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L’administration douanière américaine et la FH collaborent étroitement afin de lutter contre les abus d'utilisation du Swiss made.
Depuis quelques temps, tous les regards horlogers sont braqués vers l’Est, sur la Chine. A l’Ouest rien de nouveau? C’est oublier un peu vite que le marché américain, bon an mal an, reste une valeur sûre pour l’horlogerie helvétique. Deuxième destination d'exportation pour les montres suisses après Hong Kong, les Etats-Unis méritent à ce titre une attention particulière. La FH est bien placée pour savoir que la confiance du consommateur est primordiale. C’est pourquoi elle déploie des efforts soutenus pour préserver dans le Nouveau Monde la renommée de l’indication Swiss made sur les montres.
Dans ce contexte, il faut savoir qu'aux Etats-Unis, les prescriptions légales définissant l'origine d'une montre sont moins strictes que les lois suisses. Pour imposer en quelque sorte l’application des critères suisses, la FH a recours à la marque de certification. De quoi s’agit-il? Cette dernière est une marque que le titulaire n'utilise pas lui-même mais qu'il met à disposition de tout un chacun à condition que les règles la régissant soient respectées. Corollaire de ce droit à l'utilisation, le titulaire peut faire valoir sa marque de certification contre tout usage abusif.
L’obtention d’une marque de certification ne se fait pas en deux coups de cuillère à pot. La procédure est longue et coûteuse, mais le jeu en vaut la chandelle. Aujourd’hui, la FH dispose d’un outil performant qu’elle utilise afin de protéger efficacement les indications Swiss et Swiss made aux Etats-Unis. Toute entité qui utilise ces indications sur des montres destinées au marché américain doit ainsi respecter les règles d'usage des marques de certification en question, lesquelles renvoient expressément aux dispositions prévues par la législation suisse. Les abus sont poursuivis sur la base du droit des marques.
L'enregistrement des marques Swiss et Swiss made auprès de l'Administration des douanes américaines a eu deux effets très bénéfiques: premièrement, un élargissement considérable de nos moyens d'action, jusqu'alors très limités aux USA; deuxièmement, la mise en lumière d'un trafic important de montres utilisant de manière abusive le nom suisse, trafic générant de juteux bénéfices pour des importateurs sans scrupules et passés inaperçus jusqu'alors, faute de base légale pour les poursuivre. Utilisées de manière judicieuse et intelligente, nos marques de certification ont permis aux douanes américaines de débusquer quelques affaires de première importance en termes de volume d'importation. Polluant le marché américain de montres de médiocre qualité, entièrement ou partiellement fabriquées en Asie, ces importateurs causent un préjudice considérable aux horlogers suisses, susceptibles de ruiner tous les efforts entrepris en termes de fiabilité, de qualité et de respect du consommateur. Car, in fine, c’est bien de cela dont il s’agit: un acheteur trompé ou déçu est un client perdu. On mesure ainsi l'importance des interventions douanières, indispensables à la préservation d'une concurrence saine sur un marché propre.
Compte tenu de l’importance des sommes en jeu, les importateurs frauduleux font preuve d’un culot monstre et d’une parfaite mauvaise foi dans leurs rapports avec l’Administration des douanes, utilisant toute une panoplie de méthodes pour tromper la vigilance des officiers et les induire en erreur. Ils profitent pleinement du fait que les douaniers ne connaissent pas ou peu les particularités de l’horlogerie. C’est précisément sur ce point-là que la FH peut apporter un soutien efficace, car très concret, aux autorités américaines. Dans cette optique, le 14 août dernier, le responsable du Service anticontrefaçon de la FH s’est rendu dans les bureaux de la douane à Miami, à l’occasion d’une journée de formation intensive mise sur pied à l’intention des «Import Specialists» de la «U.S. Customs And Border Protection». Une dizaine d’officiers ont écouté attentivement les explications techniques et ont participé très activement aux exercices pratiques spécialement prévus à leur attention. Les officiers ont eu tout loisir d’examiner en détail plusieurs montres destinées au marché américain et présentant des marquages fallacieux et des indications techniques ou de provenance abusives. Plusieurs cas de figure coexistent, chacun d’entre eux nécessitant une réflexion appropriée. L’expérience montre que les importateurs frauduleux connaissent les tours et détours des textes de lois, exploitant les moindres failles en usant et abusant de toutes sortes d’inscriptions sibyllines. Exemple édifiant parmi d’autres: cette montre proposée à plus de 2'000 dollars, arborant sans vergogne l’indication «individually handcrafted in Switzerland», alors qu’elle a été entièrement réalisée en Chine.
Grâce à l’excellente collaboration initiée avec l’Administration douanière américaine, grâce encore aux précieux contacts personnels établis lors de ce séjour en Floride, grâce enfin à nos marques de certification désormais pleinement applicables, nous voilà rassurés et confiants: tout abus sera poursuivi. A bon entendeur salut!
Downtown Miami: attention marché noir
La municipalité de Miami comptait 300 habitants en 1896 lors de sa fondation. Aujourd’hui, la ville est au centre d’une vaste agglomération de presque six millions d’habitants. Grand centre portuaire, la ville a tissé des liens très étroits avec l’Amérique latine, relation privilégiée entretenue par une importante diaspora hispanophone (principalement en provenance de Cuba et d’Argentine). En ville, si l’on entend parler d’abord l’espagnol puis l’anglais, il n’est pas rare de tomber sur un chauffeur de taxi parlant français: les ressortissants haïtiens sont également très nombreux.
On retrouve ce caractère multiethnique dans toutes les activités commerciales, chaque communauté ayant constitué son propre réseau d’importation-distribution pour une quantité de biens de consommation. Les montres n’échappent pas à ce phénomène. Jusque-là, rien de répréhensible. Sauf que des personnes mal intentionnées profitent de l’opacité de tous ces réseaux pour conduire toutes sortes d’activités clairement illégales. Et dans ce cadre-là, on doit admettre que les montres représentent un produit de premier choix. En parcourant les rues du centre de Miami, la densité des petits commerces d’horlogerie-bijouterie saute aux yeux. Bien entendu, aucun de ces points de vente n’est un concessionnaire agréé, aucun ne le revendique d’ailleurs. La profusion des montres de luxe de toutes marques surprend.
Une visite dans un centre commercial du centre-ville a permis de confirmer la dimension inhabituelle du marché noir dont Miami semble s'être fait une spécialité. Sur deux étages, une vingtaine de boutiques proposent des lignes entières de montres de luxe, accessibles à l'état de neuf ou en deuxième main. Les montres présentent toujours des itinéraires tourmentés. Ainsi ce garde-temps de prestige flambant neuf en or gris (les protections d'usine n'ont pas été retirées), dont la carte de garantie mentionne une vente en février 2014… en Argentine! Comment expliquer qu’une montre vendue dans le réseau agréé en Argentine puisse se retrouver à l’état neuf six mois plus tard dans une bijouterie de Miami? En guise d’explication, les investigateurs de la douane mentionnent le blanchiment d'argent, la fraude fiscale et le recyclage de montres volées. Que du beau linge en somme. Sur ce terreau putride, la contrefaçon ne peut que se développer, malheureusement. |