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C’était plutôt mal parti pour Sotheby’s à la mi-journée (compte-rendu Business Montres de ce midi) : à peine 3,6 millions de CHF frais compris (tout juste 2,8 millions sous le marteau !) et 35 % de lots invendus, avec quelques grosses pièces « ravalées » sans gloire, y compris celles qui étaient signées de grands noms - on saura plus tard que certaines de ces pièces, comme la Patek Philippe du lot n° 141, ont été post-adjugées en transaction privée à l’estimation basse !...
’ambiance était donc fraîche pour la reprise de 14 heures, d’autant que la plupart des marchands avaient commencé à quitter Genève et que, l’heure s’avançant, les amateurs chinois allaient se raréfier au téléphone...
On pouvait donc craindre le pire, mais Geoffroy Ader a prouvé, une fois encore, qu’il était un combattant, et même un survivant doué d'une forte résilience et d'une certaine équanimité. Il est courageusement remonté au combat, sans états d’âme apparents, en s’appuyant sur les points forts de son catalogue et sans se soucier plus qu’il ne fallait d’un vrai climat de crise et des têtes d’enterrement de certains membres de son équipe.
Il a bien fait : très vite, la vente a trouvé un nouvel équilibre, précaire certes, et pas forcément triomphant, mais quelques pièces ont marqué l’après-midi, comme le lot n° 257, une « montre chinoise » suisse, joliment émaillée (pittoresque décor serti), mais surtout dotée d’un mouvement en or. Estimée 60 000 CHF, elle a été adjugée à 182 500 CHF à un Arnaud Tellier (Tellier Fine Arts) qui avait flairé la bonne affaire pour un célèbre musée genevois...
Quelques déceptions dans les montres « ravalées » (certains méritaient une belle enchère), bonnes surprises pour quelques marchands encore présents (notamment dans les Rolex : 314 500 CHF pour la Rolex réf. 6062 triple date à cadran étoilé du [lot n° 307, supposée issue de la collection personnelle du roi Ibn Séoud d’Arabie), enchères incompréhensiblement basses (6 800 CHF pour la répétition minutes anglaise en platine du lot n° 316) et belle preuve de maturité culturelle avec les 182 500 CHF du lot n° 341, qui a permis au musée Patek Philippe de mettre la main sur la plus importante des montres de haute complication suisses de la première moitié du XIXe siècle - merci à Arnaud Tellier pour ses indications sur l’importance de cette montre ultra-plate, dont l’échappement était très innovant pour l’époque, mais qui n’était estimée qu’à 100 000 CHF...
Il ne restait plus que le final Breguet pour redresser le cap et sauver cette journée d’enchères : les achats du musée Breguet – tout comme l’intervention du musée Patek Philippe (lot n° 350) – ont redonné confiance aux investisseurs : dix lots invendus sur les 54 de la collection Breguet, c’est inférieur aux statistiques d’une vente qui aura, au final, produit 8,1 millions de CHF, mais avec plus de 37 % de lots invendus (ce qui est énorme !). Ci-dessus : la pendule Almanach Breguet du lot n° 353, plus forte enchère de cette journée, adjugée au musée Breguet à 422 500 CHF (pour une estimation haute à 450 000 CHF)...
Le prix moyen des lots vendus se situe autour de 33 000 CHF, ce qui est satisfaisant, mais autour de 21 000 CHF pour la totalité des lots proposés à la vente. Un score qui est loin d’être glorieux et qui ne constitue pas un vrai progrès par rapport à la dernière dispersion de Sotheby’s à Genève : un peu plus de 7,1 millions de CHF, mais pour 268 lots (en tenant compte des 32 % de lots invendus, on était dans un prix moyen supérieur, 38 000 CHF).
Le problème du statut de Sotheby’s comme challenger de Christie’s reste donc posé – et il n’a pas encore trouvé de solution. Cest tout le modèle économique qui est à repenser, et sans doute aussi le rendez-vous du mardi (superstitieusement évité jusqu’ici parce qu’il « porte malheur ») : Sotheby’s n’a plus droit à l’erreur !
Tout cafouillage lors de la prochaine session d’automne serait fatal pour la réputation de Sotheby's, et même léthal pour la survie de l'équipe en place...
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