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Le franc suisse sur le point de se déprécier
 
Le 26-02-2013

Notre chroniqueur explique pourquoi la monnaie helvétique va s’affaiblir, paradoxalement à une nouvelle crise européenne

Que l’on mesure sa valeur en termes de parité de pouvoir d’achat ou selon l’indice Big Mac (peu sérieux en apparence, mais révélateur), le franc suisse est surévalué. Cette situation pourrait cependant bientôt prendre fin, et cela, ironiquement, grâce à une nouvelle crise politique européenne.

Depuis l’éclatement de la crise financière mondiale en 2008-2009, les nombreux afflux de capitaux générés par les incertitudes liées à la zone euro et au risque de rupture sont les principales explications de la force du franc. Le refrain est bien connu: après le mouvement de panique qui a conduit le franc au seuil de la parité en 2011, la Banque nationale suisse (BNS) a vivement réagi en décrétant un cours plancher à 1,20 franc pour 1 euro. Depuis, le taux de change a oscillé autour de ce seuil. Ces derniers mois, ce taux est repassé légèrement au-dessus du cours plancher grâce à l’action de Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne (BCE), qui a mieux réussi que par le passé à stabiliser les perspectives du système bancaire et de la dette souveraine au sein de l’Union européenne (UE). A présent, il sera beaucoup plus facile pour la BNS d’affaiblir le franc.

La prochaine dépréciation de la devise helvétique sera paradoxalement causée par un nouvel accès de «crise» dans la zone. Je m’explique. Ce risque découle de la situation non viable de l’UE avec sa monnaie: les pays de la périphérie souffrent énormément et leur état ne s’améliore pas. Les renflouements et les actions de la BCE ont, jusqu’à présent, évité les défauts souverains et les ruées sur les banques, mais n’ont pas fourni l’impulsion nécessaire pour faire progresser les économies de la périphérie.

Face à cela, l’UE va certainement réagir très rapidement, peut-être même après les élections italiennes. En outre, un ou plusieurs pays de la périphérie européenne pourraient s’unir pour appeler l’UE à renoncer à l’austérité et demander officiellement un renflouement, ce qui activerait le programme de rachat de dette (OMT) de la BCE. Dans ce scénario, l’institut européen suivrait l’exemple de la Banque d’Angleterre (BoE), de la Banque du Japon (BoJ) ou de la Réserve fédérale américaine, en imprimant de l’argent frais pour acheter de la dette souveraine. Une telle action pourrait faire chuter très rapidement les rendements des emprunts dans la périphérie de l’UE.

C’est pourquoi, ironiquement, bien que ces mesures puissent affaiblir l’euro face au dollar américain et aux autres grandes devises à cause du gonflement du bilan de la BCE, le franc suisse pourrait lui aussi s’affaiblir. Cette baisse serait alors due à une impression d’apaisement des tensions dans la zone euro et une probabilité réduite d’explosion. Les flux de capitaux qui contribuaient à renchérir le franc pourraient donc s’inverser, et la BNS pourrait même s’enhardir jusqu’à relever le plancher du taux euro/franc suisse à 1,30.

* Stratège et consultant en devises auprès de Saxo Bank
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