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La demande est telle sur certaines montres que le délai d’attente peut s’élever jusqu’à deux ans
Le Temps: Patek Philippe a créé 19 calibres de base et plus de 50 références de mouvements. Comment se fait-il que des horlogers qui dépendent de Swatch Group peinent à ce point à développer leur propre calibre?
Thierry Stern: Parce qu’il est très compliqué et onéreux de produire un mouvement de qualité. Plus globalement, il faut compter de sept à dix ans pour développer un outil de production digne de ce nom et, en parallèle, des investissements de plusieurs dizaines de millions de francs. Je pense que certaines marques n’ont pas senti le vent tourner ou qu’elles ne croyaient pas que le groupe de Nick Hayek allait réellement fermer le robinet.
– Chez vous, la phase des grands travaux semble terminée…
– En effet, notre processus de verticalisation de la production est bien engagé. Au-delà de notre manufacture à Genève, nous disposons par ailleurs de plusieurs filiales, dont la fabrique de boîtes Calame, le sertisseur SHG, l’emboîteur de mouvements Allaine ou encore le polisseur Poli-Art, etc. Mais cela ne veut pas dire que les investissements vont cesser.
– Nivarox, en mains de Swatch Group, diminue la livraison de ses assortiments. Dans quelle mesure cela vous concerne-t-il?
– Ce n’est un secret pour personne; nous faisons partie de leurs clients. Mais Swatch Group a toujours dit qu’il allait privilégier les vrais horlogers, ceux qui ont investi dans leur outil de production. Patek Philippe fait clairement partie de cette catégorie. Nous entretenons par ailleurs d’excellentes relations avec ce groupe, familial tout comme nous.
– Quel est le temps d’attente sur certaines de vos pièces?
– Ce phénomène de rareté touche surtout les pièces de haute complication, comme les tourbillons ou les répétitions minutes. Sur ces dernières, il faut parfois patienter jusqu’à deux ans tant la demande est vive.
– Patek Philippe est souvent considéré comme la référence ultime. Recevez-vous toujours des offres de rachat?
– Cela fait maintenant des années que nous répétons que notre marque ne sera jamais à vendre, que notre indépendance sera préservée, que la société restera dans les mains de ma famille. Le message est désormais passé et il n’y a guère plus qu’une seule proposition par année, toujours avant Baselworld et émanant toujours du même bureau d’avocats. Peut-être qu’avec une offre de 20 milliards… Non, non, je plaisante. En aucun cas. Jamais.
Bastien Buss
LE TEMPS
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