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La Chine a décidé de briser le monopole de ses grandes banques
 
Le 10-04-2012

Un pas de plus vers la libéralisation de l’économie chinoise. Le système actuel pénalise les PME

«Quelques grandes banques occupent une position de monopole et c’est seulement auprès de ces banques que l’on peut obtenir des prêts. Si on s’adresse ailleurs, c’est très compliqué.» Le premier ministre chinois Wen Jiabao a ainsi ouvert la voie à la dérégulation du secteur financier en Chine. Dans un discours repris mercredi par les médias officiels, il a appelé à briser le monopole des grandes banques qui prêtent aux grandes entreprises, étatiques pour la plupart, privant le secteur privé des moyens de financement et de développement. Dans un contexte où l’économie chinoise traverse un ralentissement, l’accès au capital pour les petites et moyennes entreprises est désormais un enjeu majeur. Le taux de croissance, 9,2% l’an dernier, est attendu à la baisse à 7,5% cette année.

Selon Michel Juvet, associé à la banque Bordier, l’annonce de Wen Jiabao est conforme au plan chinois de libéraliser progressivement le secteur financier. «A présent, l’Etat définit tout, y compris le taux d’intérêt, ce qui empêche les petits établissements de rémunérer le dépôt des épargnants et, par la suite, de faire des prêts aux entreprises, explique-t-il. Il s’agit bien d’une décision majeure; reste à voir le rythme auquel cette réforme sera menée.» Les géants bancaires chinois – Agricultural Bank of China, Bank of China, Bank of Communications et Industrial and Commercial Bank of China – figurent parmi les grandes banques mondiales. Dans l’ensemble, après une hausse spectaculaire des prêts accordés en 2009, ils ont ralenti le mouvement ces dernières années.

Nicolas Musy, directeur de CH-ina, entreprise de conseil basée à Shanghai, rappelle que le processus de libéralisation du secteur financier a débuté il y a environ six mois à Wenzhou, ville industrielle de 9 millions d’habitants. L’an dernier, quelque 80 entrepreneurs, victimes d’usuriers, s’étaient suicidés. «C’est dans ce contexte que l’Etat avait permis, sur une base expérimentale, aux institutions financières non bancaires de faire des prêts. Wen Jiabao propose aujourd’hui la légalisation de cette pratique. Les PME, une partie essentielle du tissu économique, n’auront plus besoin de compter sur les grandes banques. C’est aussi une manière d’admettre que l’allocation du capital, telle qu’elle est faite aujourd’hui, n’est pas bonne. Elle favorise les grandes entreprises d’Etat et pénalise les PME.»

Cette annonce confirme par ailleurs la volonté de Pékin de poursuivre les réformes financières et de rendre la monnaie chinoise convertible d’ici à 2020. «Ils ne peuvent pas avoir cette ambition tout en maintenant un système financier archaïque», poursuit Nicolas Musy. Ce dernier fait aussi remarquer que le premier ministre Wen Jiabao quitte ses fonctions cet automne et que, d’ici là, il serait tenté d’accélérer les réformes.

Autre signe d’ouverture et pas le moindre, Pékin a autorisé mercredi les capitaux étrangers à investir en actions, obligations et dépôts bancaires en Chine à hauteur de 80 milliards de dollars. Objectif: injecter de l’argent frais et stimuler l’activité. Ce montant était limité auparavant à 30 milliards de dollars.

«Cela reste une somme modique dans un pays aussi grand que la Chine, commente Michel Juvet de la banque Bordier. Mais de nouveau, cette décision marque la volonté d’aller de l’avant avec l’ouverture de l’économie chinoise et avec l’internationalisation de son marché des capitaux. Le Japon avait procédé de la même façon pour s’intégrer à l’économie mondiale.»

Ram Etwareea
LE TEMPS

 



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