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Après 18 années (!) de négociations parfois difficiles, la Russie est devenue, le 22 août dernier, le 156ème membre de l’OMC. Retombées attendues pour l’horlogerie.
La Russie, dernière grande puissance à ne pas être intégrée à l’OMC, a obtenu, en décembre 2011, le feu vert des pays membres de l’organisation à son admission. Selon Maxime Medvedkov, principal négociateur chargé du dossier de l’entrée de la Russie dans l’organisation, cette adhésion doit garantir «la stabilité du commerce extérieur, la diminution des barrières douanières et administratives et la possibilité de participer à l’élaboration des règles de coopération internationale».
De son côté, Pascal Lamy, directeur général de l’OMC, a souligné que le «voyage» avait été «long» et que cette adhésion allait «sans aucun doute renforcer le système de commerce multilatéral». La négociation aura requis la signature de plusieurs dizaines d’accords bilatéraux entre la Russie et divers pays membres de l’OMC, tant dans le secteur des services (39 accords) que dans celui des biens (57 accords).
Les détracteurs du projet en Russie, notamment des députés communistes, avaient averti à plusieurs reprises que l’abaissement des droits de douane permettrait aux producteurs étrangers d’inonder le pays de produits bon marché, signant l’arrêt de mort de nombreuses industries héritées de l’époque soviétique.
De fait, aucun pays n’a négocié aussi longtemps que la Russie pour entrer à l’OMC, le précédent record revenant à la Chine, qui avait négocié quinze ans avant de rejoindre l’organisation en 2001.
Moscou a ainsi tenté, pendant un certain temps, de faire passer son projet d’union douanière avec la Biélorussie et le Kazakhstan avant sa candidature à l’OMC, prétendant même privilégier une négociation collective pour que ces pays puissent entrer en bloc dans l’organisation.
Enfin, les négociations ont aussi été retardées par la Géorgie, membre de l’OMC depuis 2000, suite à la guerre russo-géorgienne en 2008, qui a débouché sur la reconnaissance unilatérale par la Russie de l’indépendance de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie, régions géorgiennes séparatistes.
Quelles conséquences concrètes pour le secteur horloger suisse?
La Russie est un partenaire important de l’industrie horlogère suisse. En 2011, le secteur a en effet exporté des produits horlogers vers la Russie pour une valeur de 253 millions de francs, ce qui fait figurer ce pays à la 16ème place parmi les principaux marchés de la branche.
Dès le début, la FH a été étroitement et continuellement associée aux négociations bilatérales pour faire valoir les intérêts de la branche et définir la position suisse en matière de réductions tarifaires. Elle a parallèlement demandé aux négociateurs suisses de conditionner le dossier du démantèlement tarifaire à celui de la reconnaissance du poinçonnement des articles en métaux précieux et au problème des réparations de montres. Ces négociations séparées ont ainsi abouti, en décembre 2011, à la signature d’un accord bilatéral Suisse-Russie sur la reconnaissance réciproque des poinçons qui devrait entrer en application prochainement. Un autre accord a également été trouvé en matière de réparations de montres, bien que la procédure complexe demandée par la Russie se heurte à de multiples difficultés qui doivent encore être résolues.
Sur le plan strictement tarifaire, l’entrée de la Russie à l’OMC implique dès 2013 une baisse des droits de douane à l’importation. Ainsi, l’imposition des montres complètes passera du taux uniforme de 20% actuellement à une fourchette allant de 15,7 à 18% selon les positions tarifaires considérées. En 2014, cette fourchette s’établira entre 11,3% et 16% pour atteindre en 2015 les taux finaux de 7 à 12%. Le critère additionnel de droit minimum (en valeur) est quant à lui supprimé.
A titre indicatif et sur la base de la statistique 2011 des exportations directes à destination de la Russie, les montres suisses ont, en principe, acquitté l’équivalent de près de 50 millions de francs de droit de douane à l’importation en Russie. Dès 2015, cette charge sera réduite, grosso modo, de moitié.
L’accès au marché russe sera donc facilité pour les produits horlogers suisses ce qui, assurément, permettra de poursuivre le développement des relations économiques entre les deux pays. Et nul doute que les négociations actuelles entre l’AELE et l’Union douanière Russie-Biélorussie-Kazakhstan en vue d’un accord de libre-échange y contribueront encore davantage. |