE ÉDITORIALE...
••• CHAISES MUSICALES : un divorce à l’helvétique, puisque nos amis Eric Othenin-Girard et Alain Carrier se séparent après sept ans de vie commune. Après avoir défini et mis en place la ligne éditoriale de Movment, puis de The Watches Magazine (Ace Publishing), Eric Othenin-Girard reprend sa liberté : il n’écrira donc plus pour le magazine d’Alain Carrier et il ne participera pas aux Watches Days du mois de novembre. Il devrait se consacrer davantage à ses projets personnels de formation et de diffusion du savoir-faire horloger (Watch Sales Academy, au Locle) et à son réseau Watches & Friends. Pour Alain Carrier, l’avanture éditoriale continue...
••• EJE : ne dites plus Erick J. Exertier, qui était le nom compliqué d’une nouvelle marque, référencée comme #82/Génération 2011 (Business Montres du 16 décembre 2011, info n° 6). Dites maintenant « EJE », c’est plus rapide et plus chic, en même temps que plus facile à prononcer dans les dialectes « émergents » et sur les marchés où le style arachnoïde des ces « Watches In Motion » peut trouver quelques adeptes (source : EJE)...
••• LEXON TIME : une nouvelle marque horlogère sur le marché, des collections très design et un concept « Take Time » des plus amusants à un prix accessible qui permet toutes les fantaisies (vidéo à découvrir sur la chaîne images de votre Quotidien des Montres et détails dans Business Montres le 16 mars)...
••• LOUIS VUITTON : derniers coups de marteau dans la nouvelle (future) boutique de joaillerie Louis Vuitton de la place Vendôme, qui sera inaugurée dans quelques jours (révélation Business Montres du 30 mars 2010). Du côté des concurrents locaux, ce n’est évidemment pas la joie, même si une lueur d’espoir persiste : et si la perspective d’une vitrine de joaillerie Louis Vuitton place Vendôme (la première au monde à s’être ainsi spécialisée) ramenait dans le quartier une clientèle asiatique jusqu’ici détournée par les grands magasins ou les Champs-Elysées ?
••• MARC JENNI : fraîchement intronisé à l’AHCI (Académie horlogère des créateurs indépendants), le jeune maître-horloger Marc Jenni présentait à Baselworld une montre subtilement maçonnique et moins agressivement « fraternelle » qu’en 2011, quoique pavée de bonnes intentions symboliques (Business Montres)...
••• SASKIA MAAIKE BOUVIER : c’est un peu bête de faire des annonces pour ses montres pendant Baselworld, surtout quand on n’est pas à Baselworld, et c’est le meilleur moyen d’être noyé dans le tumulte collectif. Les collections de Saskia Maaike Bouvier, des montres faites par une femme pour une femme, méritent tout de même le détour : on peut les découvrir sur une vidéo diffusée sur la chaîne images Business Montres Vision (02:15)...
••• VENTURA : puisque la nouvelle montre Ventura est mue par l’énergie humaine (celle des mouvements du poignet) et qu’il fallait démontrer les qualités de la première « montre automatique à affichage digital, Pierre Nobs, le créateur de Ventura, a entrepris de miser sur les rickshaws – propulsés à l’énergie du mollet – pour promener ses clients dans Bâle et autour de Baselworld. Une inititiative sympathique et une excellente idée promotionnelle, à découvrir en vidéo sur la chaîne images Business Montres Vision...
••• SWISSNESS : en dépit d’oppositions fortes, notamment celle des PME suisses (USAM : Union suisse des arts et métiers), le conseil national de Berne a approuvé l’exigence des 60 % pour le projet « Swissness » (destiné à garantir la suissitude des produits qui se présentent comme « suisses »). Il reste au Conseil des Etats à corriger le tir pour ne pas embrouiller la perception d’un Swiss Made déjà passablement compliqué à comprendre pour un consommateur non initié. |