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Raid à Dubaï - contrefaçons saisies, entrepôts fermés et prévenus arrêtés
 
Le 02-12-2013
de FH - Fédération de l'industrie horlogère suisse

Deux entrepôts clandestins remplis de contrefaçons ont été investis par les équipes de la FH et la police dubaïote. Plusieurs milliers de pièces saisies…. Récit d’une aventure quelque peu risquée.

Mardi 19 octobre
Après une courte nuit, à la fraîche, si tant est qu’elle existe dans ce coin du monde, nous retrouvons notre mandataire dans le lobby de l’hôtel. A peine débarqués de Suisse, encore un peu assommés par le manque de sommeil et l’écart de température, nous écoutons docilement les grandes lignes de l’opération prévue le lendemain, «inch’Allah», si Dieu veut. Après une minutieuse investigation, coupant et recoupant les renseignements, les informateurs ont repéré deux locaux clandestins dissimulés aux deuxième et troisième étages d’un bâtiment de Deira, quartier populeux du vieux Dubaï. Situés à un jet de pierre du Gold souk très prisé des touristes, ces deux entrepôts servent à la fois de lieu de stockage intermédiaire et de bureau de vente. Une multitude de rabatteurs quadrillent le souk et se chargent de conduire les amateurs au bon endroit, pour qui veut un sac de marque ou une montre de luxe. Selon nos sources, on vient même d’Afrique pour s’approvisionner là. Depuis deux ans, la FH a multiplié les raids policiers pour casser ce commerce bien rôdé, avec des résultats tangibles. Conséquence directe: les vendeurs sont devenus très prudents et parfois prêts à la confrontation pour défendre leur bien. La prudence est donc de mise.

Après ce rapide briefing, nous partons pour le quartier général de la police. Les plaintes sont déjà depuis quelques jours sur le bureau du procureur qui a donné le feu vert. Il faut maintenant fixer les modalités de l’intervention avec les officiers, sans trop en dire pour éviter toute fuite inopportune. Sur ce point, nos hommes sont des pros: un seul investigateur connaît avec exactitude l’adresse de la cible. Nous le rencontrerons le moment venu, à quelques encablures du site. L’échange d’information se fera sur la rue, juste quelques mots pour donner l’impression d’une rencontre fortuite.

Mercredi 20 octobre
Nous sommes sur le trottoir depuis presqu’une heure lorsqu’apparaît la voiture de Samir, chef des opérations de notre mandataire local. Pas de souci, à l’aune du coin, il est «pünktlich», comme on dit chez nous. Nous partons directement sur zone. La configuration des lieux constitués de nombreuses petites rues serrées nous oblige à parquer la voiture à bonne distance, pour faire le reste du chemin à pied. Samir file devant, l’oreille collée à son téléphone. Nous suivons d’un pas pressé, dans la foule bigarrée des piétons, dont on jurerait qu’ils ont tous décidé d’aller à contre-sens. Au détour d’une ruelle encombrée, voilà les policiers en civil qui se joignent à nous, puis, au coin d’un bâtiment apparaît notre informateur. Quelques salamalecs, après quoi les groupes se dispersent à nouveau. Quant à l’informateur, il disparaît comme il est venu, se fondant dans la foule compacte. Pour nous qui suivons ce petit manège, l’impression dominante est d’un flou total. Heureusement, il n’en est rien. Lorsqu'enfin, après de nombreux détours, nous convergeons sur la cible, tous les groupes se retrouvent, parfaitement coordonnés. Pourtant, malgré toutes ces précautions pour ne pas attirer l’attention, il semble bien qu’un des rabatteurs nous a repérés. Dans cet univers de promiscuité et de confinement, les choses se sentent plus qu’elles ne se voient. Il faut passer à l’action sans plus attendre.

D’un geste, le chef envoie les groupes dans le bâtiment, l’un au deuxième étage, l’autre au troisième. Tout ce petit monde grimpe prestement les escaliers plongés dans le noir en s’éclairant avec les téléphones portables. Sur le palier, les portes identifiées sont verrouillées. Les vendeurs, prévenus par leurs acolytes depuis la rue ont-ils eu le temps de s’échapper? Aux coups frappés avec force sur la porte et aux injonctions policières ne répond que le silence. Un policier s’agenouille et place le dos de la main au ras du sol, sur le seuil. Un mince filet d’air frais s’échappe. La climatisation est en marche, «ils sont à l’intérieur, yallah». Ecartant ses collègues du bras, le sergent s’avance. La porte ne résistera pas longtemps à son quintal. Sous la charge puissante, le chambranle vole en éclat et on entend le cliquetis du verrou qui rebondit sur le carrelage. Les policiers se sont écartés de l’ouverture ainsi créée, craignant qu’un homme à l’intérieur, pris de panique ou désespéré, ouvre le feu. Les occupants de la pièce, au nombre de trois, sont aussitôt menottés et allongés sur le sol. «Tout va bien, vous pouvez entrer vous aussi». Nous suivons l’invitation du chef et pénétrons dans le local. Scène habituelle. Les murs sont couverts du sol au plafond par toutes sortes d’articles contrefaits, dont plusieurs centaines de montres, entassés sur des étagères métalliques. Pendant que nous inspectons toute cette marchandise, les policiers cuisinent les vendeurs. Rompu à ce genre de situation, notre investigateur toque contre les murs, derrière les étagères. Il ne lui faut pas plus de quelques minutes pour découvrir une double paroi cachant d’autres montres contrefaites, en tout près de 2’700 pièces. Nous montons alors au deuxième étage pour voir l’autre local. Même scénario, au vu des débris de la porte qui jonchent le sol. En revanche, pas de fausses montres, essentiellement des sacs à main. D’un coup, la tension retombe et les sens reprennent le dessus. Oubliées dans le stress de l’action, la chaleur lourde et les odeurs âcres de ces couloirs sombres et sans aération nous poussent dehors, où nous aspirons l’air de la rue à grandes lampées, comme on boit à la bouteille. Les prévenus sortent alors, menottés et sous bonne garde, sans illusions sur leur sort. Les badauds passent en jetant de brefs regards dans lesquels on devine l’empathie. Eux aussi connaissent le destin des vendeurs de faux: la prison puis l’expulsion du pays pour un retour peu glorieux au Pakistan ou en Inde. Le rêve de fortune aux Emirats s’est brisé, comme se briseront sous les assauts de la pelle mécanique toutes les contrefaçons saisies.


La lutte anticontrefaçon à Dubaï: faits et chiffres
Depuis janvier 2013, la FH a organisé par l’entremise de son mandataire local, huit raids policiers, saisissant au passage près de 90’000 fausses montres. Les actions ciblent principalement les entrepôts, ceux-là même qui alimentent tout un réseau de vendeurs clandestins. Ainsi en février dernier, deux entrepôts ont reçu la visite des policiers et 33’000 fausses montres suisses ont été saisies à cette occasion, occasionnant un préjudice économique sérieux aux grossistes. En outre, il est bon de mentionner que nous avons obtenu six décisions de justice dans des affaires précédentes, condamnant les prévenus à des peines de prison et autorisant la destruction de toutes les pièces saisies.

 



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