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Le recours aux réductions d’heures de travail est en hausse de 66%. On est loin de 2009 et le taux de chômage recule, nuance le Seco
Tornos n’est pas seul. Le fabricant de machines-outils a annoncé au début du mois son intention de mettre au chômage partiel son personnel de Moutier et de La Chaux-de-Fonds au mois de mai. Le nombre d’entreprises suisses qui ont recours à des réductions d’heures de travail (RHT) augmente, démontrent les chiffres publiés mardi par le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco).
Au total, 9132 personnes étaient concernées par une réduction de leur horaire de travail en janvier. Il s’agit d’une hausse de 66,7% par rapport au mois précédent; 114 sociétés de plus – 648 au total – ont eu recours à cette mesure ayant pour but d’éviter de licencier des employés et permettant de se tenir prêt à accroître rapidement la production dès que la demande revient.
Les experts relativisent cependant cette hausse qui concerne en premier lieu l’industrie: «On observe une augmentation, mais, partant d’un niveau général faible comparé à la crise de 2009. C’est un instrument efficace quand les entreprises subissent une chute soudaine de la demande, ce qui n’est pas le cas maintenant», explique le Seco. Aujourd’hui, les sociétés doivent faire face à la surévaluation du franc et à l’affaiblissement de la conjoncture européenne et mondiale. «Les entreprises ne manquent pas de travail, elles font plutôt face à la difficulté d’être plus chères que leurs concurrentes européennes. Plus que de réduire leur production, elles se posent des questions sur la façon de réduire leurs coûts, par exemple par une éventuelle délocalisation», explique Antje Baertschi, porte-parole du Seco.
Effet du plan d’aide?
Le plan d’aide du Conseil fédéral encourage-t-il les entreprises à faire cette démarche? Annoncé l’été dernier, il mettait à disposition 500 millions de francs pour l’assurance chômage. Il est trop tôt pour le dire, selon le Seco.
«On observe une potentielle recrudescence», selon le Service jurassien de l’emploi, mais qui «n’est pas confirmée». Dans le canton, selon les derniers chiffres disponibles, datant de décembre, une vingtaine de sociétés bénéficient du chômage partiel. Les mesures concernent environ 400 personnes, contre 2000 au plus fort de la crise, indique le service de l’emploi. Depuis, les autorités ont enregistré des demandes, mais sans que les mesures soient finalement appliquées.
«Plus de précautions»
En février, 2200 employés étaient autorisés à en bénéficier dans le canton de Vaud, contre 307 en septembre dernier. C’est encore trois fois moins qu’en 2009 et 2010. En plus, souligne le chef adjoint du service de l’emploi, «les entreprises prennent plus de précautions qu’avant». Le gel brutal de l’activité, à l’automne 2008, est encore dans toutes les têtes. «Il est possible que les employés qui seront effectivement touchés par les RHT soient moins nombreux que ceux annoncés», estime donc François Vodoz.
Dans le canton de Fribourg, à fin mars, 22 entreprises avaient obtenu une autorisation d’utiliser de telles mesures, en cas de besoin. Pas plus ni moins qu’à fin 2011. Métallurgie, scierie, cartonnage. C’est surtout l’industrie qui est concernée. «Aucune d’entre elles n’a avancé explicitement l’argument du franc fort», précise Charles de Reyff. Le chef du service de l’emploi retient également que deux entreprises d’importance, Comet et Wago Contact, viennent d’y renoncer. A Genève, une quarantaine d’entreprises utilisent le chômage partiel pour environ 800 personnes.
Pour l’instant, explique le Seco, la corrélation entre les réductions d’horaire de travail et le taux de chômage est faible. Ce dernier a néanmoins reculé en Suisse au mois de mars. Il est passé de 3,4% à 3,2% grâce à l’accélération des activités dans le secteur de la construction. Sans ces effets saisonniers – mars est généralement un bon mois pour l’emploi – le taux reste stable par rapport au mois précédent à 3,1%, malgré une baisse en valeur absolue. Pour l’ensemble de l’année, les experts du Seco avaient prévu un taux de 3,4%. En dépit de cette évolution, qualifiée de «réjouissante» par Serge Gaillard, chef de la direction du travail, cité par l’ATS, il est encore trop tôt pour réviser les pronostics.
Mathilde Farine
LE TEMPS
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