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Une actualité évidemment dominée par les sessions d’enchères à Genève, là où s’établissent, sous le marteau les gloires et les déchéances des marques, celles du passé, celles du présent et celles de l’avenir...
POUR CEDÉBUT DE SEMAINE, TOUJOURS FIDÈLE AU POSTE DANS SON NID-DE-PIE, LA VIGIE DU LUNDI VOUS SIGNALE...
1)
••• UN CLIN D’OEIL À L’ACTUALITÉ POLITIQUE
À LA VEILLE DE LA NOMINATION DU NOUVEAU PREMIER MINISTRE EN FRANCE...
C’est quand même bizarre, ce rapport difficile de la gauche française avec les montres, qu'elles soient ou non de luxe (ci-dessus, le nouveau président français) ! Si le président français porte ostensiblement une Swatch (bracelet trop lâche, comme son prédécesseur !), histoire de désamorcer toute polémique à ce sujet, on peut vérifier sur les différentes images des sagas parues dans la presse qu’il n’en n’a pas toujours été ainsi. Un constat : sous la présidence précédente, la montre (généralement suisse) est devenue un des sujets majeurs de la polémique politique...
2)
••• L’ARRIVÉE MASSIVE DES MARCHANDS
ET DES COLLECTIONNEURS POUR LES ENCHÈRES GENEVOISES...
Les amateurs italiens ont fait un détour par Monaco samedi : il s’y tenait une des plus belles enchères d’automobiles de collection de ces dernières années, avec un spider Ferrari 625 TRC de 1957 adjugé à 5 millions d’euros par RM Auctions. Il y avait 22 autres Ferrari dans cette vente, qui est un peu aux automobiles de collection ce que sont les ventes genevoises de montres de collection : les amateurs y sont les mêmes et ces mêmes heureux enchérisseurs se retrouveront aujourd’hui à l’Hôtel des Bergues (Four Seasons) pour les deux sessions d’une dispersion Christie’s que tout annonce phénoménale (Business Montres du 12 mai et complément du 13 mai). Très intelligemment composé et mis en scène, le catalogue est aussi stratégiquement cadencé, sans « tunnels » insipides, en prévoyant à la fois des plages de repos pour les différentes catégories d’amateurs, en imaginant des emballements inattendus - certains lots ont bénéficié d’un excellent bouche-à-oreilles : des informations confiduentielles circulent parmi les collectionneurs - et en laissant la place à des séquences émotion - pour lesquels il faudra trouver de la place dans la salle. Sans parler de la nouvelle arme secrète d’Aurel Bacs : la mise en lumière chromatique de la salle de vente Christie’s...
••• Reste une inconnue, pour Christie’s aussi bien que pour Sotheby’s : par coïncidence ou par calcul, l’axe stratégique des ventes de cette semaine s'est structuré autour de Breguet, marque dont le musée a recommencé ses achats (bon point), mais qui n’a pas encore créé de vraie nouvelle génération de collectionneurs – au-delà des anciens amateurs de montres de poche. D’où la question : les nouvelles fortunes qui investissent dans les montres de collection ont-elles la maturité horlogère pour apprécier les 94 Breguet mises sur le marché en quatre jours, et notamment les montres de poche qui témoigneraient d’une haute culture mécanique appliquée aux objets du temps ? Aimeront-ils les Breguet comme ils aiment Patek Philippe ou, maintenant, Rolex ? Réponse dans les heures qui viennent...
••• De toute façon, les nouveaux collectionneurs en question pourront toujours se rabattre sur les Patek Philippe exceptionnelles du catalogue Christie’s et sur les séries de Rolex non moins intéressantes du catalogue Sotheby’s (et vice versa pour ne pas faire de jaloux). Quelques montres de poche pourraient jouer les trouble-fête, chez l’un comme chez l’autre...
••• Dernière inconnue : les marchands, notamment italiens, resteront-ils demain pour l’inhabituelle « Day Sale » (vente de jour) Sotheby’s du mardi ? Beaucoup sont à Genève depuis samedi : même s’ils n’ont pas craqué tout leur budget chez Christie’s, le catalogue Sotheby’s est-il assez affriolant pour leur faire passer une nuit supplémentaire à Genève ? Geoffroy Ader a prévu pour eux, mardi matin, quelques Rolex, mais les plus belles sont mardi après-midi...
3)
••• LA PLUIE DE RECORDS ATTENDUE
SOUS LE MARTEAU D’AUTEL BACS (CHRISTIE’S)
On peut parier sur une bonne dizaine de millions le matin (ce que les autres maisons n’auront pas fait dans toute une journée), mais, surtout, beaucoup plus, sinon le double, dans l’après-midi ! Si les amateurs sont au rendez-vous (et ils ont déjà investi Genève : voir ci-dessus), on peut tabler sur un feu d’artifice, en montres de poche (Breguet, notamment, mais pas seulement), comme en montres-bracelets (Patek Philippe, Rolex, Vacheron Constantin. Alors : 25, 27, 29, 30 millions ou encore plus ? Le peu d’enthousiasme collectif et la médiocrité relative des résultats chez Antiquorum laissent penser que beaucoup d’enchérisseurs n’ont pas entamé leurs réserves. La bataille peut commencer...
4)
••• LES RÉSULTATS EN DEMI-TEINTE
DE LA VENTE ANTIQUORUM, MAISON PLUS « ROGUETIONEER QUE JAMAIS...
Avec Antiquorum, on n’est jamais à l’abri d’une surprise, d’une bonne comme d’une mauvaise... Parmi les bons plans des deux sessions de dimanche (469 lots dispersés par un Julien Schaerer qui maîtrise son sujet, mais qui ne peut rien contre un catalogue hétéroclite), l’excellente surprise des 205 000 CHF sous le marteau du lot n° 296 (la Rolex Submariner d’Isser Harel, l’ancien patron du Mossad israélien), qui n’était jamais qu’à 28 000 CHF d’estimation haute. Plus de 220 000 euros avec les frais pour la gravure de la menorah sur le fond, avec la devise du Mossad et le nom d’Isser Harel en hébreu ! Evidemment, à 5 200 CHF d’adjudication, le lot suivant – une autre Submariner, gravée cette fois en arabe au nom de l’armée libyenne faisait un peu pauvre : c’était un raccourci des guerres au Proche-Orient depuis près de sept décennies...
••• Autre bonne surprise, quoique moins spectaculaire : le bon prix décroché par le dernier lot (n° 469), une Patek Philippe « Heures universelles » réf. 2523 HU de toute beauté (magnifique cadran guilloché). 990 000 CHF sous le marteau pour une des seules pièces connues de ce type, c’est bien, mais on ne peut s’empêcher de penser qu’on aurait allègrement franchi le million – et au-delà – sous le marteau d’Aurel Bacs ou de Geoffroy Ader...
••• À 20 000 CHF sous le marteau, la Zenith d’aviateur en 46 mm était une autre des bonnes surprises de l’après-midi. Jamais vu sous le marteau, ce lot n° 269 (double chrono en or réalisé par Universal pour Zenith) a fait le bonheur d’un marchand, la montre partant à son estimation basse...
••• Dernière bonne surprise, mais les initiés s’y attendaient : les 80 000 CHF sous le marteau de la Cartier en platine (lot n° 455, estimé haut à 55 000 CHF), que les marchands ont vite repéré comme une « pièce unique » à ne pas manquer. Là encore, habilement mise en scène, avec les bons acheteurs dans la bonne salle, on aurait pu atteindre les six chiffres avec une pièce d’une telle rareté...
••• Ces heureuses surprises ne remettent cependant pas en cause le constat d’un manque global d’enthousiasme des enchérisseurs pendant cette vente Antiquorum : c’était mou, très mou, même du côté des téléphones branchés sur l’Asie, même pour les montres de poche plus ou moins émaillées, même pour les Patek Philippe - voir ci-dessous. Explication : le marché est de plus en plus sélectif. Il plébiscite sans discuter les pièces réellement exceptionnelles, mais c’est pour bouder la marchandise courante. Un vrai roguetioneer – c’est le statut concédé par l’histoire et par ses concurrents à Antiquorum – se doit de jouer une offre alternative, pas un déstockage de pièces neuves, ni une exposition de « chevaux de retour » sous le marteau...
5)
••• LES GROSSES DÉCEPTIONS D’UNE VENTE ANTIQUORUM
QUI S’EST JOUÉE EN PERMANENCE DANS LE BAS DES ESTIMATIONS...
Sauf pour quelques lots exceptionnels, on a flirté toute la journée avec le bas des estimations, sans pouvoir remonter vers le haut de la fourchette. Même la montre de poche Patek Philippe tourbillon pièce unique (lot n° 100) qui devait être la vedette de la session du matin s’est arrêtée à 300 000 CHF sous le marteau, en dépit de son intérêt : un résultat un peu décevant, pile à l’estimation basse. Les montres émaillées étaient poussives, même les plus rares (125 000 CHF au marteau pour le lot n° 236, une magnifique grande sonnerie « chinoise » qui aurait mérité beaucoup plus)...
••• La vraie déception de ces deux sessions reste cependant le manque d’enthousiasme pour la collection de Royal Oak disposée dans ce catalogue pour fêter le quarantième anniversaire de l’icône Audemars Piguet. Beaucoup de lots ravalés dans cette série, dont l’inattendue Royal Oak grande complication sertie (lot n° 428), dont personne n’a voulu à 500 000 CHF (estimation basse : 600 000 CHF), le quantième perpétuel squelette du lot n° 413 (invendu à 27 000 CHF), un autre quantième perpétuel (lot n° 426, repris à 17 000 CHF) ou la Royal Oak « cadran tropical » du lot n° 409 (sans preneur à 3 500 CHF).
••• À quelques exceptions près, ces Royal Oak sont parties à leur estimation basse. Ce qui prouve une fois de plus que la sélection d’une série réclame des « locomotives » et non un empilement de pièces courantes : n’est pas organisateur de « vente thématique qui veut ». Heureusement, pour sauver l’honneur, il y avait quelques Royal Oak des premières séries, comme le lot n° 402 (32 000 CHF sous le marteau) ou le lot n° 3403 (28 000 CHF sous le marteau). Voire même la Royal Oak Dual-Time en or rose du lot n° 451, adjugée à 18 000 CHF...
••• Tout ceci n’est pas forcément une mauvaise nouvelle pour les amateurs : quand les marchands n’ont pas faim et que les musées somnolent, on peut faire des bonnes affaires aux enchères : qui se plaindra de trouver des Royal Oak à 5 000, 6 000 ou 7 000 CHF sous le marteau, tout juste le double pour les petites complications ? Beaucoup d’amateurs regretteront d’avoir raté le chrono ROO End of Days, invendu à 23 000 CHF !
6)
••• L’HABITUELLE SÉANCE DE RATTRAPAGE DU LUNDI,
POUR NE RIEN MANQUER D’IMPORTANT DES ACTUALITÉS PRÉCÉDENTES...
••• Le catalogue Christie’s au scanner : c’est l’événément de ce lundi, mais il fallait au moins deux séquences pour analyser de façon approfondie ces 414 lots, en tentant d’en comprendre les orientations (commentaires Business Montres du 12 mai et seconde partie du 13 mai)...
••• Le catalogue d’enchères Auktionen Dr. Crott passé au scanner : 624 lots, avec le pire (que de remontages !) et le meilleur des témoignages de la haute culture horlogère, pour une maison d’enchères allemande qui tient bon contre vents et marées (analyse Business Montres du 7 mai)...
••• Le catalogue d’enchères Antiquorum passé au scanner : sans excès d’honneur, mais sans indignité, 469 lots un peu disparates, qui mettent à l’honneur une Royal Oak qui fête son quarantième anniversaire (voir ci-dessus), mais la maison new-yorkaise peine à trouver sa place derrière Christie’s et Sotheby’s (décodage Business Montres du 8 mai)...
••• Voir également, pour Antiquorum, les coulisses judiciaires de l’« affaire Antiquorum contre Patrizzi » dans les archives en ligne du tribunal de New York (documents Business Montres du 11 mai, info n° 4)...
••• Les journalistes horlogers au pouvoir dans le GPHG : comment on est passé d’un excès de détaillants (édition 2011) à une invasion de journalistes horlogers, qui représentent les deux-tiers des jurés du Grand Prix d’Horlogerie de Genève (décryptage Business Montres du 10 mai, infos n° 4 à 6)...
••• Les nouvelles ambitions de Fawaz Gruosi : De Grisogono remonte au front à l’occasion du Festival de Cannes, avec une idée assez précise de ce qu’il lui faut changer, garder et inventer après deux décennies d’existence (interview Business Montres du 9 mai)...
••• L’EPHJ persiste et signe : 650 exposants et 13 000 visiteurs attendus à Palexpo pour la première édition « genevoise » de ce salon de référence pour les sous-traitants. Cette année, Lausannetec aura du mal à différence (informations E et G : Business Montres du 8 mai)...
••• Le Baromontres d’avril 2012 : la situation de la météo horlogère et ses évolutions, scannée en direct par nos barorécepteurs, avec Anticythère, Maximilian Büsser, Philippe Dufour, Luxury Connected, les Poissons d’avril, Worldtempus, Business Montres, Alain Silberstein, Didier Leibundgut et les médias politiques (exclusivité Business Montres du 7 mai)...
••• Et tout le reste, toute la semaine, avec les montres à tatouer sur son poignet, les aimants qu’on fixe sous la peau pour remplacer le bracelet de la montre, les Patek Philippe de poche qu’on retrouve en montres-bracelets, la tête de mort sur la nouvelle Hublot de Laurent Picciotto, le scrimshaw comme nouvelle discipline des beaux-arts de la montre, les chaises musicales, les nouvelles marques, etc. (toute la semaine dans Business Montres)...
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